"Cette nuit, j'ai fait un rêve ! I have a dream ! J'ai rêvé que le Front national avait gagné les élections. Toutes les élections !" Bruno Gollnisch prend un malin plaisir à plagier le célèbre discours de Martin Luther King afin d'évoquer, de manière à peine voilée, une victoire du FN à la présidentielle de 2012. Les quelque 300 militants réunis mardi soir au Back Up, une discothèque parisienne du 15e arrondissement, se font porter durant une heure par le discours onirique de celui qui guigne la présidence du FN. "Quelques mois après la victoire du FN, une quantité d'endroits comme Clichy-sous-Bois, Fontenay-aux-Roses, Vaulx-en-Velin étaient redevenus les pimpants villages français d'autrefois. Les prisons étaient vidées d'un tiers de leurs prisonniers étrangers, partis purger leur peine dans leurs pays d'origine", lance le vice-président du parti frontiste. Séduits par les perspectives de ce "rêve", les sympathisants et militants du Front national - pour la plupart assez âgés - piaffent, grognent de plaisir et scandent des "Gollnisch président !"
À deux mois du congrès de Tours, qui verra le successeur de Jean-Marie Le Pen désigné, Bruno Gollnisch, âgé de 60 ans, croit en ses chances face à Marine Le Pen. "Les militants saluent ma constance, la fermeté de mes convictions, mon talent. J'ai une palette d'expériences plus riche que Marine", insiste le député européen et conseiller régional en Rhône-Alpes. Peu lui importe que sa rivale, de dix-huit ans sa cadette, soit la favorite et qu'elle brille dans les sondages. "Compte tenu de sa visibilité médiatique, Marine ferait une très bonne porte-parole du gouvernement ainsi qu'une excellente ministre de l'Intérieur", ironise le spécialiste de la civilisation japonaise. Adhérent au FN depuis 1984, il mise sur sa popularité parmi les militants et les cadres du parti. "Bruno a fait une bonne campagne. Ses soutiens ont fait leur job. Bref, c'est vraiment un adversaire à ne pas négliger", admet Marie-Christine Arnautu, responsable du comité de soutien de Marine Le Pen.
Rassembler pour gagner
Bruno Gollnisch veut avant tout "rassembler". La victoire du FN aux élections n'est possible que si le parti commence par "accueillir en son sein la famille nationale tout entière", explique le candidat à la présidence du FN. Selon lui, les partisans de Philippe de Villiers tout comme ceux de "la gauche patriotique" incarnée par Jean-Pierre Chevènement ont leur place au FN. D'ailleurs, dans le shadow cabinet du Gollnisch, l'ancien ministre est placé à la Défense "au nom de l'ouverture"... Les "blocs", aussi, pourraient se détacher du "conglomérat hétéroclite qu'est l'UMP" et rejoindre le parti frontiste.
Cette envie de rassembler lui a valu les foudres de Marine Le Pen, qui l'accuse de vouloir réintégrer des "groupuscules" d'extrême droite au sein du parti. "Parmi mes soutiens, il n'y a pas de laïcards extrémistes, ni de satanisme, ni de milices religieuses, mais seulement des braves gens qui sont des patriotes", répond le député européen. "Il ne faut pas que la dédiabolisation de Marine passe par la diabolisation du FN. De toutes les façons, le vent est porteur pour le parti : la dédiabolisation avance toute seule grâce au soutien des électeurs." Après le rêve, le retour sur terre.
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