#Syndiquer tout le site Mouvements Recherche par lieu Accueil Qui sommes nous ? Les dossiers Les archives Contact Newsletter Abonnement Mouvements article Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion * Réduire la police * [a.png] * Agrandir la police * Imprimer l'article * Envoyer par Mail * Réagir à l'article * Écrire à l'auteur Par Damien de Blic La cour des comptes pointe le coût de la rétention des sans-papiers. Mouvements vous propose de relire cette enquête de Damien de Blic : le coût des expulsions réalisées en 5 ans représente l’équivalent du déficit annuel de l’assurance vieillesse. JPG - 103.8 ko Novembre 2006 à Paris, dans le Xème, rafle à l’angle du bd de Strasbourg, des rues Château d’eau et des Petites écuries. Photos Patrick Sagnes/Zarma. La lutte contre l’immigration clandestine constitue depuis les années 1970 un objectif déclaré des politiques migratoires définies dans la plupart des pays industrialisés. Pour la première fois cependant, cet objectif prend depuis quatre ans en France la forme d’un programme chiffrant précisément un nombre de reconduites à la frontière à réaliser chaque année. Cette initiative est due au ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy qui, dans une circulaire en date du 22 octobre 2003, demande aux préfets de doubler à court terme les expulsions d’étrangers en situation irrégulière. La raison de cette instruction est précisée dans le texte : « L’exécution effective des décisions d’éloignement est la condition de crédibilité de toute politique publique de maîtrise de l’immigration. » Cette circulaire précède de quelques jours l’adoption par le Parlement français d’une loi « relative à la maîtrise de l’immigration et au séjour des étrangers en France » (promulguée le 26 novembre 2003) qui donne à l’administration les moyens de répondre aux nouveaux objectifs : accroissement de la durée maximale de rétention administrative, fichage systématique des demandeurs de titres de séjour, subordination de l’octroi de ces titres à des garanties d’ « intégration républicaine » notamment [1] . Cette politique d’expulsions massives n’est pas revendiquée par le seul ministre de l’Intérieur, manifestement soucieux d’afficher sa fermeté en matière d’immigration dans la perspective de l’élection présidentielle de 2007. Elle est largement confortée par le Premier ministre Dominique de Villepin qui expose le 11 mai 2005 un « plan d’action de lutte contre l’immigration irrégulière » qui reprend à son compte les objectifs chiffrés par Nicolas Sarkozy en lui assurant le concours d’un comité interministériel et propose la création de « pôles départementaux » destinés à faciliter la gestion des éloignements d’étrangers irréguliers. Le nouveau dispositif, assorti de fortes pressions sur les préfectures, à qui sont fixées par le Ministère de l’Intérieur un nombre annuel d’expulsions à réaliser [2] , semble porter rapidement ses effets, comme en témoignent les chiffres bruyamment annoncés à la fin de chaque année civile : objectif de plus de 15 000 expulsions fixé en 2004, près de 20 000 en 2005, 24 000 en 2006, 28 000 pour 2007. Dans la mesure où la volonté de faire du « chiffre » est au principe de la politique menée depuis 2003, il n’est pas inutile de se pencher sur l’autre chiffre que masque cette politique, à savoir son coût financier pour la collectivité. Ce chiffre-là, par contraste avec celui des reconduites, n’est guère mis en avant par les auteurs de cette politique. Seul Dominique de Villepin évoque, comme par lapsus, l’ « effort considérable » réclamé par les reconduites massives et va jusqu’à estimer leur coût à 67 millions d’euros pour l’année 2005 [3] . Le silence qui règne par ailleurs s’explique aisément dès lors qu’on prend la (dé)mesure de l’ensemble des moyens mobilisées pour atteindre le chiffre érigé en « priorité absolue » [4] de l’action du ministère de l’Intérieur depuis plus de trois ans. Une politique d’expulsions conduite à tout prix Il peut sembler déplacé d’aborder la politique de reconduite à la frontière sous un angle monétaire, tant son coût, bien avant d’être budgétaire ou économique, est bien évidemment un coût humain : mise en grand danger de personnes renvoyées dans des pays où elles sont parfois gravement menacées, familles disloquées, enfants séparés de l’un de leur parents, stigmatisation et culpabilisation des étrangers résidant en France… Ces maux répétés commencent aujourd’hui à être connus grâce à l’activité des collectifs militants attentifs aux droits des étrangers. La mise en parallèle des moyens déployés pour maximiser les reconduites à la frontière et des drames vécus par ceux qui en sont les victimes met un peu plus en lumière, toutefois, le caractère inhumain d’une logique du chiffre poussée jusqu’à l’absurde. Pour sa seule partie émergée, la politique d’expulsion de sans-papiers mobilise l’équivalent de plus de 10 000 emplois à temps plein. Mais cette politique a aussi besoin de moyens beaucoup moins visibles, parce qu’ « empruntés » à des services normalement destinés à d’autres emplois : fonctionnaires affectés au centres de rétention, policiers assurant les interpellations, les gardes à vue et les transferts divers, escortes internationales vers les pays de retour, toutes les activités sans lesquelles les nombres fixés d’éloignement seraient tout simplement impossibles à atteindre. On peut ainsi raisonnablement estimer que c’est l’équivalent d’au moins 15 000 emplois à temps plein qui est consacré à l’expulsion des sans-papiers. Nicolas Sarkozy justifiait en 2003 sa volonté d’éloignement systématique des étrangers en situation irrégulière par sa contribution à la « crédibilité » d’une politique de lutte contre l’immigration irrégulière. Il semble urgent d’interroger ce souci de crédibilité au regard de ces chiffres : si l’on suppose que le nombre de 28 000 expulsions sera atteint à la fin de l’année 2007, il aura fallu pour réaliser deux de ces expulsions l’équivalent de l’emploi annuel à temps plein d’un fonctionnaire. Si l’on traduit ces emplois sous une forme monétaire, ce sont donc au minimum 3 milliards d’euros [5] qu’auront coûté au total les expulsions réalisées depuis 2003 : l’équivalent du budget annuel du ministère de la culture ou encore deux années de fonctionnement de la ville de Marseille. C’est aussi le déficit de la caisse national d’assurance vieillesse prévu pour 2007. Compte tenu par ailleurs du coût humain individuel – lui inestimable – pour tous ceux qui auront été arrachés au territoire français et à toutes les attaches qu’ils ont pu y nouer, la démesure et l’absurde d’une politique fondée sur des chiffres qui ne semblent finalement servir qu’une « opération de communication » [6] apparaît ici dans toute son évidence. Le difficile chiffrage des reconduites à la frontières Dresser les comptes de la politique d’éloignement s’avère un exercice difficile. La Cour des comptes elle-même, malgré les moyens humains et matériels dont elle dispose, a dû renoncer à une évaluation du « coût global » de la lutte contre les séjours irréguliers, évaluation qui lui semble pourtant nécessaire au regard du caractère prioritaire donnée par le ministère de l’Intérieur à cette lutte. L’extrême difficulté du calcul correspond à différentes causes : une volonté du ministère concerné de masquer le coût d’une politique qui risquerait précisément de faire apparaître son caractère démesuré ; mais aussi le fait que les éloignements massifs ne reposent pas seulement sur la création de nouveaux moyens mais aussi sur le redéploiement de dispositifs destinés initialement à d’autres actions. Certains coûts sont cependant bien visibles. Dominique de Villepin, dans l’interview citée plus haut, annonce lui-même un triplement entre 2004 et 2005 du budget consacré à la lutte contre l’immigration clandestine, de 33 millions à 100 millions d’euros, et l’affectation de 600 policiers supplémentaires à la Police de l’Air et des Frontières (PAF). Cet effort financier va croissant, puisque le budget 2007 de la Police national laisse apparaître une nouvelle hausse de 60 % de ce volet budgétaire largement consacré aux frais d’expulsions, à hauteur de 107 millions d’euros. D’après Carine Fouteau des Echos [7] , la prise en compte de la masse salariale fait croître le budget de la lutte contre « l’immigration irrégulière » jusqu’à 687 millions d’euros, soit l’équivalent de plus de 10 000 emplois à temps plein destinés à l’expulsion des sans-papiers. Le gouffre des CRA Une partie importante du budget que la Police nationale consacre à l’immigration irrégulière est dédiée à l’entretien des Centres de Rétention Administrative (CRA). Créés en 1984, les CRA ont pour but de retenir les étrangers en situation irrégulière avant leur éloignement du territoire national. Ils constituent une pièce essentielle du dispositif d’expulsion. Or, le coût de ces centres croît lui aussi dans des proportions spectaculaires. La multiplication des expulsions nécessite tout d’abord l’agrandissement des sites existants (au nombre de 19 au début de 2007) et la construction de nouveaux centres (trois sont prévus en 2007), l’objectif étant d’atteindre un nombre de 1 500 places disponibles à la fin de l’année 2007 contre un peu plus de 1 000 aujourd’hui. Les dépenses d’investissement relatives au CRA représentent dans le budget 2007 une somme de 270 millions d’euros, dont 48,5 millions d’euros destinés à la construction des nouveaux centres [8] . Le nombre moyen d’étrangers hébergés quotidiennement en CRA augmente certes du fait du nombre croissant d’interpellations mais aussi en raison de l’allongement de la durée moyenne de rétention qui a doublé (de 5 à 10 jours) entre 2002 et 2005. L’effet conjugué de ces deux facteurs conduit ainsi à accroître fortement le nombre quotidien moyen de personnes en rétention qui passe de 370 en 2002 à 840 en 2005 [9] . Or, le coût de chaque rétention augmente fortement dans le même temps. L’indicateur sur le coût moyen d’une rétention administrative, mis en place dans le cadre de la nouvelle Loi organique relative aux lois de finance (LOLF), prévoit un chiffre de 1 000 euros pour 2007 (contre 600 euros en 2004), sous l’effet non seulement des durées plus longues de rétentions mais aussi de « l’amélioration des prestations hôtelières » qui fait suite aux dénonciations répétées des conditions inhumaines de rétention des personnes en voie d’expulsion [10] . Encore cet indicateur semble largement sous-évalué puisqu’il n’intègre pas, par exemple, les charges liées aux heures de fonctionnaires consacrées à la rétention. Pas moins de 890 policiers étaient affectés aux CRA en mai 2006. On soulignera au passage que parmi l’ensemble des personnes en rétention, une grosse majorité n’est pas effectivement expulsée : en 2005, seulement 32% [11] d’entre elles ont effectivement été reconduites à la frontière. Une avocate toulousaine cite le cas de quatre de ses clients ayant séjourné chacun 32 jours en CRA -séjour sans conséquences dramatique, aucun consulat ne les ayant reconnus. Elle calcule elle-même : « cette rétention administrative inutile a donc coûté 32 jours x 87,5 euros (chiffres pour 2006) x 4 personnes = 11 187,20 euros au contribuable français » [12] . S’il l’on se rappelle que cette situation concerne le tiers des détenus, soit environ 10 000 étrangers en 2006, on arrive à une dépense de près de 9 millions d’euros, absurde d’un point de vue financier mais parfaitement logique dans le cadre d’une politique où aucune occasion d’augmenter le chiffre d’expulsés ne doit être perdue… La face cachée de la politique d’éloignement : les « rafles » Le budget de la Police consacrée explicitement à l’immigration clandestine ou celui affecté au fonctionnement des centres de rétention peuvent ainsi donner lieu à des estimations en termes de coût, quoique largement sous-estimées en elles-mêmes. Mais ces dépenses « budgétisables » et donc partiellement visibles masquent tout un ensemble de moyens déployés pour atteindre les chiffres annuels d’éloignement qui ne font eux l’objet d’aucune évaluation. Avant d’être placés en CRA, les étrangers irréguliers doivent être interpellés. Or, les services de police spécialisés dans la lutte contre l’immigration clandestine (du type de la 12e section des renseignements généraux de la préfecture de Paris) ne peuvent à eux seuls assurer plus de 20 000 expulsions par an. Ce sont les forces de police locales qui sont dès lors sollicitées pour assurer que l’objectif soit atteint. La contribution des forces de la police « ordinaire » à l’interpellation des personnes en situation irrégulière prend la forme de vastes opérations de contrôles d’identité sur la voie publique. Dans la circulaire du 22 octobre 2003 déjà citée, Nicolas Sarkozy demandait en effet aux préfets, en vue d’assurer un nombre suffisant d’éloignements, de mobiliser toutes les opportunités ouvertes par l’article 78-2 du code de procédure pénal qui permet, sur réquisitions écrites du procureur de la République, de vérifier l’identité de toute personne dans un lieu et pour une période de temps déterminés par ce magistrat. De fait, sous couvert d’assurer la sécurité des biens et des personnes ou de prévenir des atteintes à l’ordre public, les opérations reposant sur l’article 78-2 prennent de plus en plus la forme de véritables « rafles » au cours desquelles ne sont contrôlés que les personnes susceptibles d’être « irrégulières ». Comme le résume la CIMADE, « la police ne tombe plus "par hasard" sur les sans-papiers, elle va les chercher » [13] . Dans les quartiers populaires du nord et de l’est de Paris se multiplient ainsi depuis l’été 2006 des opérations visant à interpeller un maximum de sans-papiers. Ces opérations, indispensables pour atteindre le chiffre d’éloignement fixé aux préfectures par le ministère de l’Intérieur, supposent un déploiement considérable de moyens dont le coût n’apparaît cette fois dans aucune des lignes budgétaires de la lutte contre l’immigration clandestine. Un officier de police judiciaire (OPJ) d’un commissariat du nord de Paris, habitué de ce genre d’opérations et qui a accepté de répondre à nos questions sous couvert d’anonymat explique ainsi : « les critères de "réussite" des opérations, dont dépend la carrière de nos chefs, sont le nombre de gardes à vue, puis le nombre de placements en rétention. A moins de dix sans-papiers interpellés, l’opération est un échec. Pour parvenir à ces chiffres, il faut au moins dix fonctionnaires procédant aux interpellations sur la voie publique, sur une durée de deux heures en moyenne. Chaque garde à vue mobilise ensuite deux à trois fonctionnaires. Le nombre augmente pour peu qu’il y ait une mobilisation autour d’une personne arrêtée, s’il s’agit d’un parent d’enfant scolarisé par exemple. Au coût horaire des fonctionnaires, ça commence à chiffrer vite. Il faut ajouter ensuite, pour chaque interpellé, la venue d’un traducteur et le coût de la visite médicale, souvent demandée, et qui se situe autour de 50 euros. Il faut enfin ajouter les frais de transfert vers le centre de rétention ». Bien conscient du caractère « non raisonné » de cette politique du chiffre, cet OPJ insiste sur la détérioration « évidente » de la qualité du travail judiciaire ordinaire que provoque la concentration des forces policières. « On est de plus en plus nombreux à être exaspérés par ces consignes qui nous obligent à arrêter des sans-papiers plutôt que des "crapules" ». Or, malgré ces critiques partagées par un nombre croissant de policiers [14] , le rythme des rafles tend à s’accélérer. D’une à deux par semaine en moyenne pour l’année 2006, les opérations d’interpellations de sans-papiers sur la voie publique sont devenues quasi-quotidiennes, comme en témoignent les réseaux de vigilance mis en place par les différents collectifs militants à Paris. Une partie du contingent policier qui n’est pas destinée a priori à la lutte contre l’immigration clandestine peut être ainsi amenée à consacrer une bonne moitié de son activité à la « chasse aux sans-papiers ». Et pour éviter les protestations, de plus en plus nombreuses, elles aussi, des riverains et des militants, les opérations de nuit se multiplient, avec les surcoûts salariaux correspondant. De vastes opérations sont plus difficilement envisageables en province ou dans des villes de taille moyenne où les sans-papiers sont moins concentrés que dans certains quartiers parisiens. Les arrestations de sans-papiers posent alors d’autres problèmes, à l’origine d’autant de coûts supplémentaires. De nombreux pays refusent en effet d’accueillir leurs nationaux renvoyés de France sans preuve officielle de leur nationalité, preuve indispensable pour l’obtention du laissez-passer nécessaire à l’expulsion. En l’absence de passeport ou de pièces d’identité officielle, l’administration doit dès lors présenter l’étranger arrêté à son consulat, qui n’existe parfois qu’à Paris ou dans certaines métropoles régionales. Il est ainsi très courant qu’à l’interpellation et à la garde-à-vue succède un coûteux aller-retour, toujours sous escorte policière, du sans-papier vers Paris, Toulouse ou Marseille, sans aucune garantie sur le succès de la démarche. A rebours, pour « rationaliser » les expulsions, les opérations d’interpellations menées à Paris se focalisent volontiers sur certains ressortissants dont on sait que le pays d’origine délivrera sans difficulté le laissez-passer nécessaire à l’éloignement. C’est ainsi que les populations chinoises concentrent l’essentiel des interpellations réalisées dans certains arrondissements de la capitale. Certaines opérations ont pu ainsi être « cassées » devant les tribunaux parce que les équipes policières arrivaient sur les lieux de la rafle accompagnées d’un traducteur chinois… De manière générale les efforts de l’administration pour réaliser des économies d’échelle en matière d’éloignement aboutissent logiquement à de nombreux vices de procédures, au point qu’en 2006, un quart des personnes placées en rétention administrative ont été remises en liberté à la suite d’une décision du juge des libertés et de la détention [15] : chiffre à apprécier en regard du coût rappelé plus haut de la rétention. L’expulsion de la famille Raba constitue sans doute l’un des cas les plus tragiques engendrés par la politique d’éloignement menée par le gouvernement français. Musulman albanophone du Kosovo, Jusuf Raba refuse en 2001 de participer aux exactions menées contre la minorité serbe de sa région. A titre de représailles, sa femme, Shrepsa, subit une agression sexuelle. Jusuf et Shrepsa fuient avec leur fils vers la France où l’asile politique leur étant refusé, contrairement à leurs frères et sœurs, ils deviennent « sans-papiers ». Cinq ans plus tard, en 2006, la famille Raba qui s’est agrandie de deux enfants fait une demande de titre de séjour dans le cadre de la circulaire « Sarkozy » du 13 juin – ouvrant sous conditions la possibilité de régularisations pour les familles sans-papiers dont les enfants sont scolarisés en France. Cette régularisation leur étant refusée, la gendarmerie vient chercher le 17 novembre la famille à son domicile de Gray, en Haute-Saône, en vue d’une expulsion. Devant la résistance désespérée de Jusuf et Shrepsa, face aux protestations émanant de leurs voisins, des instituteurs des enfants, des militants des droits de l’homme et du Réseau Education Sans Frontières, la police décide d’employer les grands moyens. Après une première une première période de rétention de 17 jours et une tentative « manquée » d’expulsion depuis Paris, la famille est conduite à Toulouse, loin de ses soutiens, d’où un avion militaire spécialement affrété les dépose au Kosovo quatre jours plus tard. On peut rester longtemps songeur face au dispositif déployé pour éloigner deux parents et leurs trois enfants, âgés de 7, 4 et 3 ans. Les raisons sont sans doute à chercher du côté d’un ministre de l’Intérieur soucieux de soigner son image de fermeté ou de l’aubaine que constitue, pour la préfecture d’un département rural en déficit d’éloignements, l’opportunité d’expulser cinq personnes d’un coup. L’acharnement a toutefois un coût et l’indignation partagée par de nombreux citoyens s’accroîtra sans doute si on en prend la mesure. Les 21 jours qu’auront au total passé en rétention les cinq membres de la famille Raba, ramenés au coût journalier évoqué plus haut, représentent une somme supérieur à 10 000 euros. On peut estimer à un montant équivalent les différents trajets que l’administration policière a fait effectuer aux Raba à travers la France : Gray-Lyon, un aller-retour Lyon-Paris dans le cadre de la première expulsion manquée, un aller simple vers Toulouse, sans compter les multiples trajets entre le Centre de rétention, le Tribunal administratif ou le Tribunal de grande instance. Le prix de l’heure de vol d’un avion militaire est d’environ 5 000 euros [16] . Celui qui a été affrété pour les Raba a ainsi dû voler du Bourget à Toulouse, de Toulouse à Tirana, de Tirana à Pristina, puis de Pristina au Bourget : au moins 50 000 euros pour ce seul poste. Il faut ajouter à ces dépenses les frais représentés par l’ensemble du personnel policier mobilisé pour l’opération : pas moins de dix policiers et une infirmière ont escorté la famille jusqu’à Pristina, ont ensuite dû loger sur place avant de revenir en France : difficile de chiffrer ce poste à moins de 10 000 euros. Soit environ 80 000 euros (au bas mot) : tel aura été le prix consenti par les autorités française pour « éloigner » – et mettre en danger – trois enfants et leur parents. Expulser à tout prix : tel semble être la maxime des responsable de la politique d’éloignement systématique. Autre illustration des aberrations générées par la politique du chiffre, le cas de Suzilène Monteiro, lycéenne de Colombes (Haut-de-Seine), expulsée en octobre 2006 vers le Cap-Vert. Traitement exceptionnel, là encore : c’est pour cette seule jeune fille qu’a cette fois été affrété un avion par le ministère de l’Intérieur. La très forte mobilisation organisée par ses soutiens a conduit Nicolas Sarkozy à revenir pour une fois sur une décision d’expulsion et à accorder à Suzilène la délivrance d’un visa long séjour pour poursuivre ses études : quatre mois après son éloignement, Suzilène a pu revenir en France. Le coût de cette opération n’est sans doute guère inférieur à celui de l’expulsion de la famille Raba (du fait de l’affrètement notamment). Et celle-ci n’aura même pas permis de gonfler les statistiques de la chasse aux sans-papiers. Article initialement publié sur ce site en mars 2007. Publié par Mouvements, le 2 juillet 2009. http://www.mouvements.info/Sans-papiers-l-autre-chiffre-de-la.html P.-S. Le cas de la famille Makombo, déploiement de force contre une famille sans papiers Barbe Makombo fuit en 2001 la République Démocratique du Congo (RDC) où des soldats l’ont violemment agressée. Son mari et quatre de ses enfants ont disparu. L’asile politique lui ayant été refusé, Madame Makombo se voir délivrer un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière (APRF) à la suite duquel elle est arrêtée puis assigné à résidence dans l’Yonne où l’héberge la Croix-Rouge. Le jour de son arrestation en août 2005, Rachel et Jonathan, deux de ses enfants qui ont pu la suivre en France, décident de fuir à Paris pour éviter l’expulsion de la famille. Afin de retrouver les deux enfants disparus – cachés en fait grâce à la chaîne de solidarité qui s’est mise en place autour de la famille –, la préfecture de l’Yonne envoie chercher par deux policiers les deux petites sœurs de Rachel et Jonathan au centre aéré où elles passent une partie de leur vacances d’été. Une vingtaine de domiciles de personnes susceptibles d’avoir hébergé les enfants Makombo sont perquisitionnés, de même que l’église évangélique de Sens autour de laquelle s’organise la mobilisation pour la famille. Selon la journaliste Anne Gintzburger , la police de l’Yonne a procédé dans le même temps à une vérification des appels passés depuis les téléphones de proches de Barbe Makombo et à un examen systématique des agendas de ces mêmes personnes. Une journaliste de Radio France ayant couvert les événements a dû de même subir une perquisition de son domicile ainsi qu’une convocation au commissariat pour interrogatoire. On touche avec cette affaire qui n’est pas isolée la démesure de l’ampleur d’un appareil policier déployé pour une mère de famille et ses cinq enfants, au seul motif qu’elle n’a pas réussi à faire la preuve des exactions subies dans le pays qu’elle a du fuir. Pour faire du chiffre, il n’est pas toujours besoin d’organiser des rafles. Une famille de cinq personnes potentiellement expulsables justifie également l’usage de grands moyens. Répondre à cet article 23 Messages de forum * Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 15 mars 2007 17:27, par hg8 L’expulsion a un coût, c’est vrai, mais le maintien en France ou la régularisation en a un également. Le premier est une fois pour toute, le second se multiplie par le nombre d’années nécessaire à l’intégration de l’émigré et à sa "rentabilisation" (excuser le terme)pour la France. Pour que vous soyez objectif il faudrait faire la comparaison entre les deux. Le maintien en France aégalement un coût social. Contairement à ce que certains vont s’écrier, je ne suis pas raciste, j’ai beaucoup travaillé de par le monde, mias autant la compassion se comprends et se justifie pour les cas individuels, autant au niveau du Pays il n’est pas possible d’acceuillir ’toute la misère du monde’ Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 15 mars 2007 18:11, par Cyril Vous envisagez le coût social de l’immigration, il faut encore envisager les recettes que cela génère. Il est effet notable que pour la plupart des pays, les phases d’immigration sont concomitante des phases de prospérité. La politique actuelle a pour effet de "clandestiniser" les immigrés avec tous les effets pervers que cela comporte : économie souterraine,jeune-gens exclus des études supérieures, résident non-justiciable, misère, ... Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 15 mars 2007 20:02, par JMP18 Nous n’avons jamais accueilli toute la misère du monde, les immigrés arrivant en France étant très rarement les miséreux des pays. Non seulement l’immigration n’est pas un coup, mais elle a permis de passer le cap des difficultés démographiques. La stigmatisation des populations d’origine étrangère à la France, mais c’est vrai dans tous les pays, permet de créer les boucs émissaires nécessaires pour que les salariés se divisent, plutôt qu’ils ne s’intéressent à ceux qui détournent leurs richesses. Ceux qui dirigent le pays, aujourd’hui, sont évidemment près à consacrer des sommes importantes pour servir leurs frères et amis, à travers la médiatisation de ces expulsions. En plus ils ne vont pas se gêner quand ces Euros permettent de creuser un déficit qui leur permet de justifier leur politique antisociale ! Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 16 mars 2007 10:17 La richesse générée par le travail des immigrés, clandestin ou non, est supérieure à la soi-disant coûte social. Tout le monde travaille et presque tout le monde déclarent leurs revenus et paient leurs impôts le cas échéant. En plus, beaucoup travaille dans les secteurs qui manquent de main d’oeuvre. De surcroît, selon les projections démographiques les plus récentes et les plus officielles démontrent que nous avons besoin de l’immigration pour pallier à la viellissement de la population, sinon le système de retraite par répartition tombe en ruine illico. Peut-être vous n’êtes pas raciste, mais vous perpétuez des idées reçues et dangereuses. Faites un peu plus de recherches et évitez des discours sans fondement factuel. Le gouvernement finance une espèce de campagne de communication à coûte exorbitante, sans arriver à leurs fins, et en brisant les destins et parfois les vies d’individus. Will, Paris 11ème Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 19 mars 2007 11:56, par Claudius Si vous voulez également aller jusqu’au bout il vous faudra déduire de ce "coût" ce qu’un immigré "rapporte". Le morceau de phrase : "la france ne peut pas accueillir toute la misère du monde ..." est d’une stupidité sans nom, toute la misère du monde ne tentant pas de venir chez nous. Il faut avoir bien du courage, et une sacré motivation, pour franchir tous les obstacles , quitter sa famille, ses amis, son pays, pour chercher à survivre dans un pays aujourd’hui au 3/4 hostile (espérons que cela change demain). Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 22 mars 2007 16:23, par antigone "mais il faut en prendre sa part" disait Rocard ! en vérité si vous vous penchez sur les cas des expulsés vous comprendrez ce qui se passe dans ce P... de Pays où avec des arguments intériorisée comme les votres, la France est littéralemnt montée l’une contre l’autre. Les "étrangers" sont une part de la richesse du pays, la plupart du temps ils travaillent dans des conditions qu’aucun de vos frères ou voisins n’accepteraient. Parfois ils sont en france depuis plus de 5 ans voire dix pour certains dossiers, leurs enfants vont à l’école parlent, vivent, respirent Français et on "jette" leur pères dehors sans qu’ils aient commis le moindre délit, la moindre faute si ce n’est celle d’être vulnérable !C’est une honte ! Ils sont traités comme des coupables. Si chacun de nous se souvenait de ses ancêtres, la France ne permettrait pas que ces personnes soient traitées de la sorte. Le clivage imbécile,la haine de l’autre dans sa différence, ouvre bientôt les portes à un totalitarisme destructeur sur les populations. La molesse intellectuelle domine en ce moment dans le pays et nous ne tarderons pas à en payer le prix ! Notre intérêt est de fraterniser pas de s’affronter ! à qui profite, croyez-vous cette manipulation sur les esprits soucieux d’équilibre dans leur vie quotidienne ? : Aux manipulateurs qui vont régner en maître sur le déclin des solidarités... C’est pourquoi nous devons réagir et nous opposer à ce discours mâtiné de xénophobie qui enfle et qui ne se reconnaît même plus comme indécent ! C’est terrifiant tout ce qu’on entend sans que la honte nous fasse rougir ! Le "politiquement correct" est de droite aujourd’hui. Cette mode condamnera les plus nombreux à encore plus de précarité et de difficultés économiques.. La droite que je sache c’est le parti des riches et ceux qui ne savent plus ça doivent le réapprendre... L’étranger d’aujourd’hui se bat pour vivre, je respecte sa lutte pour la vie et appelle les gouvernements sourds à la souffrance, à l’injustice, à mener une politique de respect dans les pays d’où viennent ces travailleurs immigrés. Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 24 septembre 2007 12:43, par Karl-Groucho Devant « 15 mars 17:27, par hg8 L’expulsion a un coût, c’est vrai, mais le maintien en France ou la régularisation en a un également. » Ah ! Eh bien comptons tout, alors, Monsieur ! Commencez par compter combien rapporte à la France chaque « étranger » franchissant les « frontières ». Hop ! Un adulte prêt à être correctement exploité, ça fait combien d’ économie , ça ? Comptez donc ! Et comptez donc aussi ce que rapportent les cotisations obligatoires dont la contrepartie n’est finalement jamais versée (par exemple, les retraites, versées uniquement — et quelles retraites ! et quelle honte ! — uniquement si la personne reste sur le « sol français ». Exemple non limitatif). Et qu’on cesse de parler de « sans papier » (comme équivalent de « délinquant »). Le « sans papier » a été « inventé » d’un trait de plume (et, sauf erreur, par des textes rétroactifs comme dans les années quarante !). Et qu’on se rappelle que quelqu’un (après un autre qui parlait du bruit et de l’odeur... Mais où sommes-nous donc ?!) a récemment dit que le travail libère (« Arbeit macht frei », c’était écrit au -dessus de l’entrée de pas mal de camps d’extermination). Et qu’on consulte la carte actuelle des camps en Europe — Voir lien provenant du site http://www.migreurop.org/ Et qu’on en tire les conclusions qui s’imposent. S’il n’est pas trop tard. Voir en ligne : Carte des camps en Europe (2,2 Mo) Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 3 juillet 2009 12:54, par pola.k S’il fallait reprendre dans son entier cette citation de Rocard devenue hélas tristement populaire dans sa version tronquée, souvenez vous qu’elle dit très précisément : "La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde, mais elle doit en prendre fidèlement sa part." La France reste la quatrième puissance économique de la planète, et quelles que soient ses difficultés actuelles, elles sont sans commune mesure avec celles de l’immense majorité du reste de l’humanité. Et surtout, la France reste aussi la quatrième puissance économique mondiale parce qu’elle a les moyens d’exploiter les ressources naturelles et humaines de pays plus pauvres. Parler d’"aide au développement économique" quand on profite à l’étranger d’une main d’œuvre bon marché, ou qu’on exploite le pétrole de la Francafrique, ça devient honteusement abusif si dans le même temps on prend bien soin de fermer les frontières histoire de maintenir un déséquilibre profitable. Et prendre fidèlement notre part de la misère du monde, ça veut dire aussi ne pas oublier à quel point nous y contribuons avec notre niveau de richesse actuel. On peut se croire "raisonnable"et "lucide" quand on argue de considérations économiques pour prôner une "gestion raisonnée" de l’immigration. On peut même se dédouaner avec une pointe de "compassion individuelle" et une large dose de fatalisme cynique. Ouais, on peut choisir d’être aveugle, c’est sûr, c’est tellement plus confortable.… Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 27 septembre 2010 21:17, par acc A court terme, nous pouvons effectivement nous poser la question. Mais,restons cynique et continuons à raisonner par les chiffres... Nous sommes une population vieillissante qui dans un futur proche aura besoin de l’immigration. Si nous raisonnons alors d’un point de vue économique et à long terme nous avons davantage intérêt à intégrer les immigrés qu’à les expulser... Répondre à ce message * Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 15 mars 2007 17:28 merci pour cet article. enfin on ose parler du coût pour la société... Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 15 mars 2007 18:57, par Jacques BILLAUDEL J’ai milité de 1998 à 2000 auprès de la CIMADE à Paris. J’allais régulièrement au 35 bis et j’ai accompagné diverses personnes à la Préfecture de Police. M. Jean-Pierre CHEVENEMENT n’était pas laxiste et nous avions déjà beaucoup de raisons pour critiquer l’usage abusif du 78-2. Il y avait déjà des "presque rafles" devant un centre de la Croix-Rouge dans le XXe Arrt. La politique du Ministre de l’Intérieur Nicolas SARKOZY me donne la nausée. Votre article est excellent. Malheureusement je n’ai plus la capacité physique pour intervenir auprès des sans-papiers mais j’ai encore assez de force pour NE PAS ME TAIRE. Merci et que votre information contribue à plus de solidarité envers ceux qui doivent vivre dans la crainte permanente d’une arrestation. Jacques BILLAUDEL (retraité, Paris). J’ai signé la pétition "Laissez les grandir ici" Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 22 novembre 2010 20:27 Excellent article, j’aime le ton pris et engagé. Enfin on ne cache pas les conséquences de ces actes politiques. On devrait penser d’abord au chômage, à l’éducation etc. Webmaster de vitre teinté Répondre à ce message * Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 16 mars 2007 00:02, par j A la grande epoque (jusqu’en 2001) de la zapi 2 à l’hotel Ibis, le ministere de l’interieur payé à Accor la nuit (70 euros) + le petit dej et 2 repas (25 euros) pour un etage entier (60 chambres) puis un second cela revenait à un cout faramineux et c’est pour cette raison qu’ils ont construit zapi 3. Pour un etage : 5 700 euros par jour pour un etage x 365 jours soit 2 millions d’euros par an ! Répondre à ce message * Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 16 mars 2007 08:46, par Rémy Bonjour Cet article est parfaitement sensé, ses arguments parfaitement valides. Sur le plan de la démonstration, rien n’est à rajouter ni à retirer. Cependant, une question est à se poser, une question de base et préalable à la tenue même du raisonement : faut-il pratiquer des expulsions d’immigrés en situation irrégulière ? Ou plus concrètement, faut-il laisser grandes ouvertes les vannes de l’immigation ? La réponse ne m’apartient pas, elle appartient au peuple de France qui, sauf erreur, s’est prononcé douloureusement à ce sujet lors des dernières présidentielles et du referendum sur la constituion européenne. Je crois pour ma part qu’il ne faut pas confondre les genres. Est-ce le principe qui est condamné ou simplement sa forme ? Car enfin, enfoncer le clou sur un sujet aussi sensible en l’abordant sous cet angle ne risque à mes yeux que de donner du grain à moudre aux tendances néo-fascistes, et l’on entendra dans les rhétoriques Front-nationalistes des propos du type "la gauche de l’immigration" " la gauche de l’étranger", faisant assimiler au votant de base gauche et "journées portes ouvertes" menant tout droit à un second tour droite versus extrême droite ! Je ne me ferai donc pas l’echo de ce discours, pourtant sensé et sensible, ne serait-ce que pour éviter aux démons néo-fascistes de refaire surface... Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 17 mars 2007 00:59, par Achtung Je ne vois aucune raison d’interprêter tous les résulats électoraux comme des expression ant-immigrées, surtout dans el cas de la constitution européenne, qui n’a pas grand chose à voir avec la politique continentale d’immigration. Ainsi vous jouez le jeu du FN qui veut faire croire qu’il gagne chaque élection, puisqu’il interprête les résultats à sa façon. Mais encore une fois, quel est l’enjeu de l’immigration ? Est-ce un enjeu politicien ? institutionnel ? ou simplement humain ? Pourquoi tous les discours de "nos" chefs d’états ou de gouvernements sont incapables de se rendre compte que derrière chaque chiffre, chaque cas sur les feuilles, il y a TOUJOURS des histoires graves, cruelles d’êtres humains en détresses... ? Alors après, il est toujours possible de sortir une connerie du genre "on ne peut pas accueillir toute la misère du monde", mais on en accueille presque pas du tout ! En plus de ça, il n’y a AUCUNE raison de considérer que l’immigration créé un problème, ou des problèmes ! Voir en ligne : http://mapage.noos.fr/alalsace/ Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 22 mars 2007 22:30, par luciole je pense qu aborder les choses de cette maniere ne fait que mettre un peu plus le doigt sur le "cout" de ces expulsions et cette mise en avant financiere est souvent unes des premieres choses que l on retient... Ceci dit une reflexion saine et positive doit etre mise en avant concernant l immigration mais , je ne veut pas moi non plus voir fleurir ou plutot refleurir ce discours et cette haine destructrice faschiste...et si on ne fait pas attention ca peut aller vite... alors il ne tient qu a nous de ne pas aborder les choses de maniere ambigu... Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 18 avril 2007 01:35, par Damien Et si c’était parce que depuis 30 ans la gauche n’ose pas défendre à voix haute les immigrés, justement au pretexte qu’il ne faut pas effrayer les électeurs du FN, que l’idée fausse s’est massivement répandue que l’immigration est un problème, voire le problème ? Et si, en démocratie, on pouvait continuez à défendre le droit et la justice, même contre certains résultats électoraux ? Et si on renversait la charge de la preuve, et qu’on demandait aux anti-immigration ce qui peut bien justifier les coûts faramineux de cette politique démagogique ? Et si l’on arrêtait d’avoir honte de ne pas être un électeur frontiste ? Répondre à ce message * Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 19 mars 2007 20:05, par Etranger Je n’ai pas une opinion à donner, mais plutôt une question que je me pose moi même. En tant qu’etranger, je me demande pour quoi faire tout l’effort qu’il me faut pour avoir ma carte de sejour, si des autres ont les mêmes avantages que je peux avoir sans rien faire ? Répondre à ce message + Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 23 mars 2007 07:48, par Joke Bien sûr la France ne peut pas accueillir le monde entier. C’est tout à fait vrai. Pourtant, il ne sert à rien de faire comme le petit enfant qui vide la mer dans son seau : aucun pays, aucun empire n’a jamais réussi à contenir les peuples qui mouraient de faim aux frontières. On en expulse 30000, dans le même temps 100000 sont entrés clandestinement ! Il faut des mesures positives d’aide au développement économique pour que les « étrangers » aient envie de vivre « au pays ». Et des mesures de coopération pour aider les pays à assurer la sécurité de leurs citoyens. Cela coûtera cher ? Peut-être mais ce ne sera pas de l’argent dépensé en pure perte comme ces sommes énormes auxquelles il est fait allusion ci-dessus. Bien entendu cela ne peut se faire que dans le cadre européen. Thierry Pech consacre un billet à ce sujet - et à l’étude de Damiens de Blic aujourd’hui : http://thierrypech.blogs.nouvelobs.com/ Voir en ligne : Sans-papiers Répondre à ce message o Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 5 avril 2007 07:01, par maria de Calais, une très française Ce n’est pas une politique de coopération militaire ni des mesures d’aides au développement qu’il faut. C’est sortir de leur pays tout simplement. N’allons pas "aider" des pays qui ne nous ont rien demandé et certainement pas la charité, ni l’ingérence dans tous les domaines politiques et économiques. Nous vivons dans un système d’échanges économiques qui ne convient pas à l’être humain : notre force de travail n’a jamais été payé par l’équivalent des richesses produites. Il en est de même dans les pays que fuient les gens. Derrière le paravent de l’aide humanitaire se cachent les militaires et commerçants du monde capitaliste. Un tchadien arrivé à Calais, baptisait cette ingérence "les 3M", l’ordre d’apparition dans les pays africains : Missionnaires, Militaires, et enfin Marchands. J’ai toujours été très étonnée, pour ma part, que les candidats aux élections présidentielles ne vantent jamais leur programme en ce qui concerne la politique étrangère. Beaucoup de monde ignore l’ingérence et l’utilisation de bandes armées si nécessaire, pour agir directement sur les pouvoirs politiques de pays qui ne sont pas le nôtre. Combien de massacres ont été orchestrés par des représentants de notre pays ? et en notre nom... Donc avant de se plaindre de l’arrivée d’étrangers, dégageons de leur pays. Faisons sortir les marchands qui n’ont aucun état d’âme pour la vie, ni pour celles des travailleurs français, ni pour celles des travailleurs africains dont la lutte et l’organisation politique sont très sévèrement réprimés. Nous avons besoin des richesses naturelles et nous possédons des technologies qui peuvent s’échanger. Nous devons instaurer des relations d’échanges économiques qui ne ruinent pas les pays. En réalité, il faut faire disparaître le système économique capitaliste, qu’il soit libéral ou non Il est la source de guerre et le producteur de la misère. Sarkozy est un petit porte parole du patronat. Il ne faut pas l’oublier. Ne pas s’attaquer aux causes nous conduira à transformer la France en une vaste société caritative (si le vote est socialiste) ou en une sorte de dictature où le premier qui bouge est mort (si le vote est droite et extrême droite) Répondre à ce message * Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 2 mai 2007 15:13, par Samuel du 75 ... A se demander aujourd’hui si la haine et l’exclusion que les français ont très vite adopté est un mal nécessaire dans le paysage de la France. Effectivement, les gens se détestent sans savoir pourquoi, du moins, sans le vérifier. Les fraçais sont en train d’applaudir les expulsions quasi quotidiennes tout en oubliant l’apport et la richesse qu’une main d’oeuvre complètement extérieure apporte à la France. Sans compter que ’ces immigrés’ n’occupent généralement pas des postes de PDG de multinationales, ni de partons de chaines de télévision ce ne sont donc probablement pas eux qui siffonent l’argent des français. Malheureusement l’argument de l’immigration est plus que d’actualité aujourd’hui dans les combats politiques malgrès l’évidence que le plus grand problème est ailleurs... Pour conclure, on est passés de manifs en 2002 anti-haine à des manifs en 2007 pro haine... merci Nicolas Sarkosy pour ce que tu as ’importé’ ’clandestinement’en France... Répondre à ce message * Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion 8 octobre 2007 16:48, par emmanuel Merci Damien pour cet argument nouveau, (tellement qu’ils semble avoir pris à revers les reflexes habituels des lecteurs de gauche), et parfaitement convaincant. Maintenant quand on me parlera de la lutte contre l’immigration clandestine, je dirai toujours "... et en plus d’être immorale, la politique de reconduite est parfaitement inefficace car, comme l’a montré De Blic, elle coûte un fric fou : le budget annuel du ministère de la Culture. Ceux qui la mènent ne sont donc pas seulement des salops, ce sont aussi des incapables qui dépensent inconsidérément d’énormes sommes d’argent public." Merci encore et bravo ! Grâce aux gens comme toi on finira par les avoir, nom de nom ! emmanuel Répondre à ce message * pour un autre regard sur les expulsions 3 juillet 2009 17:06 http://www.disparitions.eu Un site de témoignage de personnes sans-papiers qui ont été interpellées et placées en CRA. Un site pour sortir des chiffres sur les expulsion parce que les chiffres ne disent rien de la violence faîte aux femmes et aux hommes. Un site pour qu’on ne dise pas plus tard "je ne savais pas que cela se passait en bas de chez moi". Voir en ligne : http://www.disparitions.eu Répondre à ce message auteur Damien de Blic Enseignant-chercheur en sciences politiques, RESF Paris 11e. Pourquoi ce texte? Il peut sembler déplacé d’aborder la politique de reconduite à la frontière sous un angle monétaire, tant son coût, bien avant d’être budgétaire ou économique, est bien évidemment un coût humain : mise en danger de personnes renvoyées dans des pays où elles sont parfois gravement menacées, familles disloquées, enfants séparés de l’un de leur parents, stigmatisation et culpabilisation des étrangers résidant en France… Mais la mise en parallèle des moyens déployés pour maximiser les reconduites à la frontière et des drames vécus par ceux qui en sont les victimes met un peu plus en lumière, toutefois, le caractère inhumain d’une logique du chiffre poussée jusqu’à l’absurde. Dans la mesure où la volonté de faire du « chiffre » est au principe de la politique menée depuis 2003, il n’est pas inutile de se pencher sur l’autre chiffre que masque cette politique : son coût financier pour la collectivité. Ce chiffre-là, par contraste avec celui des reconduites, n’est guère mis en avant par les auteurs de cette politique. Notes [1] Pour une présentation de cette loi et de la loi « Sarkozy II » qui lui succède en juillet 2006 , cf. le Guide de l’entrée et du séjour des étrangers en France du GISTI (La Découverte). L’introduction de la dernière édition de ce guide (2006) propose une brève mais lumineuse histoire des évolutions récentes de la législation sur l’immigration en France. Ce parcours fait apparaître, au-delà des fluctuations dues aux alternances des majorités au pouvoir, une tendance lourde à la précarisation des étrangers non communautaires résidant en France. [2] Nicolas Sarkozy s’adressait ainsi le 29 septembre 2006 aux préfets réunis à l’Hotel Beauvau : « Je vous ai fixé un objectif de 25 000 éloignements cette année. Je constate que, lors des huit premiers mois, 14 304 étrangers ont été reconduits dans leur pays, auxquels s’ajoutent 650 retours volontaires aidés. C’est insuffisant puisque, à ce rythme, nous n’atteindrons pas les objectifs. Je ne sous-estime pas vos difficultés mais on voit bien que les résultats sont très variables d’un département à l’autre. Il est impératif que vous mobilisiez plus encore vos services. Claude Guéant [son directeur de cabinet NDR] réunira cet après-midi ceux d’entre vous dont les résultats ne sont pas suffisants ». Cf. lien 1 [3] Interview au Figaro, 11 mai 2005. Pour une citation complète cf. lien2. [4] Selon l’expression de la Cour des comptes dans un chapitre de son dernier rapport consacré à la rétention des étrangers en situation irrégulière. Nous y reviendrons. [5] Pour obtenir ce chiffre, nous additionnons la moyenne annuelle du nombre d’emplois concernés, environ 11 000 emplois, pour obtenir le nombre de postes employés de mi 2003 à mi 2007, soit 44 000. Puisqu’ environ 10 000 emplois représentent une dépense de 687 millions d’euros, alors 44 000 atteint le niveau d’environ 3 milliards d’euros. [6] Selon l’expression de France terre d’Asile. C’est d’ailleurs dans ces termes que Nicolas Sarkozy justifie lui-même l’usage du chiffre : « 28 000 reconduites exécutées, un taux d’élucidation de 33,5 %, une baisse de 1 à 2 % de la criminalité en zone police et de 2 à 5 % du nombre de tués sur la route. Cela parle à tous les Français » (intervention devant les préfets, jeudi 28 septembre 2006 : Lien 3 [7] « Immigration irrégulière : forte hausse du budget des reconduites à la frontières en 2007 », Les Echos, 28 septembre 2006. [8] Projet de loi de finances pour 2007 : Sécurité. Rapport général n° 78 (2006-2007) de M Aymeri de Montesquiou au nom de la commission des finances : Lien4. [9] Cour des comptes, Rapport public annuel 2006. La rétention des étrangers en situation irrégulière : Lien5. [10] La Cour des comptes relève que jusqu’à une période très récente, « dans plusieurs CRA, parmi les plus importants, les conditions sanitaires et d’hygiène réservées aux étrangers étaient très dégradées et constituaient parfois une véritable à la dignité humaine » (document cité, p. 416). La Cimade a par ailleurs révélé qu’un décret du 30 mai 2005 sur la rétention administrative incitait ainsi à prévoir dans les CRA des « matériels de puériculture adaptés », officialisant ainsi la possibilité d’expulser des familles. Cf. le Sixième rapport annuel de la Cimade sur la rétention administrative : . [11] Indicateur du nombre d’éloignements effectifs, Budget « sécurité 2007 ». [12] Lien : AgoraVox [13] Lien Lien 9 : article « rafle ». [14] Cf. « Expulsions : des états d’âme chez les policiers », Libération, 9 septembre 2006. [15] 24,3% exactement selon l’indicateur du « taux de remise en liberté de personnes placées en rétention administrative par le juge des libertés et de la détention (JLD) pour vice de procédure imputable aux services de police » : cf. le Rapport général Projet de loi de finances pour 2007 : Sécurité, déjà cité. [16] Source syndicale. Mots clés [cle.jpg] Police Répression Sans-papiers Autres textes de l'auteur A lire aussi... * La détention comme mode de gestion des migrations ? * Des familles à l’épreuve du test ADN * La double peine est morte. Vive la double peine ! Voir sur d'autres sites : * education sans frontieres