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La France doit-elle sortir du nucléaire ?

L'énergie nucléaire, un débat français

La centrale nucléaire de Cruas-Meysse (Ardèche).
© Photo F. Niro © Wikimedia Commons

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La catastrophe de Fukushima a porté sur la place publique un débat que Tchernobyl avait commencé de susciter : faut-il ou non continuer à inclure l’énergie nucléaire dans le mix énergétique ? La réponse à la question dépasse les aspects industriels et économiques et relève largement d'un choix politique.

Pour un abandon du nucléaire en 2033

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Meeting anti-nucléaire d'Europe Ecologie Les Verts à Montélimar pour le 1er anniversaire de Fukushima, 11 mars 2012.

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Créée en septembre 2001, l’association négaWatt s’est donné pour vocation de préparer et d’accompagner la transition énergétique de notre société. Le 29 septembre 2011, elle a rendu public un rapport de synthèse intitulé "Scénario négaWatt 2011" qui comporte dix points-clés. Ce scénario entend proposer "un avenir énergétique soutenable" fondé sur une politique de sobriété énergétique et un recours prioritaire aux énergies renouvelables. Elle expose son point de vue dans "Débat. Quel mix énergétique pour la France ?"  In Cahiers français n° 366 (La Documentation française, janvier-février 2012) : « A l’issue d’une période de transition, il serait possible de parvenir à un "système énergétique français presque totalement décarboné" tout en cessant toute production nucléaire en 2033. (…)
L’effacement progressif de la production d’électricité nucléaire au fur et à mesure de la montée en puissance des renouvelables permet d’envisager à terme un abandon complet de cette énergie qui représente en 2010 plus de 75 % de la production d’électricité française. Le scénario négaWatt applique dans cette perspective une logique très pragmatique : il s’agit, dès que le développement des alternatives par une combinaison sobriété-efficacité-renouvelables le permet, de fermer les réacteurs sans les remplacer, selon un rythme prenant en compte à la fois les enjeux de sûreté et l’évolution des besoins énergétiques. La démarche consiste donc d’abord à considérer le besoin d’électricité correspondant aux différents usages, puis la part qui peut au fil des ans être couverte par les énergies renouvelables. La différence, qui est chiffrée en besoin annuel de production en térawattheures (TWh) en tenant compte heure par heure de l’exigence d’équilibre entre l’offre et la demande, indique le niveau de production non renouvelable qu’il est nécessaire de maintenir. En croisant ce besoin avec l’état de vieillissement des réacteurs nucléaires, qui influence fortement le niveau de sûreté du parc, on peut déterminer le rythme de fermeture des réacteurs. Le vieillissement du parc est un problème délicat. Un certain nombre de réacteurs ont d’ores et déjà atteint voire dépassé une durée d’exploitation de trente ans, qui avait été jugée comme un horizon maximal raisonnable lors de leur conception. L’industrie nucléaire veut se fixer désormais un objectif de quarante ans sur lequel on ne dispose d’aucun retour d’expérience. (…)
Trois phases
Dans la première, la surcapacité du parc actuel et les réserves d’exploitation permettent de fermer rapidement les réacteurs les moins sûrs, en commençant par les plus anciens : jusqu’à 3 500 MW de capacité sont ainsi fermés chaque année. Le rythme de fermeture se stabilise ensuite à un niveau plus modéré et régulier de 2 500 MW par an environ, ce qui est essentiel pour permettre aux renouvelables de prendre le relais sans à-coups dans leur dynamique industrielle. Enfin le rythme s’accélère à nouveau dans les dernières années, où jusqu’à 4 000 MW par an sont fermés : il s’agit, même si cela peut toucher les réacteurs les plus récents avant leurs 40 ans, de gérer la fin du repli industriel. (…)
Ainsi le dernier réacteur du parc est fermé en 2033, ce qui correspond à un abandon de la production nucléaire en 22 ans. (…)
C’est pourquoi il est indispensable d’engager rapidement le processus d’abandon du nucléaire pour permettre en 15 ans un niveau suffisant de développement des alternatives avant le mur des 40 ans du parc. Au final, cette analyse multicontraintes montre surtout que la fenêtre est étroite : elle se situe entre 2030 et 2035, et se joue dans les prochaines années. » 

Scénario pour une limitation de l'énergie nucléaire en 2050

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La centrale solaire de Thémis (Pyrénées orientales) est également un centre de recherche et de développement.

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L’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (OPECST) a présenté le 15 décembre 2011 un rapport, dans le cadre de la mission sur la sécurité nucléaire engagée en mars 2011, sur "l’avenir de la filière nucléaire en France" préconisant une “trajectoire raisonnée” d’évolution du système énergétique qui combinerait l’énergie nucléaire et les énergies renouvelables. 
L'énergie nucléaire : quatre priorités stratégiques
« L’industrie nucléaire s’inscrit dans un contexte national spécifique. La production électrique d’origine nucléaire nous a en effet permis de répondre à quatre priorités stratégiques, dont l’importance est toujours d’actualité et sur lesquels un retour en arrière ne signifierait rien d’autre qu’un affaiblissement du pays.

  • La première priorité est une production électrique suffisante et adaptée, en énergie et en puissance.
  • La deuxième est l’indépendance énergétique, tant dans l’approvisionnement que dans le savoir faire. (…) Le taux d’indépendance énergétique français est proche de 50 %, grâce à la production électronucléaire. Entre 1950 et 1973, ce taux s’était effondré de 60 % à 22 % en raison du déclin de la production charbonnière nationale. (…)
  • La troisième est la préservation du développement de notre tissu économique et industriel par une énergie peu chère et de qualité. (…)L’avantage de coût de l’électricité nucléaire est illustré par l’étude récente de l’Union française d’électricité "Électricité 2030 : quel choix pour la France ?"qui montre qu’une réduction de 75 % à 20 % du parc nucléaire aboutirait à l’horizon 2030, malgré le développement des énergies renouvelables qui mobiliserait par contrecoup des centrales à flamme, à un quasi doublement du prix de l’électricité : 126 à 211 €/MWh pour les particuliers, 78 à 148 €/MWh pour les entreprises. (…)
  • La quatrième est la neutralité environnementale de notre outil de production électrique. 

Dans le contexte international de lutte contre le changement climatique, le recours à l’énergie nucléaire présente l’atout incontestable de délivrer une puissance considérable sans émettre de gaz carbonique, sauf celui résultant de l’utilisation d’énergies fossiles dans certaines phases du cycle du combustible nucléaire (extraction de l’uranium, préparation du combustible, transports). Les données fournies par l’Agence internationale de l’énergie sur les émissions de CO2 par pays montre que la France, avec 90 grammes par kWh, est globalement mieux placée que le Danemark avec 303 grammes par kWh, et surtout que l’Allemagne, qui émet 430 grammes par kWh. (…)
Vers un scénario de “trajectoire raisonnée” d’évolution du système énergétique
La période s'étendant jusqu'au milieu du XXIe siècle devrait voir ainsi se déployer progressivement, et dans des conditions de coûts de plus en plus favorables, à la fois les énergies renouvelables et les réacteurs de troisième génération. Les technologies de stockage d’énergie devraient commencer à se déployer sur la fin de la période; on peut donc imaginer qu’à l’horizon de 2050, la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité sera calée sur la capacité du système énergétique à compenser leur intermittence, partie par les moyens classiques à flamme, partie par les moyens émergents. On peut donc concevoir qu’à l’horizon 2050, pourvu que les technologies de stockage inter-saisonnier d’énergie soient effectivement disponibles, la part de production nucléaire dans l’électricité puisse être abaissée vers 50 à 60 % de la production totale actuelle. Cet abaissement s’obtiendrait par le remplacement en fin de vie des centrales nucléaires au rythme d’un réacteur sur deux, au bénéfice exclusif de la technologie de troisième génération ; on fait l’hypothèse que l’arrivée en fin de vie, qui relève de la décision de l’Autorité de sûreté nucléaire, serait prononcée en moyenne au moment de la cinquième visite décennale. (…) La "trajectoire raisonnée" ainsi proposée en prenant en considération le délai "historiquement plausible" de maturation industrielle des solutions technologiques dans le secteur de l’énergie, ramènerait ainsi l’énergie nucléaire à une part de 50 à 60 % de la production totale actuelle vers 2050, et de l’ordre de 30 % vers 2100. » 

Pour le maintien du nucléaire et la prolongation de la durée de vie des centrales 

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La fermeture de Fessenheim (Alsace), la plus ancienne centrale nucléaire française en exploitation, est réclamée par de nombreuses personnes en France, en Allemagne et en Suisse.

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Remis le 13 février 2012 au ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique, le rapport "Energie 2050", piloté par Jacques Percebois et Claude Mandil, expose les différentes options de politique énergétique pour la France à l’horizon 2050. Il écarte toute fermeture ou réduction du parc nucléaire et préconise de prolonger la durée de vie des centrales nucléaires existantes au-delà de 40 ans.
« Quatre grands scénarios sont à l’étude : l’accélération du passage à la 3ème voire la 4ème génération de réacteurs, la réduction progressive du nucléaire, la sortie complète du nucléaire, la prolongation de la durée d’exploitation du parc nucléaire actuel. (…)
Il ressort de l’analyse des 4 scénarios que la limitation de la durée d’exploitation à 40 ans affecterait tout ou partie des piliers de la politique énergétique française : la sécurité d’approvisionnement, la préservation de l’environnement (notamment vis-à-vis du changement climatique) et la compétitivité économique.Les prix relatifs des énergies ou les montants d’investissements sont des paramètres difficiles à prévoir. Malgré les limites de cet exercice, la Commission "Energies 2050" propose des estimations. Elles indiquent, quel que soit le jeu d’hypothèses utilisé, le coût moyen d’un MWh électrique à l’horizon 2030 est le moins élevé dans le cas d’une prolongation du parc nucléaire. Le non-prolongement de réacteurs potentiellement capables de produire 10 ou 20 ans de plus induit une perte de valeur, accentuée par le remplacement par des équipements dont le fonctionnement serait dans tous les cas plus onéreux. L’ordre de grandeur économique de cette perte de valeur serait d’une centaine de milliards d’euros voire plus. (…)
Il en ressort que la trajectoire optimale pour notre pays consiste à prolonger la durée de vie des centrales existantes aussi longtemps que l’autorité de sûreté nucléaire le permettra, à prévoir un petit nombre d’EPR pour lisser la production au moment de la fermeture des centrales les plus anciennes, et à préparer l’avenir en poursuivant, au côté du développement des énergies renouvelables, le développement de la génération 4, tout en laissant ouverte la question de la part du nucléaire en 2050 et même en 2030. Celle-ci dépendra en effet de plusieurs facteurs : réussite des politiques de maîtrise de la demande, baisse des coûts des énergies renouvelables, percées technologiques, retour d’expérience sur le fonctionnement des EPR français et étrangers, prix du gaz naturel. »

La position de partis politiques français sur le nucléaire

UMP

  • Confirmation du choix du nucléaire
  • Engagement à passer à 23 % d’énergies renouvelables en 2020

Parti socialiste

  • Réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité de 75 % à 50 % à l’horizon 2025
  • Fermeture de la centrale de Fessenheim
  • Achèvement de l'EPR (réacteur à eau pressurisée) de Flamanville

Europe Écologie Les Verts

  • Part du nucléaire réduite à 40 % à l’horizon 2020 
  • Sortie du nucléaire à l’horizon 2031

Mis à jour le 12/04/2012

 

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