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houlala !

Rapprocher. le CSA et l’Arcep c’est aborder la question de la régulation d’Internet. Insoluble et dangereux.

Libération

Tentez l’expérience : dites «CSA», dites «Arcep» et dites «fusion». Soit on vous regarde comme si vous étiez fou, et on n’a pas vraiment tort. Soit ceux à qui vous parlez sont au courant, et c’est alors à un concert de «Houlala», de «C’est compliqué», le tout sur fond de grattage de tête. Fin août, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a demandé «des propositions de rapprochement entre le CSA et l’Arcep» à Arnaud Montebourg, Aurélie Filippetti (ministre de la Culture et de la Communication) et Fleur Pellerin (ministre des PME, de l’Innovation et de l’Economie numérique). «La convergence», c’est ainsi que, dans sa lettre, Ayrault justifie sa demande : «Il est aujourd’hui essentiel de s’interroger sur l’efficacité des modes de régulation des communications électroniques et de l’audiovisuel, à l’heure où les contenus audiovisuels sont de plus en plus diffusés par l’Internet fixe et mobile.»

 

Pourquoi le rapprochement ?

Il est vrai que le temps où le CSA surveillait tranquillement le contenu de ses six chaînes hertziennes en train de mijoter est bien révolu. D’un autre côté, la régulation des tuyaux made in Arcep est surtout technique et dépend en grande partie du cadre communautaire. La fonction des deux instances est donc fondamentalement différente, à l’une les contenus, à l’autre les tuyaux. Mais Internet brouille les territoires : avec la télé connectée qui permet de recevoir non seulement les chaînes actuelles, mais aussi tout le Web sur son écran, le rapprochement du CSA et de l’Arcep peut sembler cohérent. «La vraie question derrière ce rapprochement, c’est la régulation d’Internet, indique Francis Beck, ancien conseiller du CSA, et la crainte, c’est qu’on importe tous les modes de surveillance du CSA sur Internet.» Ainsi, le CSA se mettrait à sanctionner YouTube au moindre débordement comme il le fait avec M6… Ainsi, le CSA imposerait des obligations d’investissements dans la création à YouTube comme il le fait avec TF1… Dangereux, a déjà prévenu l’association la Quadrature du Net : «Réduire Internet à un service audiovisuel pour y imposer une régulation administrative ouvrirait la porte à la censure.» Patrick Bloche, président (PS) de la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale, ne dit pas autre chose : «Mon souci, c’est que ce rapprochement ne soit pas un élément de régulation de l’Internet, et qu’on garde un Internet libre et non marchand.»

Face à ces conjectures, Giuseppe de Martino, secrétaire général de DailyMotion et président de l’Association des services Internet (Google, Facebook, Microsoft, Skype, Deezer…) se retranche derrière son statut d’hébergeur : «Nous ne produisons pas de contenus, nous nous contentons de les faire circuler sur Internet, et l’Internet n’étant pas une ressource rare, notre activité n’est pas dans le champ de la régulation.» D’autant que, sans même considérer l’absurdité de la masse de boulot face à tout le contenu du Web, ce nouveau gendarme ne pourrait asseoir son autorité que sur des sites français. Et De Martino de prévenir : «C’est facile de transporter les serveurs de l’autre côté de la frontière. Notre activité est internationale…»

Quel rapprochement ?

Plusieurs scénarios se dessinent déjà. Celui d’un rapprochement soft, où deux collèges distincts, l’un pour le CSA, l’autre pour l’Arcep, seraient invités à conjuguer leurs compétences sur les sujets transversaux, et une fusion pure et dure des deux autorités. On peut même imaginer qu’Hadopi, le gendarme qui traque les œuvres piratées, et l’ANFR, l’agence des fréquences qui veille au bon usage des ondes (hertziennes, militaires et téléphonie mobile), rejoignent le couple CSA-Arcep.

La Grande-Bretagne, citée par certains en exemple, a fait ce choix radical avec l’Ofcom, déléguant à ce super-gendarme, les infractions à la concurrence pour l’ensemble du secteur. Une option très libérale qui laisse de côté presque totalement la régulation des contenus. L’UFC-Que choisir tempête contre une telle éventualité : «Ce serait marier la carpe et le lapin. Ils ne font absolument pas le même métier», explique son porte-parole, Edouard Barreiro.

Attendues pour fin novembre, les propositions des trois ministères mandatés par Ayrault pourraient pencher vers la version soft du rapprochement. «Il ne faut pas que les industries du numérique écrasent les enjeux de régulation, de protection des contenus et de diversité culturelle, a prévenu Aurélie Filippetti la semaine dernière dans le Monde. En tout état de cause, dans certains domaines comme le futur processus de nomination des présidents de l’audiovisuel public, il faudra un collège spécifique. L’une des pistes explorées serait deux collèges ad hoc et une instance de coordination.»

Plus globalement, on se demande comment ce rapprochement CSA/Arcep va s’inscrire dans les deux gigantesques chantiers ouverts par le gouvernement dans le secteur : la modification de la loi sur l’audiovisuel prévue au premier semestre 2013 (pour revoir non seulement le mode de nomination des présidents de l’audiovisuel public, mais aussi repenser le CSA) ainsi que la mission Lescure chargée de mettre l’exception culturelle au diapason numérique. Ironie : pendant la campagne présidentielle, un groupe de travail de l’équipe Hollande, composé entre autres de Patrick Bloche, Aurélie Filipetti et Francis Beck, avait pris la sage décision d’écarter la question du rapprochement du CSA et de l’Arcep. Trop épineux.

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lundi 17 septembre 2012

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