Leurs revendications? L'instauration de la « règle de proximité » dans la langue française. Fini l'emprise du masculin sur le féminin. Ainsi, l'adjectif s'accorde avec le dernier nom auquel il se rapporte. Concrètement, on ne dirait plus « les hommes et les femmes sont beaux », mais « les hommes et les femmes sont belles ». Une règle qui existait jusqu'au XVIIIe siècle, époque où des grammairiens ont décidé que le genre masculin étant « plus noble que le féminin », il n'y avait plus aucune raison qu'il ne l'emporte pas, quel que soit le nombre de ses représentants.
Munis de gants à récurer rose fluo, les militants sont restés une minute immobiles pour faire entendre leur cause. Puis, accompagnés d'une musique latino, des femmes de tout âge ont mimé des coups de balai pour nettoyer la société « des idées reçues ». « Ce n'est pas les académiciens qui font la langue française, ce sont les gens qui la parlent », a rappelé la journaliste Isabelle Alonso, encourageant le public à utiliser la règle de proximité même si elle n'est pas officiellement reconnue par l'Académie française.
La chroniqueuse était venue parler de son nouveau livre « Roman à l'eau de bleu », qui sortira le mois prochain. Une œuvre qui raconte l'histoire de deux jeunes hommes vivant dans une société où les femmes occupent le pouvoir depuis toujours et qui luttent contre cette domination féminine. Un livre dans lequel justement, en grammaire, le genre féminin l'emporte sur le masculin. « La grammaire a un message idéologique très clair. Les femmes sont considérées comme des citoyens de seconde zone. En employant des expressions comme elle fait beau au lieu d'il fait beau, j'ai voulu montrer que cette règle était insensée », explique la romancière. La manifestation a attiré quelques badauds, surtout des jeunes femmes.
« L'emploi du masculin est ancré dans nos esprits. Moi-même, je l'utilise sans m'en rendre compte. Le remettre en question, c'est soulever pleins d'autres problèmes d'inégalité qui gangrènent encore notre société comme l'inégalité salariale », note Elisabeth, une étudiante de 21 ans. Nicolas, lui, prône tout simplement la suppression des genres. « Mais ça serait difficile à mettre en place », concède ce sexagénaire. Du haut de sa trottinette, Hector a suivi la manifestation avec amusement. « C'est vrai que ce n'est pas logique que le masculin l'emporte sur le féminin. Même si avec les copains on s'est bien moqués des filles en leur disant Ce sont les garçons qui gagnent », sourit ce jeune homme de 11 ans.