Pour Pape Diouf, président de l’OM de 2005 à 2009, « Marseille a besoin d’une nouvelle impulsion ».
Un collectif associatif, le Sursaut, rêve de vous voir conduire une liste aux municipales. Ça vous tente ?
PAPE DIOUF. Je n’ai pas pris de décision, même si les positions défendues par ce collectif rejoignent bien souvent les miennes.
Vous êtes très courtisé…
Le terme « courtisé » me gêne. J’ai eu des contacts avec tous les candidats de gauche. Mais je souhaiterais vivement que l’on ne s’approche de moi que parce que j’incarne une certaine manière de voir Marseille. Les quartiers Nord sont un no man’s land, regroupant des habitants qu’on a volontairement mis à l’écart, et depuis longtemps, parce que ça arrangeait tout le monde. Les règlements de compte qu’on déplore aujourd’hui ont toujours existé. Simplement, avant, ça se faisait à l’arme blanche et personne ne voulait les voir. Aujourd’hui, ça fait beaucoup plus de bruits parce que ça se règle à la kalachnikov.
Patrick Mennucci est-il un bon candidat pour Marseille ?
Je connais Patrick depuis trente ans au moins. C’est quelqu’un dont la candidature est légitime au vu des résultats de la primaire. Maintenant, il a contre lui le fait d’être un homme d’appareil. Et quand on est un homme d’appareil, on peut être phagocyté par une idéologie ou entravé par la ligne du parti… Autant de contraintes dont, moi, je veux m’exonérer. A Marseille, il y a une sorte de ras-le-bol général. Les gens en ont marre du conservatisme qui a prévalu jusqu’à présent. Ils veulent un changement. Est-ce que Patrick l’incarne ? Je ne sais pas.
Quel regard portez-vous sur le bilan de Jean-Claude Gaudin ?
En dépit de la courtoisie qui gouverne nos relations, je dirais que Jean-Claude Gaudin incarne une forme de conservatisme. Après trois mandats, il n’a pas transformé la ville en profondeur, comme elle en aurait eu besoin. Ce n’est donc pas par hasard si aujourd’hui s’exprime un besoin de renouvellement. Tout son bilan n’est pas négatif, mais Marseille a besoin d’une nouvelle impulsion.
La montée du FN vous inquiète ?
Je la relativise. J’ai été le seul président noir d’un grand club européen et, pour Marseille, d’une des institutions les plus prisées de la ville. Quand je me promène, je suis toujours l’objet d’une sympathie et d’une amitié de la part des gens. Or, parmi eux, il y a probablement des électeurs du FN. Ça prouve bien que ces gens-là ne font pas preuve d’un racisme organique, mais expriment leur ras-le-bol par ce vote contestataire, pour faire la nique aux partis traditionnels. Ce qui m’inquiète, c’est de voir que les extrémismes montent en flèche avec la bénédiction implicite de certains politiques de droite et même de gauche.
Marseille est-elle une ville de droite ou de gauche ?
Ni l’une, ni l’autre. C’est une ville à part, cosmopolite, capable de cohésion sociale et ethnique comme on le voit au Stade-Vélodrome. L’ouvrier y côtoie le patron. L’Arabe, le Noir et le Blanc y cohabitent paisiblement. Marseille a toujours su rassembler et accueillir. C’est la porte de la Méditerranée. Elle n’est pas du tout cette ville restrictive dont on parle. Elle mérite simplement d’être reprise en main. Il faut la restaurer moralement et la rééquilibrer socialement.
Quand prendrez-vous votre décision ?
Je ne me fixe pas de délai. Je n’ai été demandeur de rien. Des gens m’ont approché et souhaitent que je m’implique davantage. Cela m’amène à réfléchir car je vois bien que certains assimileront cette implication à une entrée en politique, alors que mon engagement est avant tout citoyen. Je mettrai le morceau de notoriété que j’ai au service de la femme ou de l’homme qui me paraît répondre le mieux à mes préoccupations.
Cela veut dire que vous ne serez pas tête de liste ?
Non, ça ne veut pas dire ça. Est-ce que j’irai moi-même ou pas ? Les circonstances décideront de la meilleure place à laquelle je pourrai apporter mon concours à ce besoin de changement.