* Ecrits Ecrits * Demos Demos * Outils Outils * Blog Blog Retour Discours politique François Fillon, François Fillon présente ses voeux à la presse pour 2010 (15/01/2010) Mesdames et messieurs, Madame la Présidente, En ce début d’année, je suis naturellement heureux de vous accueillir à Matignon, mais mon regard, comme le vôtre, est tourné vers Port-au-Prince, si cruellement et si dramatiquement dévasté. Une ville a sombré et le bilan semble terrible sur le plan humain. Les premiers témoignages et informations qui nous parviennent indiquent un chaos indescriptible et pour tout dire sidérant d’horreur. Ce désastre brutal frappe de plein fouet un peuple démuni, un peuple attachant, un peuple sur lequel le destin semble s’acharner. Je veux vous dire que la France est au côté du peuple haïtien, lui qui a subi tellement d’épreuves et avec lequel nous entretenons une si vieille amitié. Nous mobilisons tous nos moyens pour tenter de sauver ce qui peut l’être. Sitôt la nouvelle connue, une cellule de crise a été mise en oeuvre au Ministère des Affaires étrangères. Dès hier, trois avions des forces armées aux Antilles ont acheminé 40 gendarmes et agents de Sécurité civile et 3 tonnes de fret à Port-au-Prince. Ils ont pu évacuer 71 ressortissants français. Aujourd'hui, en milieu de journée, un nouvel avion quittera Pointe-À-Pitre pour Port-au-Prince avec 80 personnes et 5 tonnes de fret. Plusieurs détachements en provenance de Brignoles, comme de la région parisienne, comportant des gendarmes et des médecins sont sur le point de partir pour Haïti. Je veux également rendre hommage à la réactivité et à la mobilisation dont font preuve l'ensemble des organisations non gouvernementales françaises ainsi que la communauté haïtienne de Paris. Cet après-midi, je participerai, au côté du président de la République, à une réunion qui permettra au Gouvernement d'amplifier l'effort à la fois de sauvetage, de court terme, et en même temps, de commencer à dessiner les conditions d'un soutien à la reconstruction d'Haïti. Mesdames et messieurs, La transition est difficile, mais je veux vous dire que, depuis 2007, j’ai le plaisir de vous adresser mes vœux et ce n’est pas sans réconfort que je reçois les vôtres, par l’intermédiaire de votre présidente, Chantal Didier, à qui je disais à l'instant, "lorraine et républicaine". C'était par ces mots que j'avais presque envie de commencer l'hommage à Philippe Séguin ; c'était les mots qui avaient été employés pour l'hommage à Poincaré et c'était peut-être aussi des mots qu'on aurait pu employer pour Jules Ferry. Votre présidente qui, une fois encore, a su trouver les mots qui réchauffent le cœur et qui aiguisent les esprits. Tous mes prédécesseurs n’ont pas eu le même privilège. Certains d’entre-vous éprouvent peut-être quelques regrets devant cette longévité politique qui n’encourage pas les scénarios inédits dont vous êtes tellement friands… Et ces regrets, pour l'essentiel, ils ont l’élégance de les tenir secrets, et je les en remercie. Ce matin, j’ai pris connaissance de la couverture d’un hebdomadaire qui me fait l’honneur de sa « Une », mais empoisonnée d’un titre racoleur. «Fillon: la revanche !». Mais la revanche contre qui ? À la suite de quelle défaite ? Je vois que certains ont toujours le goût du roman… Depuis 2007, je travaille sous l’autorité du Président de la République, dans des conditions de complicité et de complémentarité. Sa droiture et sa franchise sont des atouts pour agir. Il sait qu’il peut compter sur ma loyauté. Ma mission durera ce qu’elle devra durer… Et parodiant Raymond Barre, je dirais que «Quand le moment sera venu, l'heure sera arrivée". Vous avez évoqué, chère Chantal, le SMS que j’ai envoyé en direct à l’un de vos confrères en pleine émission. Il m’arrive en effet d’être spontané. Il faut dire que l’erreur m’est apparue flagrante, et que le journaliste est Souletin, comme la moitié de moi-même. Souletin, pour tous ceux qui ne savent pas ce que cela veut dire, cela veut dire "habitant de la vallée de la Soule" au cœur du Pays basque. Je ne pouvais donc pas laisser passer. Il a d'ailleurs reconnu son impair avec beaucoup d’élégance. Etre aussi précis que possible. Voilà me semble-t-il un joli programme pour 2010… Votre métier est noble et difficile. Vous agissez dans un secteur qui a besoin de se moderniser et dont la santé financière est extrêmement précaire. Le Gouvernement a tenu l'engagement pris par le Président de la République lors des Etats généraux de la presse. Notamment pour les investissements publicitaires de l’Etat dans la presse écrite, qui se rapprochent de ceux de la télévision pour la première fois depuis cinq ans. Aujourd’hui, c’est la distribution de la presse, et particulièrement des quotidiens, qui est soumise à de très lourds défis. Les NMPP, devenues Presstalis, sont au cœur de toutes les attentions. J’ai décidé ce matin de marquer la volonté des pouvoirs publics d’aider cette réforme nécessaire de la distribution, en confiant à Bruno Mettling une mission spécifique sur cette question. Vous l’avez dit, Chantal, les journalistes jouent un rôle dans la démocratie et sans presse, il n’y a pas de démocratie. Mais pour vous comme pour les acteurs politiques, et d’ailleurs comme pour tous les citoyens, la démocratie a son corollaire : c’est la responsabilité. La responsabilité du politique, les électeurs sont amenés à la juger à intervalle régulier par leur bulletin de vote. Pour vous, la responsabilité est de chercher à dire la vérité, de ne pas vous laisser manipuler par le tourbillon des racontars. "Informer bien au lieu d'informer vite », disait déjà Albert Camus. Bien avant qu’on ait inventé Internet, il s’inquiétait de la perte de sens que faisait subir au métier de journaliste la recherche de la rapidité à tout crin. Aujourd’hui même, je lis dans des livres ou des journaux, des propos qui me sont attribués et que je n’ai pas prononcés. On me fait prédire l’avenir, à commencer par le mien et on me prête des intentions qui ne m’ont jamais traversé l’esprit. Et, malheureusement, dans ces cas-là, il ne suffira pas d’un SMS pour rétablir la vérité. Mais je veux vous rassurer, je n’attache pas une importance démesurée à tout cela, mais je suis exigeant parce que je pense que la politique n’est pas un jeu et l’information non plus. À cet égard, je veux avoir une pensée pour tous les journalistes qui sont tombés pendant cette année 2009, et puis une pensée toute particulière pour vos deux confrères de France 3, pris en otages en Afghanistan. Leur sort est en suspens ; je veux vous confirmer que tous nos moyens sont mobilisés. Je veux aussi dire que des militaires risquent leur vie dans le but de les retrouver ; nous devons aussi avoir une pensée pour eux. Mesdames et messieurs, L’année 2009 a été riche de toutes ces contradictions qui tiraillent notre actualité. Il y a d'abord eu la grippe A. J’ai entendu et lu ceux qui pressaient le Gouvernement d’agir avec beaucoup plus de volontarisme devant l’épidémie. Et puis quelques mois plus tard, les mêmes nous reprochaient d’en avoir trop fait. Si on pouvait rapprocher dans une seule émission toutes les Unes des journaux télévisés depuis le début de l'épidémie de grippe A, je pense que ce serait assez drôle. Dans le passé, nous avons connu des crises sanitaires mal gérées dans notre pays : le sang contaminé, la canicule - et j’y prends ma part de responsabilité puisque j’étais ministre à l’époque. Je pense que nous avons tiré toutes les leçons de ces crises mal gérées. Le Gouvernement a agi de façon prudente et responsable, et je voudrais dire que c’est plutôt une bonne surprise que la pandémie soit moins violente que prévu, et tout le monde devrait s’en réjouir. Et puis il y a eu l’affaire de la taxe carbone, qui a soulevé bien des controverses. Ce serait au fond la démonstration que le Gouvernement paierait ses improvisations. Je veux dire que la mise en œuvre de ce texte sur la taxe carbone, c'est tout sauf une improvisation. Et ceux qui, au Parti socialiste, parlent d’improvisation, devraient commencer par balayer devant leur porte. Après avoir signé la Charte de Nicolas Hulot, qui était un engagement de mettre en œuvre la taxe carbone, voté le Grenelle de l’environnement, dans lequel un article prévoyait la taxe carbone, ils ont dénoncé notre projet, puis - et ceci a échappé, dans l'ensemble, à la sagacité des commentateurs – ils ont totalement négligé de soulever le sujet dans leur saisine du Conseil constitutionnel. C’était un engagement de la campagne présidentielle. Nicolas Sarkozy l’a respecté. Il y a eu la mission Rocard, dont nous avons suivi d'ailleurs pratiquement toutes les recommandations. Le Conseil d’Etat a validé le texte. Il appartient maintenant au Gouvernement et au Parlement de tirer les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel. Comme je l'avais indiqué immédiatement, le 20 janvier prochain, Jean-Louis Borloo présentera les principes du complément de la réforme, puisqu'il n'y aura pas de remise en cause du principe de la taxe carbone. Il n'y aura pas de remise en cause des dispositions pour les ménages, qui resteront exactement celles qui ont été votées par le Parlement, ni pour les professions les plus exposées. Pour les entreprises les plus émettrices de CO2, qui sont celles au fond qui sont visées par la décision du Conseil constitutionnel, nous taxerons, dans des conditions qui ne les pénaliseront pas dans la concurrence internationale, ces entreprises, avec un mécanisme de compensation. Plusieurs pistes existent sur lesquelles nous travaillons ; il peut y avoir un crédit d'impôt, il peut y avoir un allègement de charges sociales, et le fait qu'il y ait plusieurs pistes examinées justifient qu'un dialogue nourri s'engage avec les industriels concernés, mais aussi avec les partenaires sociaux qui peuvent être concernés, et que nous prenions le temps d'une décision qui devra s'appliquer au 1 er juillet 2010. Il y a eu aussi le débat sur l’identité nationale. Débat légitime, débat passionnant et dont j’estime qu’il devrait être continu parce que la volonté d’être français ne doit pas se célébrer seulement une fois par an, le 14 juillet. Et ceux qui ont vu dans ce débat une tactique électoraliste ont eu tort, parce que ce débat se poursuivra au-delà des élections régionales. Dans le cadre de ce débat, le Parti socialiste a ressuscité, une nouvelle fois, l’idée du vote des étrangers aux élections locales. Au-delà même du fond du sujet sur lequel je vais revenir, je vais dire que pour des responsables politiques, le fait que, pendant vingt ans, à chaque consultation électorale, de promettre la même chose sans jamais le réaliser, c'est une des sources profondes du divorce entre les Français et les responsables politiques. C'est une des sources profondes de la crise de confiance que, Chantal, vous évoquiez tout à l'heure. Pour des gens qui n’ont d'ailleurs pas cessé de nous suspecter de lier la question de l’identité de la France à celle de l’immigration, cette proposition est étrange... Je veux vous dire que j’y suis totalement défavorable, parce que j’estime que le droit de vote est fondamentalement lié à la citoyenneté. Si nous sommes un pays d’intégration, ce n’est pas pour offrir aux étrangers des demi droits électoraux, mais c'est pour les inviter à acquérir, s’ils le souhaitent, les droits entiers qu'entraîne l'appartenance à notre communauté nationale. Comme l’a rappelé le Président de la République, cette proposition ne figurait pas dans son projet et elle ne sera donc pas retenue. Eh puis, il a y eu la crise financière et économique qui a dominé l’année 2009. Là encore, j’ai entendu et lu ceux qui estimaient que notre plan de relance était insuffisant, voire même, s'agissant de Martine Aubry, qu'il n'y avait pas de plan de relace du tout. Quelques mois plus tard, les mêmes nous reprochaient l’emprunt sur les grands investissements d’avenir. Comprenne qui pourra ! Mais j'ai envie de dire : qu’importe, les faits sont là ! La France a mieux tenu le choc de la crise que la plupart de ses partenaires européens et elle est sortie la première de la récession. C’est le résultat des mesures rapides et ciblées que nous avions prises ; dans la réaction à cette crise financière, la France a souvent été au tout premier rang, avec la Grande-Bretagne sur plusieurs sujets, les autres pays européens, suivant d'ailleurs souvent avec quelques semaines d'hésitation et de retard. Je pense à la prime à la casse ; je pense au plan de relance lui-même. En disant cela, je ne cède pas à l’autosatisfaction, j’énonce simplement des faits, et je veux rappeler à chacun d'entre vous combien vous étiez pressant en 2007, en 2008, pour me dire : "mais alors, on est en récession ?". Et je vous disais "non, on n'est pas en récession", parce qu'on n'était pas en récession. Et puis ensuite, on est entré en récession. Et là, on est sorti de la récession. Et donc tout cela, ce sont des faits, des faits qui doivent être précis et qui doivent appeler de notre part les analyses qui conviennent. Nous avons lutté contre la crise tout en poursuivant les réformes. Le pays n’a pas cédé à la panique, il n'a pas cédé au conservatisme non plus. Et je veux ajouter que nous avons agi dans un climat social extrêmement responsable. Avec les syndicats, nous avons certes des désaccords, mais il y a entre eux et nous, un dialogue permanent comme j’en ai rarement connu. Qu’un gouvernement de droite, en pleine récession, puisse ainsi tenir le fil du dialogue avec les partenaires sociaux, c’est le signe que notre politique est équilibrée, mais je pense que cela révèle aussi le changement culturel qui est à l’œuvre dans notre pays. Avec le Président de la République, nous allons continuer de miser sur ce dialogue. L’agenda des partenaires sociaux est rempli : sur l’emploi, sur la violence au travail, sur la modernisation du dialogue social dans les entreprises de moins de 10 salariés, sur l’avenir du paritarisme et sur la représentation du personnel dans les entreprises. Je veux dire ce matin combien je suis attaché à la réforme de la représentativité que nous avons menée à bien en 2008. Il nous reste maintenant à la parachever en mesurant l’audience syndicale dans toutes les entreprises. Je veux dire sur ce sujet qu'il n'est absolument pas acceptable que les entreprises ne fassent pas remonter les chiffres qui permettront de mesurer cette audience. Aujourd'hui, à peine 10 % des entreprises le font ; c'est une situation qui n'est pas acceptable. Nous ne l'accepterons pas et le Gouvernement prendra des initiatives, y compris des initiatives législatives, sur ce sujet, s’il n’y a pas d’accord entre les partenaires sociaux, à la fois sur la remontée des informations venant des entreprises, et évidemment sur la question qui n'est pas traitée par la loi de la représentativité dans les entreprises de moins de dix salariés. Durant l’année 2010, toute notre énergie sera tendue vers la reprise. En ce début d’année - vous l'avez évoqué tout à l'heure en parlant d'"un coin de ciel bleu" -, l’activité repart. Je vous annonce que nous allons réviser dans quelques jours à la hausse notre taux de croissance à l’occasion de la présentation de la loi de finances sur les investissements d’avenir. Je pense que nous ne serons pas loin de doubler notre dernière prévision officielle qui était de 0,75%. Est-ce qu'on est pour autant tiré d’affaire ? Je nous invite à la prudence, parce que la situation reste fragile sur le plan international. D’un côté, les Etats-Unis ne sont pas encore sortis d’affaire ; de l’autre, la question de la résorption des déséquilibres des balances des paiements, en lien avec l’ajustement des parités monétaires, est de plus en plus pesante. Cette question doit d'ailleurs être traitée dans le cadre du G20, et j'indique que nous allons prendre nos responsabilités sur ce sujet lors de la présidence française en 2011. Sur le plan national, nous voulons créer les conditions d’une reprise durable, en jouant sur trois leviers: L’investissement. Ce sont les priorités d’avenir financées par l’emprunt, 35 milliards d’euros qui vont être injectés dans notre économie, dans nos universités, dans nos laboratoires de recherche. Ils vont faciliter l’augmentation de l’investissement privé, pour arriver au total à un effort d'investissement de 60 milliards. Je veux indiquer notamment que, s'agissant de l'université et de la recherche, nous sommes en train de réaliser un effort qui est sans précédent depuis le début de l'histoire de la Vème République, puisqu'il faut ajouter à ces milliards d'euros que nous allons injecter dans l'université et dans la recherche, l'effort régulier d'augmentation d'un milliard par an du budget de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, et l'effort qui est conduit parallèlement, de 5 milliards d'euros, avec le plan Campus. Le deuxième levier, c'est la crédibilité financière de la France. Depuis 18 mois, nos déficits et notre dette ont bondi. C’était inévitable compte tenu de la nécessité de répondre à la crise, mais maintenant il est absolument nécessaire de nous replacer dans une trajectoire vertueuse. Pour ce faire, nous allons continuer de tenir strictement les dépenses de l’Etat. Je veux vous indiquer que pour 2009, ces dépenses seront finalement légèrement inférieures au plafond qui avait été voté par le Parlement - c'est assez peu courant pour qu'on le souligne. Pour 2010, nous avons par ailleurs décidé que la charge d’intérêts du programme d’investissement, que je viens d'évoquer, sera compensée intégralement par une réduction équivalente des dépenses de l’Etat, qui s'appliquera sur l'ensemble des budgets des ministères. Enfin, nous préciserons dans les prochaines semaines, notre stratégie globale de sortie de la zone des déficits excessifs d’ici 2013. Nous allons tenir fin janvier une conférence sur les déficits publics. Cette conférence permettra autour du Président de la République de rassembler le Gouvernement, les responsables des collectivités locales - parce qu'il n'est pas possible d'envisager ce sujet sans eux -, et, naturellement des organismes sociaux. Cette conférence doit permettre de faire un diagnostic, si possible, partagé, mais doit aussi et surtout préparer les mesures concrètes qui seront prises tout au long de l'année 2010. Enfin le troisième levier, c'est la compétitivité. Nous devons en permanence nous poser la question de savoir si nous avons fait assez pour la compétitivité de l'économie française dans la compétition mondiale, et naturellement, la réponse est non, mais avec la suppression de la taxe professionnelle, c'est quand même 12 milliards d'euros qui en 2010 vont venir oxygéner nos entreprises. Le temps des efforts budgétaires est donc devant nous. Mais je veux dire que celui des réformes l’est encore et toujours, et l'année 2010 va être marqué par quatre grands rendez-vous législatifs. La réforme des collectivités territoriales, qui est engagée et qui sera, je l'espère, je le souhaite, adoptée à l’été. Tous les débats et tous les procès d’intention sur une prétendue recentralisation ne nous détournerons pas de notre objectif principal, et cet objectif principal, c'est de rationaliser l’action des collectivités locales, notamment en rapprochant les départements et les régions. Durant la campagne des régionales, je n’hésiterai pas à prendre les Français à témoin sur cette réforme de la décentralisation, et j’attends de la gauche un peu plus de clarté et un peu plus de courage sur ces questions. Derrière son hostilité au conseiller territorial, je ne vois en réalité que conservatisme et réflexes féodaux. Là aussi si vous avez des archives, allez relire ce que disait la gauche il y a quelques années, des conseils généraux, de leur mode d'élection, et de la représentation d'un conservatisme qu'ils plaçaient naturellement plutôt à droite, qu'ils, selon eux, incarnaient. Et, je veux dire que la gauche ne pourra pas s'abriter derrière le débat autour de la réforme du mode de scrutin, parce que nous avons pris bien soin de mettre cette réforme à part. Et le président de la République a indiqué, je le redis aujourd'hui, que le Gouvernement est parfaitement ouvert à des amendements et à des idées différentes de celles qu'il a mise sur la table sur ce sujet. La question, ce n'est pas une question de réforme de mode de scrutin. La question, c'est une question de réforme de l'organisation de notre territoire. Voilà, cette réforme faite, nous pourrons dire que nous aurons modernisé les trois piliers de notre démocratie : la démocratie parlementaire avec la réforme constitutionnelle, qui commence à donner tous ses effets, y compris parfois des effets imprévus, la démocratie sociale avec la réforme de la représentativité, et enfin la démocratie locale. Le deuxième rendez-vous, c’est celui des retraites. Le Conseil d'orientation des retraites va nous présenter ses prévisions financières en avril. Nous connaissons tous les instruments qui sont à notre disposition : les cotisations, la durée légale d’activité, l’âge de départ à la retraite. Avec le Président de la République, nous les examinerons sans tabous et je veux dire que nous n’esquiverons pas nos responsabilités. Au regard des évolutions de notre démographie, personne ne doit s’attendre à des décisions faciles, pour assurer la pérennité de nos régimes de retraite. Nous les assumerons. Le troisième rendez-vous législatif, c’est celui de la réforme de la procédure pénale. Là encore je ne doute pas que le débat sera vif, parce que nous allons transformer une vieille tradition française, celle de la procédure inquisitoire pour aboutir à une procédure mieux équilibrée pour les justiciables. Il s'agit de faire entrer notre pays dans la modernité sur ce sujet, et de mieux défendre les libertés individuelles. J'ajoute que j'ai à cœur, dans cette réforme, que soit engagée celle des règles de la garde à vue. Au fond, notre objectif c'est de mettre en œuvre un des engagements du Président de la République dans sa campagne, lorsqu'il avait parlé d'introduire les règles d'un habeas corpus à la française dans notre droit. Enfin, le quatrième rendez-vous sera celui des finances publiques. Une loi triennale de maîtrise des comptes publics et sociaux sera finalisée au printemps et sera débattue à l'automne au Parlement. Nous aurons à recaler nos prévisions pour tenir compte du poids des déficits d’aujourd’hui. Ces déficits minent notre compétitivité et hypothèquent notre avenir. Nous n’avons donc pas le droit d’esquiver le sujet. Et ce n’est pas seulement une obligation à l’égard de nos partenaires européens. C’est en réalité une question d’indépendance nationale. Je ne veux pas que notre pays soit en difficulté comme d’autres pays. Je ne veux pas que des regards extérieurs viennent inspirer d’ici quelques années des décisions pénibles pour tous les Français. Il faut dire la vérité, il faut se retrousser les manches. La révision générale des politiques publiques est un début. Il va falloir aller plus loin, tenir la barre contre le flot des dépenses publiques et cela sans casser la croissance par des impôts supplémentaires que la France n'a pas la possibilité de mettre en œuvre compte tenu de son niveau d'imposition. Je récuse l’idée d’une rigueur aveugle, mais il faut être responsable, sous peine de voir notre modèle social et notre niveau de vie durablement compromis dans un monde où tout est perdu pour les nations faibles. Cet effort, nous allons devoir l’engager dans la cohésion et dans la justice sociale. Le redressement de la situation de nos comptes exige la solidarité nationale. Enfin, Mesdames et messieurs, je ne peux pas esquiver le débat parlementaire que nous aurons sur le voile intégral. En tant que membre du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, je veux rappeler que j'ai été l’un des rares, sinon le seul, à me prononcer dès le départ pour une loi interdisant le port du voile à l’école. Le combat pour la laïcité, pour la protection des jeunes filles, pour l’égalité entre les sexes, c’est mon combat ! La position du Gouvernement a été exprimée par le chef de l’Etat lors de son discours au Congrès à Versailles, et répétée et précisée hier devant les parlementaires : "la burqa n’est pas la bienvenue sur le territoire de la République française", a déclaré le Président de la République devant le Congrès. Ce n’est pas ensuite pour s'arrêter là, naturellement. Ce n'est pas une question de religion, parce que l’immense majorité des musulmans ne peut pas accepter que l’islam soit ainsi caricaturé. C’est une question de dignité. C'est une question de dignité de la femme, c'est une question de dignité parce que dans notre République, chacun doit pouvoir se regarder dans les yeux, sans se masquer et sans se défier. Il faut naturellement agir sans précipitation ; il faut agir dans le dialogue et dans le respect de chacun, mais il faut agir ! Le gouvernement souhaite pouvoir dégager un consensus aussi large que possible au Parlement, et je veux redire une nouvelle fois que ce n’est ni une affaire de droite, ni une affaire de gauche, mais c'est une affaire républicaine. La mission parlementaire doit aller au terme de ses travaux. Et au terme des travaux de cette mission, et au regard de ses conclusions, il faudra une résolution, une résolution suffisamment ferme pour fixer les principes. Je souhaite que cette résolution puisse réunir le maximum de suffrages de tous les républicains. Mais il faudra aussi derrière la résolution, sinon elle n'aurait pas de sens, des textes législatifs et des textes réglementaires pour l'appliquer. Sur le contenu de la loi, il y a, vous le savez, un débat sur son périmètre, sur les sanctions, sur la compatibilité avec la Constitution et avec la jurisprudence européenne… Nous avons choisi, avec le Président de la République, de faire en sorte que ce débat, soit tranché après les élections régionales pour qu'il ne soit pas pris en otage par les enjeux électoraux. Voilà, mesdames et messieurs, quelques réflexions que je voulais partager avec vous. Je crois que personne ne peut nier que, depuis 2007, la France a changé. Avec le Président de la République, nous avons essayé d'agir tous azimuts ; nous sommes allés vite pour éviter les blocages. Je pense que, peu à peu, le puzzle d’ensemble se dessine, et il révèle une France, que je crois plus moderne et plus volontariste. La France de 2012 sera celle qui verra notre démocratie politique et sociale rénovée. Elle verra ses universités plus entreprenantes. Elle sera entrée dans la mutation du développement durable. Elle sera réconciliée avec l’aventure européenne. Et elle aura vaincu le syndrome de la peur des réformes. Notre pays, que l’on dit parfois immobile et déprimé, est en mouvement. Qui aurait dit au moment de l’élection de Nicolas Sarkozy que nous aurions à traverser la plus forte crise que le monde ait connue depuis 1929 ? Personne. Cette crise, elle a évidemment télescopé la politique des réformes. Elle aurait pu l’interrompre, elle aurait pu la casser. Elle aurait pu nous obliger à arrêter en attendant des jours meilleurs. Eh bien, nous avons fait le contraire. Nous avons choisi de soutenir nos banques en danger ; nous avons choisi d'organiser la relance ; nous avons chois d’engager l'avenir avec le grand emprunt. Nous connaissons mieux que quiconque nos talons d’Achille: c'est la situation de l’emploi, c'est l’endettement de notre pays, et puis c'est notre goût de la dispute et du découragement…! Nous avons refusé d’attendre des jours meilleurs. Nous avons fait le choix de l’action et le choix des réformes comme contrepoison, au fond, aux risques de la crise. Bon, tout ce que nous entreprenons n’est pas nécessairement parfait et je suis parfaitement lucide. Mais sur le fond, j’ai la conviction que nous sommes sur la bonne voie. Tout mon engagement au côté du Président de la République et toute ma détermination sont tendus vers la modernisation et vers le redressement de la France. Au regard de la rapidité et de la brutalité de la mondialisation, j’ai l’obsession des réformes et j'ai surtout la hantise du temps qui se consume. Je pense que tous ceux qui m'ont accompagné lors de mon récent déplacement en Chine, ont ressenti comme moi, ce que nous savons tous par ailleurs, l’immense énergie économique de l’Asie qui est en train de s’amplifier. Ce n'est pas seulement l'usine du monde, c'est en train de devenir l'université du monde, c'est en train de devenir le laboratoire du monde. Eh bien, pour la France, pour l’Europe, le combat ne fait que commencer. Et, ou nous renonçons à ce combat, faute de courage, et alors notre déclin est inéluctable, ou alors nous nous battons de toutes nos forces, par nos réformes, par notre innovation, par notre unité nationale par notre solidarité européenne, et alors nous pourrons tenir notre rang. Dans cette épreuve, il faut une mobilisation nationale. Une mobilisation de nos forces économiques, mais aussi de nos forces sociales, qui doivent comprendre que leur défi est commun. Mobilisation des citoyens qui doivent mesurer qu’il faut donner à la France autant que ce que la France leur donne. Si chacun en effet se replie sur son pré carré, si chacun croit pouvoir sauver ses acquis sans efforts, si chacun croit pouvoir mener solitairement sa course au profit sans partage, alors, je vous le dit, notre prospérité économique et notre modèle social sont condamnés à moyen terme. L'esprit républicain n'a jamais été aussi évident ; il n'a jamais été aussi légitime. Je crois à la vérité qui insuffle l'effort national ; je crois à la cohérence politique ; je crois à la durée et à la rigueur dans l'action. Certains jugeront sans doute cet exercice du pouvoir trop classique. Je l'assume, en vous demandant de ne pas interpréter ma réserve et ma gravité pour une indifférence à votre égard. Et c'est avec une réelle amitié que je vous souhaite une bonne et une chaleureuse année 2010. Que cette année comble tous vos espoirs personnels et qu'elle réponde, c'est mon souhait, à vos plus belles passions professionnelles. Haut de page