Ce qui m’a le plus fâché, ce n’est pas qu’un jeune conservateur s’inquiète de voir nos repères traditionnels s’estomper. C’est son droit, et c’est tout aussi attendu. Ce qui m’agace, plutôt, c’est l’habileté avec laquelle Mathieu Bock-Côté, tout en naviguant dans les limites raisonnables des paramètres propres à la rectitude politique québécoise, conduit tranquillement le discours vers une légitimation d’une certaine colère hétéro envers des demandes de parents homosexuels qui seraient exagérées. On vous tolère, mais surtout, n’ambitionnez pas. Mathieu Bock-Côté sait pertinemment qu’en 2013, le mariage homosexuel est un concept accepté qu’il serait malvenu de remettre en question. Pourtant, sa critique de la «théorie du genre» (pour ceux qui sont peu familiers avec l’affaire, je vous suggère la lecture de ceci, ou cette version plus ludique) est la même que celle qui était employée à grands renforts cet été dans les Manifs pour tous en France, ces manifs qui visaient à contrer le projet de loi autorisant le mariage pour tous. Évidemment, les manifestants n’étaient pas homophobes, ils n’avaient rien contre les homosexuels, seulement, leur slogan, parfois accompagné d’une danse, était «Un papa, une maman». Je ne crois pas que Mathieu Bock-Côté soit homophobe. C’est un gentil garçon bien de son temps. Sa chronique, clairement, ne l’est pas. On pourrait même croire qu’elle se veut constructive, puisqu’il la termine avec ce conseil bienveillant envers la communauté LGBT : «l’abolition de la référence au père et à la mère ne devrait pas entrer dans le programme de la lutte à l’homophobie».