Conférence de presse de M. le président de la République au Conseil européen

LE PRESIDENT : Bonsoir, cette première session du Conseil européen vient de s’achever et elle a porté sur les points essentiels de l’ordre du jour. Le Conseil avait néanmoins été précédé par la conclusion de deux accords importants. Celui sur l’union bancaire qui va permettre la recapitalisation directe des banques et également la directive sur la résolution qui prépare le mécanisme unique pour résoudre les éventuelles crises que peuvent connaître les banques.

 

Cet accord est important parce qu’il permettra de prendre tous les textes dans l’année 2013 et d’avoir une application du mécanisme pour 2014. Il permet aussi de faire bien comprendre que les contribuables n’auront pas à participer au renflouement des banques dès lors que cette surveillance et cette résolution pourront intervenir.

 

Deuxième accord qui a été passé, très important aussi, c’est celui entre le Parlement européen, représenté par son Président, la Commission européenne, représentée par son Président, et le Premier ministre irlandais qui représentait le Conseil européen. Cet accord qui ne préjuge pas encore de la décision définitive du Parlement permettra d’avoir une flexibilité presque optimale des crédits de paiement, ce qui était une demande forte du Parlement européen, aussi de la France et qui nous garantira que ce qui a été inscrit en paiements pour la période 2014-2020 pourra effectivement être dépensé.

 

Ce qui me permet de dire aujourd’hui que le budget européen pour la prochaine période sera en fait plus élevé que le précédent puisqu’il n’avait pas été consommé intégralement. La flexibilité assure la garantie de l’effectivité des paiements qui sont prévus.

 

Je dois aussi dire qu’il y a une autre revendication française qui a été portée par le Parlement et acceptée dans l’accord. C’est la dotation supplémentaire pour le programme d’aide alimentaire, ce que l’on appelle le PEAD, et qui aura comme conséquence d’apporter aux associations qui luttent contre la précarité et la pauvreté des moyens supplémentaires.

 

Deux accords importants avant le Conseil européen. Ce Conseil européen avait pour la France quatre intérêts.

 

Premier intérêt, c’était d’évaluer l’application du pacte de croissance qui avait été décidé l’année dernière, à notre initiative mais porté par d’autres pays et accepté par le Conseil européen en juin 2012, dont on pouvait parfois douter de la mise en œuvre effective et rapide. Le président de la Banque européenne d’investissement et le président de la Commission européenne ont donc rendu compte de la mise en œuvre de ce pacte de croissance. Je rappelle que 120 milliards d’euros avaient été dégagés pour soutenir l’activité. Les chiffres qui nous ont été communiqués montrent que ce pacte de croissance est bien appliqué. Sans doute aurais-je préféré qu’il le soit plus vite et davantage mais quand même. Les fonds structurels devaient être redéployés à hauteur de 55 milliards d’euros, 40 l’ont déjà été. La Banque européenne d’investissement devait être recapitalisée pour 10 milliards d’euros. C’est fait, ce qui lui permet de prêter à hauteur de 20 milliards d’euros par an, c’est-à-dire sur les trois prochaines années 60 milliards d’euros. Et les « project bonds », six d’entre eux ont déjà été actés et d’autres se préparent. J’ai donc demandé, et je n’ai pas été le seul, que le pacte de croissance puisse être entièrement mis en œuvre pour la fin de l’année 2013.

 

Deuxième intérêt de ce Conseil européen et c’est celui qui intéressait, si je puis dire, le plus les Français et les Européens, c’était de savoir si nous étions capables de lancer ce programme pour les jeunes, pour l’emploi des jeunes dans un délai rapide. Je rappelle qu’il y a 6 millions de jeunes Européens qui sont au chômage. Ce qui a été décidé ce soir, c’est non seulement de confirmer les 6 milliards d’euros pour la lutte contre le chômage des jeunes qui sont déjà prévus dans le cadre financier pour les sept prochaines années mais c’est de pouvoir engager et payer sur deux ans, 2014 et 2015, ce programme pour les jeunes. Ce qui veut dire que tout sera accéléré, anticipé et engagé pour que tout soit payé d’ici deux ans, 2014-2015.

 

Deuxième décision importante, il a été décidé, compte tenu de l’accord qui a été passé avec le Parlement européen, que toutes les marges de manœuvre supplémentaires qui pourront être dégagées à partir de 2015-2016 seront affectées prioritairement à la lutte contre le chômage des jeunes. Ce qui veut dire que, en réalité, nous aurons non seulement les 6 milliards mais sans doute deux à trois fois plus de crédits européens pour lutter contre le chômage des jeunes dans la période du cadre financier.

 

Troisième décision. La Banque européenne d’investissement financera les infrastructures d’enseignement supérieur mais également de centres d’apprentissage, la formation des jeunes et des prêts étudiants. La Banque européenne d’investissement, dans le cadre de son programme, a donc une priorité qui est l’emploi des jeunes. Pour illustrer, par rapport à la France, ce programme pour l’emploi des jeunes concerne les régions où le taux de chômage des jeunes est supérieur à 25% de la population active de moins de 25 ans. Cela représente pour les deux prochaines années 600 millions d’euros et 300 000 jeunes concernés dans la procédure dite de la « garantie jeunes », dont on aura à veiller à la bonne traduction en France, c’est-à-dire de permettre à un jeune, sorti depuis quatre mois d’un système de formation, ou de bénéficier d’un accompagnement supplémentaire en termes de formation ou d’un emploi ou d’un stage.

 

Troisième enjeu du Conseil européen, c’était de dégager, en plus du pacte de croissance, en plus du programme pour les jeunes, un plan d’investissement, notamment à travers une meilleure utilisation de la Banque européenne d’investissement et pour permettre à des PME d’accéder aux crédits, et notamment celles qui souffrent dans des pays où les taux d’intérêts sont élevés, d’une difficulté pour accéder à un concours bancaire. L’idée, c’est de créer un effet de levier maximal par de nouveaux instruments qui allieraient un prêt avec une garantie portée par un Etat avec les fonds structurels. Au-delà de la complexité du mécanisme, ce qu’il faut retenir, c’est que la Banque européenne d’investissement pourra prêter 50 à 100 milliards d’euros aux PME d’Europe de façon à favoriser l’emploi et l’activité. La Banque européenne d’investissement s’est également mobilisée pour favoriser quatre secteurs : la transition énergétique, les infrastructures de transports, l’éducation et la santé.

 

Quatrième intérêt de ce Conseil européen, c’était de regarder le prochain semestre et d’adopter les recommandations par pays. Ce n’est pas le sujet qui a pris le plus de temps d’ailleurs. Mais pour ce qui concerne le semestre prochain, ce qui a été affirmé par le communiqué final, c’est de lier consolidation budgétaire et croissance et de considérer que le rythme d’ajustement, sur le plan budgétaire, devait être adapté à la conjoncture. Ce qui justifie d’ailleurs que la situation de la zone euro soit régulièrement évaluée en Conseil européen. Ce sera le cas à la fin de l’année. Pour ce qui concerne les recommandations par pays, deux principes ont été posés. C’était d’ailleurs ce que la France souhaitait voir adopter. C’est que, une fois définis les objectifs, notamment de réduction du déficit structurel, les réformes elles-mêmes, les moyens pour atteindre ces objectifs devaient être laissés aux Etats.

 

Deuxième principe, que les réformes devaient se faire dans le dialogue social, ce qui suppose de ne pas préjuger, au départ, du résultat.

 

Voilà ce que je voulais dire de cette première partie du Conseil européen. Demain, nous reviendrons sur l’union économique et monétaire et sur un certain nombre de questions internationales et européennes. Mais je considère que l’étape de ce Conseil que je considérais comme essentiel, c’est-à-dire la croissance avec le pacte qui avait été adopté l’année dernière et qui doit trouver maintenant sa pleine exécution en 2013, le chômage des jeunes qui devient la priorité de l’Europe, au sens d’y mettre tous les moyens nécessaires sans limite de crédits puisqu’au-delà des 6 milliards qui seront consommés dans les deux premières années, d’autres crédits viendront compléter le dispositif, en lien avec ce que doivent faire les Etats. Ce qui d’ailleurs explique que nous aurons le 3 juillet à Berlin, à l’initiative de Mme Angela MERKEL, nous en avions convenu lors de sa venue à Paris, une évaluation de toutes les pratiques en matière d’emploi, et notamment d’emploi des jeunes de façon à ce que les dispositifs nationaux puissent être d’abord inspirés de ce qui marche dans les pays européens et, deuxièmement, puissent être complétés par ce que l’on vient de décider, au plan européen, notamment la garantie jeunes.

 

Et enfin, je souhaitais que ce Conseil européen puisse offrir une perspective à travers une stratégie d’investissement portée par la Banque européenne d’investissement. Je suis prêt à répondre à vos questions.

 

QUESTION : Le Premier ministre britannique, M. CAMERON, est arrivé tout à l’heure en remettant sur la table, si je puis dire, la question du chèque. Et apparemment, il y a une sombre histoire de calcul de la base de ce rabais. Avez-vous résolu le problème et dans quel sens, parce qu’apparemment cela pouvait empêcher un accord définitif ou une adoption définitive du cadre financier ?

 

LE PRESIDENT : Le Conseil européen a adopté le cadre financier tel que négocié avec le Parlement européen ce matin. Le rabais britannique avait été décidé dès lors de la négociation de février et son mode de calcul peut avoir quelques corrections, pour ce qui concerne la France, cela n’aura pas d’incidence. Nous avons donc adopté cette nuit le cadre financier. Il reste maintenant au Parlement européen à l’adopter. Je pense qu’il sera saisi dès le mois de juillet, au moins par une résolution.

 

QUESTION : J’ai une question sur la garantie jeunesse. Cela fait quand même près de 10-20 ans que l’on parle de l’emploi des jeunes au niveau européen. On s’est fixé plusieurs objectifs qui n’ont jamais vraiment été tenus. D’offrir un emploi, une embauche, une formation à des jeunes dans un délai de X ou Y. A chaque fois, on a repoussé ces délais. Qu’est-ce qu’il y a de nouveau à part en termes obligatoires pour les jeunes, à part les sommes mises sur la table ? Et deuxième question, si vous me le permettez, sur un tout autre sujet, sur votre ami José Manuel BARROSO, est-ce que, je pense que les discussions ont permis d’aplanir peut-être les difficultés, est-ce que vous le voyez, vous le soutenez dans un éventuel troisième mandat pour la Commission européenne ?

 

LE PRESIDENT : Alors, d’abord, l’idée de la « garantie jeunes » n’est pas nouvelle. Elle a été affichée il y a déjà une décennie mais elle était laissée à l’initiative des Etats. C'est-à-dire, c’était un objectif et il appartenait à chacun des pays membres, avec ses moyens propres, avec ses dispositifs spécifiques, de parvenir à offrir à un jeune, sortant du système scolaire ou universitaire, une solution, une formation, un stage, un emploi. Ce qui est nouveau, c’est, non pas l’objectif, ce sont les moyens qui lui sont consacrés, puisqu’il y aura ces 6 milliards d’euros consommés, c’est bien ce que nous voulons faire, dans les deux prochaines années, 2014 et 2015, et abonder encore à partir de 2016 car il est à craindre qu’il y ait encore du chômage des jeunes en 2016. Donc, c’est de mobiliser ces crédits et surtout de les mettre en cohésion ou en cohérence avec ce que chaque Etat peut faire. D’où l’évaluation des bonnes pratiques. Certains d’ailleurs ont déjà mis en place la garantie jeunes, notamment des pays d’Europe du Nord ont déjà cette procédure ou ce dispositif. En France, nous l’avons imaginé pour les jeunes les plus en difficulté et à titre expérimental. C’était une des annonces du Premier ministre dans le cadre du plan qu’il avait présenté pour lutter contre la précarité. Maintenant, avec les crédits européens, nous pourrons mettre beaucoup plus de jeunes dans cette procédure, j’ai évoqué 300 000 jeunes qui pourraient être concernés grâce aux crédits supplémentaires. Par ailleurs, la France, et je le dirai à Berlin, a inventé des mécanismes : les emplois d’avenir, les contrats de génération. En revanche, les Allemands peuvent nous donner quelques bons exemples sur l’alternance et les pays d’Europe du Nord un certain nombre de leçons tirées de l’application de la « garantie jeunes ». Donc, maintenant il y a un plan européen qui s’ajoute aux plans nationaux et une coordination pour trouver les meilleurs dispositifs.

 

Deuxième question que vous m’avez posée, qui n’a pas de rapport avec la première, sur le travail que nous avons fait ce soir, je fais en sorte de trouver à chaque fois les compromis. Et le travail, notamment de la Commission et du président de la Commission pour trouver l’accord avec le Parlement européen, m’a paru mériter d’être salué. Ensuite, je fais en sorte que nous puissions discuter, dialoguer, avec la Commission et, d’ailleurs, quand je m’étais exprimé pour dire que je partageais les objectifs des recommandations qui nous étaient adressées, et que les moyens devaient être laissés à la discrétion des Etats et, notamment, de la France, M. BARROSO en a convenu, puisque c’est ce mécanisme, enfin ce dispositif ou cette idée ou ce principe, qui ont été validés. Par exemple, pour la réforme des retraites, il a été convenu dans la recommandation pour ce qui concerne la France que la France avait décidé de faire une réforme des retraites et qu’il n’y avait pas de règles particulières qui étaient fixées pour un âge légal de la retraite comme cela pouvait figurer dans une première mouture de la recommandation. Enfin, sur les candidatures, pour l’instant, ce n’est pas d’actualité.

 

QUESTION : Comment expliquez-vous que sur les six projets identifiés, il n’y en ait aucun français ?

 

LE PRESIDENT : Oui, mais je me l’explique très bien, c’est parce que rien n’était prêt. Quand nous sommes arrivés, je vous le rappelle, c’était l’année dernière, il n’y avait aucun projet qui avait été présenté. Il y a donc six projets et cela n’avait rien à voir avec le niveau de croissance, de développement ou de richesse des pays, puisque l’Allemagne, par exemple, a fait valider un « project bond ». Il y a donc deux projets français qui sont maintenant prêts et qui vont être soumis à la Commission pour s’intégrer dans ce dispositif. Et je n’ai pas de doute sur l’adoption de ces deux projets. On aura donc deux partenariats – « projects bonds » si l’on veut parler en anglais – qui vont être acceptés. Ils concernent les projets d’infrastructures, de grandes infrastructures.

 

QUESTION : Une question sur l’état budgétaire de la France. Le premier Président de la Cour des Comptes a livré une analyse pessimiste. Il semble que l’effort de redressement des comptes serait encore plus difficile que prévu. Est-ce que vous croyez possible de maintenir le déficit public à 3,7% cette année ? Est-ce que vous avez réitéré l’engagement de la France d’être à 3% en 2015 ?

 

LE PRESIDENT : Nous avons présenté un programme de stabilité, il y a quelques semaines, avec le chiffre de 3,7% de déficit. C’est d’ailleurs ce qui a été validé par la Commission et le délai de deux ans qui nous a été accordé. Je parle là du déficit de 2013. Nous sommes au mois de juin. Si la croissance restait aussi faible, si nous étions en légère récession – ce qui est le cas pour le dernier trimestre 2012 et le premier trimestre 2013 – il est à craindre que nous ayons moins de recettes que prévu.

Qu’est-ce que nous avons à faire, compte-tenu de cette perspective ? D’abord, faire en sorte qu’il y ait plus de croissance pour le second semestre. Nous avons espoir qu’il y ait une reprise à la fin de l’année. La Commission européenne partage d’ailleurs cette prévision. Mais, ce que doit faire la France dans l’année 2013, c’est tenir la dépense publique.

 

L’engagement que nous avons ne porte pas simplement sur un chiffre de déficit, qui dépend de recettes et de dépenses. L’engagement que nous avons, c’est de maîtriser la dépense. Mais les recettes dépendent de la croissance. Si la croissance est nulle, voire négative, nous avons moins de recettes et donc, à l’horizon de la fin de l’année, un peu plus de déficit.

 

Ce que j’ai demandé au Gouvernement et ce que le Premier ministre a confirmé, c’est de tenir la dépense. La dépense de 2013 doit être strictement égale, pour l’Etat, à la dépense 2012. Pour la préparation du budget 2014, les lettres plafonds qui ont été adressées par le Premier ministre aux ministres prévoient donc pour la dépense de l’Etat – 1,5 milliard par rapport à la dépense 2013.

 

Nous sommes donc dans un processus non seulement de maîtrise de déficit, mais même de diminution et d’économie de la dépense de l’Etat. Mais nous n’allons pas, en 2013, demander des prélèvements supplémentaires pour 2013. Nous faisons en sorte de tenir la dépense et d’améliorer, autant qu’il sera possible l’activité, pour que nous ayons le plus de recettes possible à la fin de l’année. Nous en ferons le constat à la fin de l’année. La Cour des Comptes, qui a fait son travail, confirme que nous pouvons être entre 3,9% et 4,1% de déficit, selon la croissance.

 

QUESTION : Sur le programme d’aide alimentaire, est-ce que la méthode choisie n’est pas un peu risquée parce que cette rallonge se fera sur la base du volontariat ? Sur le chômage des jeunes, est-ce que vous pouvez nous confirmer que les 6 milliards seront engagés et payés ? Sur la BEI, est-ce que vous pouvez nous préciser l’orientation prise ?

 

LE PRESIDENT : Le programme d’aide alimentaire aux plus démunis– ce que l’on appelle le PEAD, mais qu’importe les sigles – devait disparaître purement et simplement lorsque nous avons négocié le cadre financier pluriannuel. La volonté d’un certain nombre de nos partenaires, c’était qu’il n’y ait plus de programme d’aide alimentaire, c’est-à-dire de fonds attribués à des associations qui apportent à nos compatriotes, européens ou français, les produits dont ils ont besoin.

 

Nous avons obtenu lors des négociations du mois de février – la France s’est battue – que l’on préserve non seulement ce programme mais qu’on lui garantisse 2,5 milliards, au lieu de 4 précédemment. Ce que vient là d’obtenir le Parlement européen – et je salue son Président qui y a travaillé – c’est de pouvoir ajouter 1 milliard.

 

Effectivement, ce sont des contributions volontaires, mais la France est prête à faire cette contribution volontaire. Au moins pour notre pays, nous aurons donc cette capacité. Certains partenaires européens ne souhaitaient pas qu’il y ait cette contribution volontaire. Vous connaissez d’ailleurs ces pays qui ne le souhaitent pas !

 

On est donc au même niveau, à peu près, que dans la période précédente alors que nous sommes dans une situation de crise européenne, de récession européenne. Il était très important pour nous de garantir et d’améliorer même ce programme d’aide aux plus démunis.

Sur le chômage des jeunes, que l’on soit effectivement bien clairs, vous avez raison. Cela a été un moment évoqué dans le débat du Conseil européen. 6 milliards sont donc prévus, dans le cadre financier, pour les 7 prochaines années. Si on avait laissé les choses en l’état, cela fait à peine 1 milliard par an. Il y aurait donc eu 1 milliard par an pour l’emploi des jeunes sur 28 pays européens, alors même que l’on connait 6 millions de chômeurs de moins de 25 ans…

Ce qui a été décidé, c’est important. Cela a été préparé par une déclaration que nous avons faite, Madame MERKEL et moi-même, lorsqu’elle était venue à Paris ; et je l’avais également évoqué avec le Premier ministre espagnol, avec le président du Conseil italien et avec la Commission européenne quand j’ai rencontré M. BARROSO. Ce que nous avons réussi à dégager, c’est 6 milliards d’euros, non plus sur 7 ans mais sur les 2 années 2014 et 2015.

 

Si nous consommons tous ces crédits – ce qui est quand même l’objectif –, si tout est dépensé, je dis bien dépensé, décaissé, qu’il n’y a plus rien à la fin 2015, ce qui a été décidé par le Conseil européen et par le Parlement européen s’il le confirme, c’est d’avoir une marge de liquidité, pour que tout ce qui n’aura pas été dépensé ailleurs, soit affecté au programme pour les jeunes. Cela veut dire qu’au-delà de 2015, on va continuer à mener ces politiques pour l’emploi des jeunes. On peut penser que l’on va doubler ou tripler la somme initialement prévue. Cela, c’est un point majeur du Conseil européen.

 

Sur la Banque européenne d’investissement, il y a effectivement trois instruments qui sont imaginés et plus ou moins raffinés. Le plus raffiné est de faire un prêt garanti par un fonds structurel et avec une mutualisation des fonds structurels. Cela c’est la panoplie complète, la troisième proposition, le troisième instrument – les deux autres étant moins sophistiqués, moins raffinés ou moins amples dans leur effet de levier.

 

Il n’y a pas eu de décision sur l’un des trois instruments. Les deux autres étant moins sophistiqués ou moins raffinés ou moins amples dans leur effet de levier. Il n’y a pas eu de décisions sur l’un des trois instruments, pour l’instant, on est resté sur l’évaluation des trois instruments et, au mois d’octobre, il doit y avoir un choix du meilleur instrument. Ce que j’ai essayé de faire prévaloir, on verra comment c’est reçu, c’est qu’à mes yeux le meilleur instrument, c’est celui qui est mis en œuvre le plus vite possible. Car à quoi cela sert-il d’avoir un mécanisme extrêmement raffiné si on met plusieurs années à le mettre en œuvre et à l’appliquer ? Donc j’ai dit c’est tellement compliqué qu’il vaut mieux faire simple et tout de suite. Donc on verra la réponse qui sera faite au mois d’octobre mais les trois hypothèses sont aujourd’hui travaillées.

 

QUESTION : Monsieur le Président, je reviens au déficit français.

 

LE PRESIDENT : Oui.

 

QUESTION : Vous avez rappelé il y a quelques instants que le déficit aller se creuser à cause des moindres…..

 

LE PRESIDENT : Selon la croissance. C’est la croissance qui déterminera, ou le défaut de croissance, le montant des recettes. On ne peut pas déterminer la croissance, en revanche on peut déterminer la dépense. C’est pour cela que la dépense est totalement maitrisée.

 

QUESTION : Je voulais vous demander la critique qui est faite, c’est celle d’un dérapage des comptes publics. Est-ce qu’il y a en dépit du jeu des stabilisateurs automatiques que vous avez rappelés, est-ce qu’il y a une limite au-delà de laquelle vous souhaitez que le déficit n’aille pas, d’une part. D’autre part, est-ce que la France se fixe bel et bien l’horizon 2015 pour revenir sous les 3% ? Et puis, dernière question, la Cour des Comptes vous fait une liste assez longue et assez détaillée de recommandation en ce qui concerne les dépenses justement, et notamment avec la proposition de désindexer certaines prestations sociales hormis celle que touchent les plus démunis. Qu’est-ce que vous en pensez ? Merci.

 

LE PRESIDENT : Alors, d’abord sur l’évaluation du déficit 2013, il est prématuré de fixer un chiffre. Puisque tout dépendra de l’évolution des recettes dans le second semestre. Si les recettes rentrées moins bien, faute de croissance au second semestre, les gels de dépenses qui ont déjà été décidées se traduiraient en annulation de crédit. De manière à ce que, comme je vous l’ai dit, nous puissions agir sur la dépense. Mais je ne suis pas favorable à ce que l’on rajoute, on pourrait le faire en cours d’année, des prélèvements supplémentaires. Ces prélèvements supplémentaires affecteraient encore davantage la croissance et ne se traduiraient pas forcément par des recettes supplémentaires. Donc le levier sur lequel nous devons agir, c’est celui de la dépense 2013. Et à force, oui, de la dépense 2014, d’où la volonté du Premier ministre de faire diminuer la dépense en 2014 d’un milliard et demi par rapport à 2013. Ce qui d’ailleurs, serait historique parce que la dépense publique a décroché de 2007 à 2011, de manière irresponsable. Certes, il y avait la crise, mais il y a la crise aujourd’hui, il y a la récession. Donc nous avons connu 600 milliards de hausse de l’endettement public et des déficits qui ont pu atteindre plus de 7% du PIB et une part de la dépense publique qui est passée de 52% de la richesse nationale à 56 % en 2012. En ce sens, ceux qui nous demandent de faire des économies sont souvent ceux qui ont laissé filer la dépenses. Comme peut-être par remord, ils s’en veulent tellement d’avoir laissé déraper les comptes publics, qu’ils nous demandent, qu’ils nous supplient de faire les économies à leur place. Bon alors, je reviens à la Cour des Comptes qui n’est pas suspecte de ce tempérament, la Cour des Comptes évoque un certain nombre de pistes d’économie, de dépenses fiscales qu’il faudrait renier, certaines de ces propositions me paraissent tout à fait pertinentes, ou d’autres formulaires ; et à la question de l’indexation, c’est un sujet sensible, il faut donc regarder toutes les économies avant d’aller demander aux plus modestes de participer plus substantiellement à l’effort. Nous allons donc regarder toutes ces économies, nous avons déjà regardé et, par ailleurs, nous avons une réforme des retraites engagée, nous avons aussi fait des choix pour la réforme des prestations familiales et du quotient familial, quotient familial qui est une dépense fiscale.

 

La Cour des Comptes est donc dans son rôle en faisant des propositions, et le gouvernement et le Parlement sont dans leur pleine légitimité, de décider dans quelle direction il convient d’agir en termes d’économie. Mais l’idée est bien de maîtriser la dépense et d’éviter de recourir à l’impôt même si on sait qu’il y aura nécessairement des choix à faire.

 

QUESTION : Monsieur le Président, est-ce qu’en venant aujourd’hui à Bruxelles vous aviez, vous avez en tête le résultat de Villeneuve-sur-Lot, la montée du Front National, et en demandant l’accélération sur la croissance, l’investissement, le chômage des jeunes. Est-ce que vous avez en tête aussi les échéances électorales, à venir, municipales et européennes pour envoyer un message aux Français ?

 

LE PRESIDENT : Je n’ai pas eu besoin d’attendre l’élection législative partielle pour savoir ce que j’avais à faire. Depuis un an, c’est-à-dire depuis le Conseil européen de juin 2012, je me bats au niveau européen, en étant entendu sur certains aspects mais pas sur tous, pour avoir un pacte de croissance, pour avoir des trajectoires budgétaires qui soient conformes à l’activité économique – cela nous renvoie aussi au délai obtenu par la France et pas simplement par la France. Autant je suis partisan d’un ajustement budgétaire, autant il ne peut pas être contradictoire avec l’objectif de croissance.

 

Je me bats pour avoir des politiques d’emploi des jeunes et des politiques d’investissement. L’Europe doit montrer ce qu’elle peut faire mais je ne dirai pas que l’Europe peut tout ! Elle peut favoriser des politiques de croissance, mettre dans son budget davantage de crédit pour l’emploi, desserrer un certain nombre de contraintes, regarder les politiques d’austérité avec un œil différent d’il y a quelques mois. Mais il y a aussi ce que doivent faire les Etats et ce que doit faire la France. Ce serait trop simple de s’exonérer. Ce serait d’ailleurs une façon coupable par rapport à l’enjeu de lutte contre le populisme ou l’extrémisme. Parce que cela voudrait dire que ce n’est que la faute de l’Europe ? C’est également la faute des politiques économiques qui sont conduites dans un certain nombre de pays.

 

Il y a aussi notre propre responsabilité en France de mettre en œuvre des politiques d’emploi, des politiques de croissance, des politiques d’investissement. D’ailleurs, j’essaie d’être cohérent : ce que je demande au niveau européen, je le fais au niveau national. Il y a un plan pour l’emploi des jeunes en France, il y a un plan pour l’investissement public – il y a encore des annonces qui vont être faites le 9 juillet sur la stratégie d’investissement, notamment en termes d’infrastructures. Et nous faisons en sorte d’améliorer notre compétitivité pour avoir plus de croissance.

 

Je n’attends pas les élections, parce que je sais ce que j’ai dit pour l’élection présidentielle. C’est le mandat, qui m’a été donné par le peuple français.

 

QUESTION : J’aimerais connaître votre réaction suite à l’adoption par le Conseil de l’Europe d’un texte condamnant : « les recours excessifs à la force employés par certains Etats ». Cela vise principalement la Turquie mais également la France, avec l’usage par les forces de l’ordre de gaz lacrymogène contre des manifestants pacifique. Cela fait référence à l’histoire des manifestations des opposants au mariage homosexuel.

 

LE PRESIDENT : J’ai vu cette déclaration. Je ne peux pas me prononcer sur ce qu’il s’est passé en Turquie. J’ai vu qu’il y avait des éléments de répression d’une tout autre ampleur et d’une tout autre nature, que ce qui a été éventuellement mis en œuvre par rapport à des manifestations qui se sont tenues il y a plusieurs semaines à Paris. Rectification devra être faite, parce que le ministre de l’Intérieur a veillé à ce que précisément pour ces manifestations il y ait une certaine retenue et maitrise. Cela ne veut pas dire qu’il n’y ait pas eu parfois je ne sais quel excès mais vraiment je pense que nous n’avons pas eu de blessés dans cette manifestation. Je ne parle pas de ce qui s’est produit, hélas, avec la mort d’un jeune homme. Cela n’avait rien à voir avec les manifestations. Mais dans les manifestations qui se sont déroulées – il y en a eu de nombreuses – il n’y a pas eu de blessés à ma connaissance. Et je suis bien informé. Je donnerai toutes ces informations au Conseil de l'Europe. Merci à vous.

 

 

 

 

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