Le stress gagne du terrain

Le constat est sans appel. Selon le 5e Baromètre bisannuel du stress de la CFE-CGC (1), ce mal, aujourd'hui très répandu dans les entreprises, qu'est le stress ne décline pas. Bien au contraire. Aperçu des résultats commentés par Bernard Salengro, médecin du travail à l'origine de l'Observatoire du stress à la CFE-CGC.

Alors que l'autonomie semble suffisante pour organiser son travail (88 % de réponses positives), que l'ambiance de travail est bonne ou très bonne (73 %), et que les collègues sont un vrai soutien (71 %), trois grands facteurs de stress professionnel se détachent clairement chez les cadres interrogés.  

Trois grands facteurs de stress... 

Le temps manque. Pas assez de temps pour accomplir le travail, affirment deux cadres sur trois (+ 10 % en deux ans). " La RTT fait rire les spécialistes des cadres ", commente Bernard Salengro, médecin du travail à l'origine de l'Observatoire du stress à la CFE-CGC. Citons deux chiffres sans appel, qui traduisent un problème de chaque jour : 83 % des sondés estiment que la charge de travail est plus lourde qu'il y a quelques années, et 87 % ont le sentiment de devoir travailler plus vite. " Les trente-cinq heures se sont traduites par une augmentation, une intensification de la charge de travail, et des plannings plus complexes ", rappelle l'auteur du Stress des cadres. La reconnaissance manque. Plus de la moitié des personnes interrogées (54 %) sont pessimistes sur leurs perspectives de carrière, 48 % trouvent leurs efforts mal reconnus, et 72 %, insuffisamment récompensés ! " Or, selon le professeur Johannes Siegrist, les personnes vivant un déséquilibre entre l'effort et les récompenses professionnelles courent notamment deux fois plus de risques de maladies cardiovasculaires. " Le sens manque. Parmi les personnes interrogées, 57 % se trouvent mal ou très mal informées sur la stratégie de leur entreprise, et 39 % n'adhèrent pas à celle-ci. " Pourtant, un cadre donne habituellement de l'allant. Couplé à une grande charge de travail, le manque d'information revient à une perte de sens - quelque chose de très violent. "  

... et une foule d'effets négatifs 

" Le stress rend les gens malades. Nous ne sommes pas dans le sentiment, la papouillothérapie, l'effet de mode ", déclarait gravement le docteur Salengro lors de la présentation de l'étude. À cause du stress au travail, 70 % des sondés se disent tendus ou crispés, 56 % s'inquiètent de leurs conditions professionnelles, 56 % peinent à concilier emploi et vie privée, 50 % se sentent découragés par leur travail, 48 % ont mal au dos, 36 % ont des migraines, 35 % pensent à quitter leur emploi, 30 % ressentent des troubles visuels ou cutanés, 29 % des palpitations, 19 % fument.  

Un mal persistant, mal pris en compte 

Malgré cette amplitude du stress, seules 18 % des entreprises le prendraient en compte. " Il n'y a jamais eu aussi peu de jours de grève par an, constate parallèlement le docteur Salengro. Cela montre que les solutions ne sont plus collectives, mais individuelles et médicamenteuses. " Globalement, la note moyenne de stress donnée par les cadres à leur travail s'élève à 6,2/10, la même valeur qu'en septembre 2003. À ceux qui s'étonneraient de cette stabilité, le docteur Salengro rappelle que certains chiffres, " déjà énormes ", ne peuvent heureusement plus guère s'aggraver.  

(1) Baromètre Stress, vague 5, septembre-octobre 2005 ; étude quantitative en ligne réalisée auprès d'un échantillon représentatif de 1 340 cadres et agents de maîtrise français. Synthèse consultable en ligne sur www.cfecgc.org.