De nombreux Américains souffrent de troubles psychologiques liés à la succession de tueries de masse. En France, les vagues d’attentats pourraient avoir le même impact

Angoisse, dépression, prostration.. Les tueries qui se multiplient aux Etats-Unis plongent les Américains dans un état de stress post-traumatique bien au-delà du cercle des survivants et des proches.

"Sommes-nous devenus une nation en stress post-traumatique ?", interroge la psychologue Jean Kim sur le site Alternet. 

"Quand on additionne" les morts, les blessés, le personnel d’urgence, les proches, et tous ceux qui sont touchés de près ou de loin, ces massacres "ont un impact sur chacun d’entre nous", estime le docteur Merritt Schreiber, professeur de psychologie à l’université UC Irvine. 

Le président américain Barack Obama, en présentant mardi des mesures pour renforcer le contrôle des armes à feu, a essuyé des larmes au souvenir des 20 enfants tués en 2012 à Newtown (Connecticut) par un déséquilibré.

Depuis, les fusillades de masse se sont accélérées. D’après le site gunviolencearchive.org, il y en a eu 330 aux Etats-Unis l’an dernier, contre 281 en 2014. 

En France, ce sont deux vagues d’attentats successives qui ont fait 147 morts et des centaines de blessés au total en 2015. 

Paranoïa, peur de l’autre, vigilance permanente

A chaque fois, les images de civières, ambulances, proches effondrés, les portraits des tueurs, les mines sombres des forces de l’ordre tournent en boucle à la télévision. 

Pour Merritt Schreiber, "il est scientifiquement prouvé que passer beaucoup de temps à regarder ce genre d’incidents à la télévision provoque une montée d’anxiété chez les adultes comme chez les enfants".

Cela se traduit par une "hyper-vigilance", un état d’alerte permanent, proche de la paranoïa, comme la peur de s’asseoir dans un restaurant dos à la porte. 

Ces cycles de violence qui se répètent "perpétuent la peur (…) et peuvent créer des divisions entre nous et les autres", explique Eric Bergemann, psychologue à Los Angeles. 

"Quand on entend en permanence parler dans les médias de choses qu’on ne peut pas contrôler (…) on choisit une bataille contre un groupe x, y ou z pour avoir l’impression de faire quelque chose, comme 'combattons tous ces musulmans’", remarque-t-il. 

Les enfants particulièrement vulnérables

Aux États-Unis, de nombreuses écoles organisent des "kill drill", au cours desquels des bambins apprennent à se cacher en cas d’intrusion d’un tueur. En France, depuis les attentats de novembre, les écoles ont du organiser des exercices de prévention, certaines allant même jusqu’à reproduire une intrusion de terroristes pour s’entraîner à l’évacuation.

Désormais, "les enfants grandissent avec l’idée que ces tueries sont normales. On les prive du sentiment de sécurité", souligne Catie Mogil, pédopsychologue américaine

Pour elle, ces enfants pourraient devenir une génération d’adultes sur-angoissée, comme les enfants de militaires. 

A Roseburg, bourgade d’Oregon où un étudiant avait tué en octobre neuf de ses camarades au fusil d’assaut, "tout le monde est sur les nerfs, même les enfants", constate Robert Bullock, l’un des responsables des pompiers de la ville. 

"Ils ont des difficultés pour dormir, un moral en dents de scie : une minute ils vont bien, la suivante plus du tout", "certains mots les font se glacer parce qu’ils ont cru entendre 'fusillade’ (…) Je pense qu’aucun d’eux ne va s’en remettre totalement", ajoute-t-il. 

Des symptômes évoquant ceux de militaires qui pendant des années, parfois toute leur vie, sont victimes de réminiscences des atrocités du combat, de pensées morbides et autres troubles psychologiques.

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