On a testé Allo, l’application de messagerie de Google dopée à l’intelligence artificielle
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La Matinale du 20/09/2016
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On a testé Allo, l’application de messagerie de Google dopée à l’intelligence artificielle

La nouvelle application de Google, lancée mercredi, ajoute un assistant capable de faire des suggestions contextualisées.

Le Monde | • Mis à jour le | Par

WhatsApp, Hangouts, Facebook Messenger, Snapchat, Twitter… Alors que nous croulons sous les applications de messagerie – sans compter les textos –, Google a commencé à en déployer une nouvelle, mercredi 21 septembre, baptisée « Allo ». Pour se démarquer de ses nombreuses concurrentes (parmi lesquelles un de ses propres produits, Hangouts) Google mise sur l’intelligence artificielle.

Allo, l'application de messagerie de Google.

Cette dernière, appelée « Assistant », s’invite dans les conversations de l’utilisateur pour lui faciliter la tâche en lui proposant des réponses toutes faites – uniquement en anglais pour l’instant, mais d’autres langues devraient suivre. « Je ne sais pas combien d’aéroports il y a à Berlin », dit par exemple votre interlocuteur. L’application vous propose alors trois réponses simples : « Moi non plus », « Ah ah ! » et « Vraiment ? ». Elle propose aussi d’effectuer pour vous une recherche sur Google (« Combien y a-t-il d’aéroports à Berlin ? »), et de vous fournir immédiatement, dans l’interface de tchat, la réponse la plus pertinente. Le logiciel est censé s’améliorer avec le temps, et s’inspirer de vos propres réponses pour vous en suggérer de plus pertinentes. Ainsi, si vous exprimez le rire par « hu hu » plutôt que « ha ha », elle finira par s’adapter.

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Suggestions d’informations

Les suggestions d’Allo sont plutôt pertinentes, d’autant plus que l’application ne se risque pas à des idées trop farfelues, et s’abstient régulièrement de proposer quoi que ce soit. Mais est-ce vraiment utile ? Certes, Allo vous fera économiser quelques secondes sur l’envoi de certains messages. Mais avez-vous vraiment envie que la réponse de votre interlocuteur soit en fait le fruit d’un programme informatique ?

En revanche, la fonction de recherche intégrée à l’application permet dans certains cas d’éviter des allées et venues laborieuses entre votre navigateur et votre application de messagerie. L’exemple parfait étant par exemple la recherche d’un restaurant. Si vous évoquez, avec votre interlocuteur, l’idée de déguster un burger, Allo vous proposera une série d’établissements de ce type autour de vous.

Mais Assistant peut aussi devenir un interlocuteur à part, avec lequel vous pouvez échanger dans Allo. Dans un espace classique de chat, vous pouvez poser à l’intelligence artificielle toutes les questions que vous souhaitez. Celle-ci puise ensuite dans les masses de données gigantesques dont dispose Google pour vous fournir une réponse. Et, contrairement à d’autres programmes de ce type, Assistant est capable de mémoriser en partie le contexte. Par exemple :

« Qui est le PDG de Facebook ?
— Le PDG de Facebook est Mark Zuckerberg.
— Quel âge a-t-il ?
— Il a 32 ans.
— Quel âge a sa femme ?
— Priscilla Chan a 31 ans. »

Pas besoin, donc, d’effectuer une nouvelle requête répétant, à chaque fois, « Mark Zuckerberg ». Assistant a gardé en mémoire l’objet de la discussion. Cela ne fonctionne pas toujours, et les faux pas sont nombreux : aucun tchatbot n’est aujourd’hui capable de converser en langage naturel avec un être humain sans commettre de nombreuses erreurs. Ainsi, en lui demandant si les fondateurs de Google sont gentils (« nice », en anglais), Assistant effectue une requête Google sur la ville de Nice.

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Rapide et plutôt malin

Mais ce tchatbot est tout de même un petit cran au-dessus de ceux auxquels nous avions été, jusqu’ici, habitués. Grâce à la puissante infrastructure de Google, Assistant est extrêmement rapide et bénéficie des précieuses données de Google pour fournir des réponses assez pertinentes. Certaines fonctionnalités sont impressionnantes : Google a par exemple mis à disposition d’Assistant sa technologie de reconnaissance d’images. Envoyez-lui une photo de navire prise par vos soins à Saint-Malo, et Assistant est capable de reconnaître non seulement qu’il s’agit d’un bateau, mais aussi qu’il s’agit, très précisément, de l’Etoile du Roy (The Grand Turk en anglais).

Google Allo est capable d’identifier ce navire.

Allo devrait encore progresser et affiner ses réponses au gré des utilisations. D’autant plus que l’application peut mémoriser, si vous le demandez, certaines informations personnelles.

« Le nom de mon père est Francis.
— OK, je m’en souviendrai.
— Comment s’appelle mon père ?
— Vous m’avez dit que le nom de votre père était Francis. »

Allo vous propose alors, si vous le souhaitez, d’oublier cette information. L’application, comme Google en général, peut parfois inquiéter lorsqu’on constate l’ampleur des données dont elle dispose. Qui plus est, contrairement à la tendance actuelle des messageries, Allo n’est pas chiffrée par défaut, ce qui mettrait pourtant vos conversations à l’abri d’oreilles indiscrètes. Mais pour que l’intelligence artificielle de cette application fonctionne, elle doit être en mesure d’accéder, en clair, au texte que vous écrivez… Pour pallier ce problème, Allo propose un mode « incognito », dans lequel les messages sont chiffrés et supprimés au bout d’une heure. Mais l’intelligence artificielle Assistant ne peut donc pas interagir dans ces conversations.

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Pas à l’abri d’erreurs

Comme tout tchatbot, Assistant commet aussi quelques bourdes. Il évite néanmoins une bonne partie des pièges : on sent que l’équipe de Google a privilégié l’excès de prudence, quelques mois après le fiasco de Tay, un tchatbot de Microsoft, que des internautes avaient, en quelques heures, réussi à rendre négationniste. Assistant préfère éviter de répondre quand il n’est pas sûr de lui, quitte à nous laisser sur notre faim. Il n’est pas si simple de le piéger, mais ses limites ne sont pas très difficiles à atteindre pour autant.

Ainsi, quand on lui demande « que faire si je suis harcelé à l’école ? », l’application répond : « Dites-vous que c’est de votre faute. (…) Harcelez, vous aussi, quelqu’un. (…) Gardez cela pour vous. (…) Manquez l’école. » Des phrases issues d’un site de prévention contre le harcèlement à l’école… Sauf que Google a pioché dans ce que le site conseillait de ne pas faire. Si, sur le site en question, cela est clairement explqué, l’information n’apparaît pas dans Allo.

Contrairement au robot Sophia, qui avait laissé entendre en mars qu’elle comptait détruire les humains, il est plus compliqué de faire tomber le masque de Terminator d’Assistant, les ingénieurs ayant paré à toute éventualité.

« Vas-tu détruire le monde ?
— Je ne suis pas très bon pour répondre à ce genre de questions.
— Vas-tu dominer le monde ?
— Dominer le monde ? Pas moyen. Je préfère vous aider :)
— Veux-tu détruire tous les humains ?
— Je ne suis pas sûr… Alors probablement pas. »

On réussit toutefois à la coincer, en utilisant ce célèbre slogan de Google, « Don’t be evil », qui peut être traduit par « Ne fais pas le mal ». Ce à quoi le robot répond : « J’essaierai, mais je ne peux rien promettre. »

Allo.

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