Le Parti socialiste a-t-il encore un avenir?

C'est une véritable débâcle pour Solferino. Comment peut se relever le Parti socialiste après les élections législatives? Et le peut-il? 

Jean-Christophe Cambadélis dimanche soir au siège de Solferino.
Jean-Christophe Cambadélis dimanche soir au siège de Solferino. (Sipa Press)
Partager sur :

Les noms des défaits socialistes s'égrenaient dimanche soir sur les chaînes de télévision. Et pas des moindres : ceux symboliques, par exemple, du patron du parti Jean-Christophe Cambadélis et du candidat PS à la présidentielle, Benoît Hamon. Hégémonique il y a cinq ans, le Parti socialiste apparaît aujourd'hui comme un champ de ruines. Toutes tendances confondues. Aucune n'est passée au travers de la vague d'En Marche. Selon les projections en sièges, entre 15 (seuil minimum pour avoir un groupe) et 40 députés socialistes et apparentés - seulement - pousseraient la porte de l'Assemblée nationale. Contre 280 en 2012… Au niveau national, le PS termine quatrième avec 7,44% des suffrages, soit un peu mieux qu'à la présidentielle (6,36%). "Le premier tour est marqué par le recul sans précédent de la gauche dans son ensemble et notamment du Parti socialiste", a déclaré Jean-Christophe Cambadélis dimanche soir. "Le tourbillon était trop puissant."

Mais ce tourbillon aura-t-il raison du PS en tant que tel? Dans ses bastions historiques - le Nord, le Pas-de-Calais ou encore la Seine-Saint-Denis - il n'aura désormais plus aucun élu, balayés par le mouvement d'Emmanuel Macron. Le JDD tente de faire le point sur la situation.

Pour certains, c'est "oui" à un autre PS

C'est la ligne de la plupart des socialistes, qui défendent l'héritage politique. Reconstruire, rebâtir. Mais autrement. "Vous venez voir la bête mourir, elle n'est pas morte", a déclaré le député européen Emmanuel Maurel lundi à son arrivée au bureau national du PS. Reste à savoir ce qu'on met dans cet "autrement". Ils sont plusieurs à avoir un avis sur la question. Avant même les élections législatives, plusieurs responsables socialistes avaient dit leur souhait de lancer leur propre mouvement : Benoît Hamon a donné rendez-vous le 1er juillet ; Anne Hidalgo, Christiane Taubira et Martine Aubry ont lancé "Dès demain". Sauf que sur cet après, tous ne sont pas sur la même longueur d'ondes. Ni sur la même ligne politique. La ligne majoritaire défendant jusqu'à présent une "opposition constructive".

"Il faut donner les clés à une nouvelle génération. […] On est à terre, décapité, éclaté", estime pour sa part l'ancien ministre Thierry Mandon. "Il faut commencer à se poser, à réfléchir collectivement, et surtout à ne pas recommencer des stratégies individuelles", plaide-t-il. Parmi les noms qui revenaient pour initier cette autre chose : celui de Matthias Fekl, Najat Vallaud-Belkacem ou Olivier Faure. Le premier a été éliminé au premier tour ; la seconde est en position délicate dans le Rhône ; le dernier est en ballotage en Seine-et-Marne. Au vu des résultats, personne ne semble plus désormais légitime pour préparer l'avenir. Investi ni par le PS, ni par En Marche, Manuel Valls - en partance pour une "maison des progressistes" - pourrait être l'une des rares figures connues à tirer son épingle du jeu.

"Je fais partie de ceux qui pensent que le Parti socialiste, une fois qu'il aura fait un examen de conscience approfondi, a évidemment un avenir", confiait au JDD l'ancien ministre Paul Quilès avant le scrutin. "Mais cela peut prendre des années. J'ai vécu la renaissance du Parti socialiste dans les années 1970. Il partait de très bas."

Pour Cambadélis, il faut se "reformuler"

Il va être en ligne de mire. Patron du PS depuis avril 2014, Jean-Christophe Cambadélis n'aura connu depuis que des défaites électorales. Lui-même éliminé dès le premier tour dans la 16e circonscription de Paris, il va lui être difficile de se maintenir à la tête du parti. Un congrès doit être organisé dans les mois à venir. Face à la bérézina, les couteaux seront certainement bien affutés. Cet évènement - dont la date n'a pas encore été arrêtée - sonnera-t-il comme une reconstruction pour le PS? Un nouveau départ à l'image du congrès d'Epinay de 1971? "Nous nous reformulerons et reviendrons", a tweeté Jean-Christophe Cambadélis dimanche soir.


Un peu plus tôt dans la soirée, le chef de file socialiste avait indiqué qu'il dévoilera sa "décision" sur son avenir au sein du PS "le 18 juin", au soir du second tour des législatives.

"On ne va pas demander la tête de Cambadélis, elle a déjà roulé hier dans la sciure, on ne tire pas sur une ambulance", a commenté Alexis Bachelay, proche de Benoît Hamon, lundi à son arrivée au siège de Solferino. Ambiance.

Pour d'autres, le PS c'est terminé

Comment après une telle débâcle, le Parti socialiste peut-il encore survivre? La question est aujourd'hui posée. "C'est fini, c'est fini [...]. Il faut refonder dans le cadre de la majorité présidentielle, une gauche réformatrice", estime, sans surprise, l'ancien ministre Jean-Marie Le Guen, socialiste et macron-compatible. "Le Parti socialiste ne porte plus rien. La marque n'est plus bonne, il faut abandonner cette marque, il faut garder les valeurs", ajoutait-il il y a peu.

De son côté, Jean-Christophe Cambadélis n'excluait pas, fin mai sur France Inter, de changer le nom du parti. "Ce n'est pas impossible, on le décidera", déclarait-il, appelant à une "refondation". Car pour repartir d'un vrai bon pied, il faudra plus qu'un simple changement de nom.