#RSS alternate alternate alternate alternate alternate alternate Contents Les auteurs Du bonheur à l’être heureux Petits arrangements avec le bonheur RDF Bibliontology Search on OpenEdition Version classiqueVersion mobile OpenEdition Books * 6400 livres * 88 éditeurs * auteurs ____________________ [Résultats par livre___.] Rechercher Éditions de la Maison des sciences de l’homme Éditions de la Maison des sciences de l’homme * fr * en * es * it * de OpenEdition Books > Éditions de la Maison des sciences de l’homme > Ethnologie de la France > Ethnologie des gens heureux > Le bonheur au travail : entre idé... Du bonheur à l’être heureux Petits arrangements avec le bonheur Ethnologie des gens heureux | Salomé Berthon , Sabine Chatelain , Marie-Noëlle Ottavi , et al. I. Bonheur en partages Le bonheur au travail : entre idéologies managériales et aspirations des acteurs Rechercher dans le livre ____________________ OK Table des matières Citer Partager Cité par ORCID Info Ajouter à ORCID Le bonheur au travail : entre idéologies managériales et aspirations des acteurs Emmanuelle Savignac p. 23-35 Texte Bibliographie Notes Auteur Texte intégral * 1 Travail dériverait de tripalium, instrument à trois pieux servant à ferrer les chevaux rétifs. * 2 Du travail, activité des hommes asservis dans la Grèce antique, au fronton d’Auschwitz : « Le trav (...) 1La question du bonheur au travail n’est ni étymologiquement1, ni historiquement2, ni sociologiquement évidente dans le sens où elle irait de soi ; et cela aussi bien par des pratiques qui la favoriseraient « naturellement » en entreprise, qu’au travers des témoignages des acteurs du travail. * 3 Le medef, Mouvement des entreprises de France, représente plus de 700 000 entreprises en France et (...) * 4 Publicis consultants : « réseau d’agences de conseil en communication stratégique et de conseil au (...) 2Elle est pourtant au centre des discours managériaux comme ceux des départements des ressources humaines, des représentations médiatiques et des aspirations des salariés : du côté des entreprises, le medef3 lui consacre un atelier lors de son université de l’été 2005 et une « fête des entreprises » est créée à l’initiative d’ethic (Entreprises de taille humaine indépendantes et de croissance, « mouvement des patrons enthousiastes »), et de Publicis consultants4. La raison principale donnée à l’événement est que : * 5 Souligné par les auteurs du texte. Rubrique « Pourquoi ? » du site consacré à la fête des entrepri (...) On constate que le bien-être et l’épanouissement5 des salariés sont des facteurs de plus en plus importants pour l’efficacité de l’entreprise, dans un contexte économique de plus en plus difficile, dans lequel il faut faire preuve de plus en plus de productivité et de performance mais aussi d’ingéniosité et d’imagination. La fête des entreprises est donc un jour de trêve où l’on souligne exclusivement les bons côtés de la vie dans l’entreprise. 79 % des Français déclarent en effet aimer leur entreprise et 76 % la jugent conviviale. L’entreprise c’est souvent bien plus que le travail. C’est une seconde vie dans « la » vie. 3Quant à la représentation télévisuelle du travail, le sociologue des médias Éric Macé montre dans un chapitre intitulé « Le travail c’est l’extase » qu’à la télévision « les interactions proportionnellement les plus nombreuses sont celles où l’expérience du travail est au centre des préoccupations » et qu’« il est frappant d’observer combien le corpus endosse très majoritairement le point de vue selon lequel le travail est un lieu d’épanouissement personnel et une communauté d’intérêts abolissant les clivages de classe, de genre et de race » (Macé 2006). 4Enfin, une large enquête de Christian Baudelot et Michel Gollac (2003) sur le bonheur au travail montre, pour les personnes interrogées, l’importance de l’activité professionnelle dans le fait d’être heureux. Le bonheur au travail apparaît sous deux aspects : avoir un travail et réaliser/se réaliser par le travail (« question économique » et « donnée psychologique »). Ces optiques sont modulées par les questions d’âge, de genre et de catégorie socioprofessionnelle. En effet, les catégories les plus exposées à la précarité ou à la pénibilité lieront prioritairement le bonheur au fait d’avoir un emploi, au contraire de catégories plus aisées pour qui le bonheur au travail relèvera d’une dimension de réalisation de soi. 5Ce faisant, les auteurs notent que le travail est toujours traversé par la tension née au xviii^e siècle de « deux conceptions antagonistes du travail : d’un côté un travail perçu comme une contribution au progrès de l’humanité, le fondement du lien social et une source d’épanouissement et de bonheur personnels, de l’autre un travail aliéné et aliénant qui condamne les hommes à perdre leur vie à devoir la gagner » (Baudelot & Gollac 2003). 6Mais, dans le cadre d’une anthropologie de l’entreprise – et plus précisément des entreprises start-up du multimédia et de l’Internet qui ont constitué notre terrain (Savignac & Waser 2003), traversées par des modes d’organisation contemporains, en réseau, par projets et managées « à l’affect » – qu’en est-il de l’émergence du bonheur, de son expression et de sa collecte hors du questionnement direct à son propos ? Comment – et c’est la question de Baudelot et Gollac – distinguer « une passion authentique » d’une manifestation de conformité à la norme » du « bonheur professionnel » ? * 6 Par conséquent, deux séries de travaux alimentent la présente réflexion sous ses aspects de subjec (...) 7Reprendre cette question impose de porter notre interrogation tant au niveau de la subjectivité des acteurs du travail qu’au niveau des organisations et des théories managériales qui les traversent6. 8Qu’en est-il des termes mêmes de l’entreprise et de son usage de mots comme « épanouissement » et « motivation » ? 9Le bonheur, aspiration consensuelle s’il en est, s’inscrirait-il dans la longue liste des valeurs et vertus communicationnelles des « projets d’entreprise » aux côtés de l’éthique, des préoccupations environnementales et sociétales, difficilement porteuses de désaccord quant à l’intention qui les fonde ? Le medef, dans la synthèse de son atelier, pose ainsi que : Pour l’entreprise, ses dirigeants, ses actionnaires, comment définir cette conception objective du bonheur, sachant qu’elle est différente pour chacun ? Des critères peuvent permettre d’y parvenir, en premier lieu, un projet d’entreprise incarné par les dirigeants, décliné en stratégie. […] Le bonheur, loin d’être une entrave au travail, ouvre alors le sens vers le beau pour donner une direction à sa gestion, au travail accompli ou en devenir. * 7 Soit un bonheur tel qu’il s’actualiserait pour le travailleur ; un « réel » subjectif et émotionne (...) 10Serait-il la cheville ouvrière de discours où classes, niveaux hiérarchiques et entreprises nous seraient présentés comme réconciliés ? Ou encore la meilleure garantie d’une implication productrice d’efficacité et de productivité accrues ? En tant que « valeur », c’est-à-dire en tant que déterminant d’attentes sociales de comportement, quelle action normative le bonheur produirait-il dans les entreprises ? Par conséquent, qu’en serait-il d’un bonheur « prescrit » et du « réel » du bonheur7, pour reprendre la distinction établie en ergonomie entre « travail prescrit » et « réel du travail » ? 11Les termes directs ou indiciels de ce que serait le bonheur parsèment les discours de l’entreprise, les manuels de conseillers en communication ou en management et les études dont elle fait l’objet. Ces termes constituent une gamme sémantique variée où plaisir, bonheur-souffrance de la jouissance, passion, motivation et épanouissement, entre autres, coexistent ; ces émotions constituant une tension vers cet inatteignable du bonheur dont Paul Ricœur dit : « Bonheur évoque quelque chose que je poursuis, que nous poursuivons, qui, sans être à notre portée, est dans notre visée » (Ricœur 1994). 12Jouissance ambivalente (Aubert 2003) de l’accélération des tâches et plaisir de l’engloutissement de soi dans des processus de travail dopants où « tout bouge », où tout va vite – où « on ne s’ennuie pas », où « on ne voit pas le temps passer »… 13Satisfaction de l’accomplissement des tâches, du travail bien fait, de voir par exemple dans les start-up un jeu, un site ou un produit sortir, d’avoir réalisé ce que l’on doit… Mais aussi euphorie-souffrance du dépassement, de la performance érigée en culte par des chercheurs en sciences sociales comme Alain Ehrenberg (1991). Bonheur à faire œuvre commune – équipe – avec autrui… Satisfaction du statut et du salaire, des promotions, des gratifications… « Motivation » à faire… Enthousiasme pour son métier, son environnement de travail… * 8 Toutes choses relatives lorsqu’on lit : « Il [le bonheur] est le désirable absolu, qui vaut par so (...) 14Les qualificatifs relatifs et/ou périphériques à la question du bonheur sont multiples et peu clairement répartis en catégories de sens, hors la philosophie8. Ils sont, de plus, ouvertement interrogeables sous un double aspect : d’une part celui de l’intellection et de l’usage spontané (ou non) qu’en ont les acteurs (non toujours philosophes de métier…) et d’autre part celui du ressenti de leurs émotions par l’anthropologue lors de ses observations. 15Penser le bonheur au travail rencontre donc une double question : celle du bonheur en soi, comme concept, et celle de sa qualification par les acteurs du travail (salariés et encadrement) sans oublier les termes mêmes de catégorisation utilisés par les chercheurs en sciences sociales. 16Deux facteurs sont, sur le terrain, à mettre à la décharge de ce flou conceptuel. * 9 Marc Augé en fait état lors d’un forum du quotidien Le Monde consacré au bonheur en 1994 : « Comme (...) * 10 Dans les entretiens non directifs réalisés lors de notre étude des start-up auprès d’une centaine (...) 17Le premier facteur est la difficulté à qualifier directement le bonheur par les acteurs du travail mais aussi par l’anthropologue lors des terrains ethnographiques9, étant donné le fait qu’il se dit peu, voire pas du tout10. Le bonheur serait en cela un phénomène en creux et nous pouvons nous interroger sur la manière d’en rendre compte objectivement. Lorsqu’il est signifié, c’est en effet souvent de manière indirecte : l’observateur ressent d’une manière subjective voire empathique une émotion positive au fil des entretiens et des scènes du travail. Mais dans ce cas, quel argument à la « preuve » ? Et quelle qualification : satisfaction ? Plaisir ? Réalisation de soi ? L’anthropologue se doit donc de prêter une écoute particulière aux attitudes, aux expressions non verbales et à tous les termes périphériques de ce que serait le bonheur, advenant comme en filigrane de la question de ce que sont le travail et travailler. 18Nous pouvons nous interroger sur la raison de cette mise en silence du bonheur. Pudeur ? Tendance à se saisir plus facilement de ce qui fait relief ? Inhibition face à une émotion réelle et cette fois-ci non normée (Baudelot & Gollac 2003) dans des contextes professionnels où l’on se protège, où l’on joue un rôle ? Masquage car dévalorisation d’une émotion exprimée comme « simple » et, selon le dicton, inhérente aux imbéciles ?… 19À la différence de la « valeur bonheur » il n’y aurait là plus de termes directs pour le qualifier. Comme si l’expérience propre du sujet manquait de mots par contraste avec le langage managérial qui fournit ses paradigmes à un collectif mais non aux individus pour eux-mêmes. * 11 Université d’été du medef 2005, « Réenchanter le monde », 29-30-31 août, campus hec de Jouy-en-Jos (...) 20Nous pouvons nous demander aussi à propos du bonheur si son silence au niveau de la personne n’est pas lié au fait qu’il adviendrait peut-être en dévoiement de ce que travailler devrait être : ni s’amuser ni jouir en quelque sorte d’une activité (et malgré elle) dont la finalité – y compris celle des émotions, nous y reviendrons – est la production des « biens » ou l’efficacité du « service ». Le medef le dit : si le bonheur est « un élément essentiel dans le contenu de la gestion des ressources humaines, […] le bonheur n’est pas un objectif de l’entreprise, comme le malheur n’est ni un objectif, ni un moyen de pérennité de l’entreprise »11. 21Compte tenu de la nature même du bonheur dont la philosophie nous dit qu’il « est ce que chacun désire, non en vue d’une autre chose (comme on désire l’argent pour le luxe et le luxe pour le plaisir) mais pour lui-même et sans qu’il soit besoin – ni possible – d’en justifier la valeur ou l’utilité » (Comte-Sponville 2000), la question du bonheur au travail pourrait ainsi apparaître comme délinquante si elle advenait en deçà des termes et cadres normatifs du management. C’est ce que nous allons tenter d’analyser ici. * 12 On verra ainsi un salarié de start-up dont la non-reconduction de cdd sera légitimée par le fait q (...) 22Ce silence de l’émotion pose d’autant plus question que, paradoxalement, le terme est utilisé dans bon nombre d’entreprises en tant que condition quasi impérative. Un salarié se doit d’être épanoui, cela se posant comme garantie de son implication (en plus, nous pouvons le supposer, de la justesse du management)12. * 13 Il y a aujourd’hui glissement du langage de l’entreprise vers celui des milieux associatifs : « en (...) 23Le bonheur prendrait ici toute sa force de valeur à laquelle il faudrait, tout comme à l’entreprise, « adhérer »13. Rejeter les valeurs de la communauté d’entreprise peut alors revenir à s’en faire exclure ou à ne pouvoir s’y inclure, impératif vraisemblablement renforcé par l’organisation par projets qui impose à ses acteurs le partage des codes à des fins de coopération dans des temps limités. 24L’« enthousiasme », la « passion » paraissent ainsi devenir des valeurs dans la gamme de celles attendues pour l’« employabilité ». Ne demande-t-on pas ces « qualités » dans de nombreuses annonces de recrutement ? * 14 Les noms des entreprises ont été masqués. Le groupe xxx recherche pour ses équipes non seulement des profils expérimentés, ambitieux et passionnés par leur métier mais également des personnalités ouvertes à l’international et ayant une forte sensibilité aux jeux vidéo. […] Et si le crédit immobilier était avant tout affaire de passion ? Passion du travail en équipe, dans un esprit convivial et jeune, dynamique et enthousiaste. Chez xxx, société de yyy, laissez parler le talent qui vous anime. […] HÔTE/SSE D’ACCUEIL EN ENTREPRISE Votre enthousiasme, vos qualités de présentation et d’expression, votre maîtrise de l’anglais, votre capacité à prioriser et votre sens du service sont vos atouts pour vous épanouir dans cette fonction. Venez rejoindre nos équipes à temps partiel (matin/après-midi/ 1 jour par semaine) ou temps complet en occupant un poste proche de votre domicile. […] Responsable Gouvernance Informatique xxx s’impose comme un acteur incontournable en matière d’assurance vie, de retraite, de prévoyance et de placement. Sa volonté d’innovation permanente est garante d’une gamme de produits et de services très performants. Son état d’esprit, partagé par près de 4 400 collaborateurs présents sur plus de 30 pays, privilégie l’enthousiasme, l’initiative et la créativité14. 25La question du plaisir à travailler, d’un travail comme épanouissement de soi et de la transgression des rapports contraints traditionnels d’autorité et de pouvoir est centrale dans les entreprises bien au-delà des seules start-up de l’Internet et du multimédia. Il est à ce propos intéressant de noter que la période d’éclosion de la bulle Internet, qui voit reculer fortement le chômage dans les années 1998-2000 et parle le langage de la liberté et de la passion au travail, est aussi la période où des ouvrages sur la souffrance au travail rencontrent un large public (voir Dejours 2000 ; Hirigoyen 1998). * 15 Christian Baudelot et Michel Gollac ajoutent à ce propos : « Un métier intéressant est un métier q (...) 26Dans ces entreprises, la condition d’un salarié épanoui paraît devenir la constituante impérative d’un savoir-être coexistant au savoir-faire. Luc Boltanski et Ève Chiapello (2000) ont montré à travers leur étude des textes de management comment les émotions étaient aujourd’hui sollicitées par les entreprises à des fins de plus grande implication des personnes et ceci en héritage/recyclage d’aspirations générationnelles dites « artistes » nées autour de 1968, revendiquant notamment plus d’autonomie, de créativité et d’authenticité des rapports15. 27La question de l’affect est donc au croisement de revendications de salariés et de la possibilité d’un « engagement » de leur part pour l’entreprise. De fait, l’organisation par projet et en réseau exige rationnellement des capacités de communication, d’autonomie, de coopération voire d’entraide, qui sont autant de garanties du bon fonctionnement des processus de production. Les individus, fortement responsabilisés, intériorisent la contrainte et se trouvent doublement engagés, en tant que personnes et en tant que professionnels, en termes de compétences et en termes affectifs. 28Le deuxième facteur à prendre en compte est le traitement de la notion par les discours managériaux et des responsables des ressources humaines. Ceux-ci se caractérisent d’une part par l’inflation des termes dans les supports de communication interne, tissant une trame lexicale permanente du bien-être et du bonheur à être dans l’entreprise (voir, de plus, l’iconographie des journaux d’entreprise où tous les acteurs de l’entreprise se doivent de sourire). D’autre part ces termes sont dissous – sur le mode de « nous pouvons donc difficilement dissocier l’enthousiasme de la motivation » (Benoit 2005) – dans des processus indistincts mais cependant contrôlés de réalisation de soi par le travail mais surtout pour l’entreprise, convaincue – depuis les études des « relations humaines » et d’Elton Mayo dès les années 1920 (Mayo 1933) – qu’un salarié « motivé » par son travail et/ou son cadre de travail sera plus productif, présent, inventif, voire éventuellement souple sur d’autres points (durée de contrat, conditions salariales…) de son rapport à l’entreprise. Cela est flagrant dans les start-up où l’impression d’être dans « une grande famille », le 30 baby-foot dans l’entrée et les boissons offertes dans la cafétéria (entre autres) rendent, au moins momentanément, plus indolore l’occultation de données comme la durée des contrats, la rémunération, la visibilité sur son inscription dans de prochains projets, etc. 29En cela nous pourrions rejoindre François Jullien pour qui le bonheur, en ce qu’il est et en la façon dont il est défini, pourrait être un « choix idéologique majeur » (1994). * 16 Consulter à ce propos Mirashi 2003 ; Bonnet 1992 ; Guenin 2003 ; Benoit 2005 ; Thévenet 2001. 30Partant de cela, nous observons que du côté de l’entreprise, le bonheur semble principalement lié à la question de la motivation (ou aux notions connexes d’engagement et d’implication). L’intégralité des textes de conseil en management, communication ou ressources humaines exprime en effet la question du bonheur sous le seul prisme de la motivation16. Le psychologue Robert Francès en donne la définition suivante : « La motivation au travail est l’ensemble des aspirations qu’un travailleur attache à son emploi, chacune d’elles étant affectée d’un coefficient de probabilité qu’il conçoit de voir ses réalisations se réaliser dans l’emploi » (Francès 1995). 31Le bonheur en tant qu’aspiration universelle mais aussi comme tension deviendrait un choix idéologique majeur d’objet de motivation. Alors qu’il n’est pas traditionnellement lié au travail, deux facteurs tendent à en faire une question centrale pour l’entreprise aujourd’hui : sa congruence avec la motivation, son efficience dans les modes d’organisation contemporains. 32En effet, pour le consultant Maurice Thévenet, les bénéfices directs que l’on peut en attendre sont : « faire plus que ce qui est attendu, donner au travail une place prépondérante qui déborde sur le hors travail, faire autrement que ce qui est attendu, déplacer les frontières de l’emploi » (Thévenet 2001). Le travail dépasse alors le seul cadre de l’entreprise sous le biais d’un bonheur-motivation, apanage des passionnés, eux-mêmes héritiers des artistes, non tributaires d’un temps contraint pour leurs tâches professionnelles. 33Ainsi, pour Christophe Benoit, les motivations « extrinsèques » du travail que sont les primes, le cadre de travail, les félicitations ou les avantages en nature ne suffiraient pas, même si elles sont importantes. En effet, selon lui, la dimension prééminente de la motivation serait « intrinsèque » : « Cette motivation est personnelle et souvent confidentielle. Elle appartient à l’individu, elle est en lui. Cette motivation intrinsèque forge avec le temps nos différents talents notamment émotionnels. Elle est le siège de notre “pouvoir d’action” ou de notre “pouvoir d’immobilisme”. » 34L’émotion propre aux acteurs de l’entreprise devient un enjeu car elle est garante de la productivité et de l’autogestion, dont nous savons qu’ils sont des pivots majeurs de l’organisation d’un travail en réseaux et projets. Kjell Nordström et Jonas Ridderstrale, professeurs à la Stockholm School of Economics et auteurs du livre événement – pour la presse économique – Funky Business, déclarent ainsi à propos de la nouvelle économie : « La vraie compétitivité se construit sur une chose dont nous savons tous qu’elle existe, mais qui est rarement l’objet de discussions dans le business : l’émotion. » (Norström-Ridderstrale 2000.) 35De fait, le bonheur paraît être une « valeur » particulièrement performante car elle se situe au croisement des aspirations des salariés et du patronat. 36Pour autant il apparaît que l’acception du terme « bonheur » ne peut être réduite pour les salariés à la seule question de la motivation. Outre les représentations, les enjeux ne sont pas les mêmes : recyclage et légitimation de l’activité et du temps passé à l’exercer du côté des salariés, investissement des émotions par l’entreprise à des fins de contrôle et d’exploitation. 37Du côté des salariés des start-up que nous avons étudiées, il est intéressant de voir combien la satisfaction au travail semble même s’exprimer en partie par le déni du travail : sentiment d’effectuer un travail qui n’en est pas un, en raison d’une passion pour le jeu vidéo ou Internet, impression « d’être encore au lycée », de « voir ses potes tous les jours » ou de participer à « une grande famille », sentiment de liberté, « pouvoir dire à son patron qu’il a un tee-shirt sale », etc. contribuent au bien-être et facilitent le fait « d’être content d’aller travailler le matin ». 38D’une personne à l’autre, le déni du travail se module : reconversion du langage professionnel en langage du loisir et de l’intime pour certains, bénéfice de « l’ambiance » pour d’autres qui n’oublient pas que cela « peut servir à quelque chose », voire interrogation franche du « sens » de la finalité d’entreprises jouant du registre de l’épanouissement : * 17 Extraits d’entretiens conduits auprès de salariés de start-up entre 1998 et 2002. J’aime bien ce que je fais, donc ça me gêne pas de travailler longtemps, je me dis bon, ce soir je pars un peu plus tôt parce que j’ai des choses à faire. Je sais pertinemment qu’à 19 h 30 j’y serai encore et que je me dirai « ah, non, ah non, j’ai pas encore fini », parce que je n’arrive pas à décrocher, je suis dans mon truc. Donc vous avez des équipes qui vont complètement se motiver pour un produit en fonction de leurs attraits propres, il y en a un qui se dit moi ce projet vraiment je me l’accapare, je travaille sur ce projet et alors là nuit et jour, le weekend, parce que, encore une fois, on ne compte pas ses heures, on ne se rend même pas du tout compte. Il y avait même des personnes qui venaient me voir en me disant en fin de compte je suis trop payé, il faut moins me payer mais il faut l’investir, la diminution de mon salaire il faut l’investir dans le capital. J’ai l’impression qu’on provoque la création d’une certaine ambiance, d’un copinage, de relations personnelles, on instaure un esprit, on est tous des potes, on tutoie son chef mais c’est aussi allez sois sympa, tu peux bien me faire ça en plus. OK c’est très sympathique la grande famille mais je crois qu’il faut quand même des structures et il faut absolument arrêter ce côté grande famille, on s’éclate, on est là pour s’amuser. Une société c’est là pour faire de l’argent, pour être rentable, effectivement quand on est passionné, moi je suis passionné par ce que je fais, je suis là aussi pour faire gagner un peu d’argent à la société pour qu’on puisse me payer parce que si la société ne gagne pas d’argent, je ne vois pas comment je peux être payé17. * 18 La liberté sera définie par les salariés usant de ce terme sous les aspects de « venir travailler (...) 39La limite en est que le travail présenté en tant que passion/loisir est pourtant bien du travail. Que la créativité et la liberté trouvent rapidement leurs freins18. Ce qui relèverait du loisir (une activité qui ne serait en effet pas du travail) est dans les entreprises soit proscrit et pourchassé car délinquant (l’usage des outils professionnels à des fins personnelles pouvant être sanctionné par un licenciement), soit encadré ainsi que le fait Google qui permet à ses développeurs et ingénieurs – c’est-à-dire une population ciblée – de consacrer 20 % de leur temps à des recherches personnelles. Outre la « motivation », plusieurs bénéfices directs en découlent : un travail plus rapide pour dégager le temps ainsi « donné », « la production d’idées nouvelles intégrables dans l’offre » et « comme un mécanisme particulièrement subtil de contrôle de l’activité ». « Chez Google, on leur demande aussi, et surtout, de dire en quelques lignes (pas plus de quatre ou cinq) ce à quoi ils ont occupé leur temps la semaine précédente. Ce qui incite tout à la fois à partager ses projets et à avancer : le salarié qui répéterait trop longtemps la même phrase révélerait vite qu’il a des problèmes. » (Girard 2006.) 40Bonheur de l’entrepreneur et bonheur du salarié ne paraissent remettre en cause ni la nature du travail (ce que l’on dénie est rarement ce qui nous épanouit) ni celle des rapports entre l’entreprise et ceux qu’elle emploie. L’apparent consensus sur la nécessité du bonheur au travail ne semble permis que par un quiproquo tant ce que ce terme recouvre est dissonant entre organisation et acteurs. À la dimension régulatrice de la « valeur bonheur » (et l’exigence implicite d’adhésion à l’organisation dont elle est porteuse) ne correspond en effet que peu le déni du travail et de ses cadres que le sujet opère en se saisissant des signifiants « bonheur », « épanouissement », « passion » ou encore « enthousiasme » fournis par la structure (quelle serait son image s’il ne l’était pas ? pathétique ? suspect ?) comme boucliers à la contrainte. Nous pouvons supposer que le succès managérial du terme réside dans le fait précis qu’il est l’accessoire efficace – car normatif – donné aux acteurs du travail dans leur revendication de transgression… des normes. 41Aussi semble-t-il politiquement important, ainsi que l’écrit François Jullien, de « laver la question du bonheur de l’unanimité facile qui la recouvre » (Jullien 1994) et cela par-delà les fanions d’une entreprise réconciliant employés et capital. Bibliographie Références bibliographiques Aubert, Nicole. 2003. Le culte de l’urgence, Paris, Flammarion. Baudelot, Christian & Michel Gollac. 2003. Travailler pour être heureux ? Le bonheur et le travail en France, Paris, Fayard. Benoit, Christophe. 2005. Motivez par l’enthousiasme, Paris, Éditions d’Organisation. Boltanski, Luc & Ève Chiapello. 2000. Le nouvel esprit du capitalisme, Paris, Gallimard. Bonnet, Yannick. 1992. Être heureux au travail, Paris, Éditions Droguet et Ardant Comte-Sponville, André. 2000. Article « Bonheur », in Dictionnaire de la philosophie, Paris, Albin Michel, coll. « Encyclopedia Universalis ». Dejours, Christophe. 2000. La souffrance en France, Paris, Éditions du Seuil. Ehrenberg, Alain. 1991. Le culte de la performance, Paris, Calmann-Lévy, coll. « Essai société ». Francès, Robert. 1995. Motivation et efficience au travail, Wavre, Mardaga. Girard, Bernard. 2006. Une révolution du management : le modèle Google, Paris, MM2 Éditions. Guenin,Vanessa. 2003. Heureux au travail c’est possible ! Les solutions qui marchent !, Paris, Éditions Prat, coll. « Développement personnel ». Hirigoyen, Marie-France. 1998. Le harcèlement moral, Paris, Syros. Jeantet, Aurélie & Emmanuelle Savignac. 2008. « Les représentations sociales du travail dans les séries de divertissement : le travail comme ressort du loisir », communication au colloque international Film et travail (Université de Provence - Aix-en-Provence 21-24 novembre 2007), actes à paraître aux Éditions des Presses universitaires de Provence. Jullien, François. 1994. « D’où nous vient la question du bonheur ? », in Droit Roger-Pol (dir.), Où est le bonheur ?, actes du cinquième forum Le Monde - Le Mans, Paris, Le Monde Éditions. Macé, Éric. 2006. La société et son double, Paris, Armand Colin. Mayo, Elton, The Human Problems of an Industrialised Civilisation, New York, Macmillan, 1933. Mirashi, Robert (dir.). 2003. Le bonheur d’entreprendre, Paris, Polynôme Nordström, Kjell & Jonas Ridderstrale. 2000. Funky Business, Paris, Village mondial. Ricœur, Paul. 1994. « Le bonheur hors lieu », in Droit Roger-Pol (dir.), Où est le bonheur ?, actes du cinquième forum Le Monde - Le Mans, Paris, Le Monde Éditions. Savignac, Emmanuelle &Anne-Marie Waser. 2003. Start-up : les rois éphémères, Paris, Descartes & Cie. Thévenet, Maurice. 2004. Le plaisir de travailler, Paris, Éditions d’Organisation, coll. « Institut Manpower ». Ressources électroniques http://www.jaimemaboite.com www.medef.fr Notes 1 Travail dériverait de tripalium, instrument à trois pieux servant à ferrer les chevaux rétifs. 2 Du travail, activité des hommes asservis dans la Grèce antique, au fronton d’Auschwitz : « Le travail rend libre ». Michel Gollac et Christian Baudelot (2003) notent que « le thème de la joie au travail a beaucoup servi aux idéologies prônant la collaboration de classes. Il a été repris de façon volontariste et moralisante par le nazisme en Allemagne, le gouvernement de Vichy en France et le régime soviétique ». 3 Le medef, Mouvement des entreprises de France, représente plus de 700 000 entreprises en France et 600 syndicats professionnels ce qui fait de lui le plus gros « réseau professionnel » de France. Outre « promouvoir » l’esprit d’entreprise, l’une de ses principales missions est d’être le porte-parole des intérêts des entrepreneurs. Le medef, fait souligné par sa récente signature communicationnelle : « L’entreprise c’est la vie », tient un discours qui aujourd’hui dépasse les seules dimensions organisationnelles et économiques pour venir sur le terrain de la subjectivité des acteurs du travail. Les intitulés de certains de ses séminaires et groupes de réflexion placent l’expérience subjective au cœur de ses préoccupations. Ainsi en sera-t-il de l’atelier intitulé « Le bonheur au travail », lui même s’insérant dans l’université d’été : « Réenchanter le monde ». 4 Publicis consultants : « réseau d’agences de conseil en communication stratégique et de conseil aux sociétés, marques et institutions ». 5 Souligné par les auteurs du texte. Rubrique « Pourquoi ? » du site consacré à la fête des entreprises http://www.jaimemaboite.com 6 Par conséquent, deux séries de travaux alimentent la présente réflexion sous ses aspects de subjectivité des acteurs mais aussi de discursivité des entreprises : un terrain ethnographique sur les start-up de l’Internet et du multimédia, mené de 1998 à 2002 avec Anne-Marie Waser (sociologue, Centre d’étude de l’emploi) et une recherche, en cours depuis début 2007, sur les représentations du travail et de l’entreprise (dans les fictions, la communication des entreprises, les documents pédagogiques, les discours politiques…), conduite en collaboration avec Aurélie Jeantet (sociologue, iresco-cnrs). 7 Soit un bonheur tel qu’il s’actualiserait pour le travailleur ; un « réel » subjectif et émotionnel. 8 Toutes choses relatives lorsqu’on lit : « Il [le bonheur] est le désirable absolu, qui vaut par soi seul, la satisfaction ultime vers quoi toutes les satisfactions tendent, le plaisir complet sans lequel tout plaisir est incomplet » (Comte-Sponville 2000). Si Aristote, dans son Éthique à Nicomaque, avance que l’homme recherche le bonheur en tant que fin « parfaite », il dit aussi que « en ce qui concerne la nature du bonheur, on ne s’entend plus ». 9 Marc Augé en fait état lors d’un forum du quotidien Le Monde consacré au bonheur en 1994 : « Comme le disait déjà Stendhal, les gens heureux n’ont pas d’histoire : les histoires, les histoires de vie, les confessions, s’originent dans les malheurs, petits ou grands de leurs protagonistes. » Notre terrain n’a pas été exempt de cela : ce qui se dit est plus spontanément la douleur, la difficulté ou la contrainte. 10 Dans les entretiens non directifs réalisés lors de notre étude des start-up auprès d’une centaine de salariés, il est frappant de constater que ni le mot « bonheur » ni le qualificatif « heureux » n’apparaissent une seule fois. Rares sont quant à elles les occurrences des termes et dérivés de « satisfaction » ou « épanouissement ». Les qualificatifs « passion » et « motivation/démotivation » apparaissent en revanche dans les entretiens, de manière coïncidente avec leur fort usage dans les discours rh et managériaux de ces entreprises. 11 Université d’été du medef 2005, « Réenchanter le monde », 29-30-31 août, campus hec de Jouy-en-Josas, synthèses des ateliers « Dynamique de croissance » : le bonheur au travail. Synthèse en ligne à l’adresse : http://www.medef-44.fr/main/core.php ?pag_id = 39942 12 On verra ainsi un salarié de start-up dont la non-reconduction de cdd sera légitimée par le fait qu’il n’est « pas assez bien dans son travail », qu’on voit bien que « ça ne lui plaît pas » et que par conséquent « ça ne va pas pouvoir marcher ». 13 Il y a aujourd’hui glissement du langage de l’entreprise vers celui des milieux associatifs : « engagement », « adhésion » deviennent des termes forts de la communication interne comme externe des organisations. 14 Les noms des entreprises ont été masqués. 15 Christian Baudelot et Michel Gollac ajoutent à ce propos : « Un métier intéressant est un métier qui excite, qui stimule, et permet à celles et ceux qui l’exercent de créer, d’innover, de se réaliser, voire de « s’éclater », etc. On touche là au bonheur de l’artiste ou de l’écrivain. » 16 Consulter à ce propos Mirashi 2003 ; Bonnet 1992 ; Guenin 2003 ; Benoit 2005 ; Thévenet 2001. 17 Extraits d’entretiens conduits auprès de salariés de start-up entre 1998 et 2002. 18 La liberté sera définie par les salariés usant de ce terme sous les aspects de « venir travailler en jean », « tutoyer son patron », « se lever tard le matin » (mais partir tard aussi), « écouter la musique que j’aime », ce qui, toutes proportions gardées est une liberté contrôlée… La liberté de parole, d’action et de transgression des règles par conséquent implicites sera sanctionnée. Auteur Emmanuelle Savignac © Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2009 Conditions d’utilisation : http://www.openedition.org/6540 Du bonheur à l’être heureux Petits arrangements avec le bonheur Lire Accès ouvert Mode lecture ePub PDF du livre PDF du chapitre Freemium BSB Offert par Bibliothèque Sainte-Barbe - Université Sorbonne Nouvelle Paris 3 Le bonheur au travail : entre idéologies managériales et aspirations des acteurs Ethnologie des gens heureux Salomé Berthon, Sabine Chatelain, Marie-Noëlle Ottavi et al. (dir.) … Vous pouvez suggérer l'acquisition de la version électronique de ce livre à Bibliothèque Sainte-Barbe - Université Sorbonne Nouvelle Paris 3 en utilisant le formulaire ci-dessous. Merci, nous transmettrons rapidement votre demande à votre bibliothèque. 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Savignac, E. 2009. Le bonheur au travail : entre idéologies managériales et aspirations des acteurs. In Berthon, S., Chatelain, S., Ottavi, M., & Wathelet, O. (Eds.), Ethnologie des gens heureux. Éditions de la Maison des sciences de l’homme. doi :10.4000/books.editionsmsh.3447 Savignac, Emmanuelle. “Le bonheur au travail : entre idéologies managériales et aspirations des acteurs”. Berthon, Salomé, et al.. Ethnologie des gens heureux. Paris : Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2009. (pp. 23-35) Web. . Référence électronique du livre Format OpenEdition APA MLA BERTHON, Salomé (dir.) ; et al. Ethnologie des gens heureux. Nouvelle édition [en ligne]. Paris : Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2009 (généré le 21 décembre 2018). Disponible sur Internet : . ISBN : 9782735118830. Berthon, S., Chatelain, S., Ottavi, M., & Wathelet, O. (Eds.) 2009. Ethnologie des gens heureux. Éditions de la Maison des sciences de l’homme. Tiré de http://books.openedition.org/editionsmsh/3433 Berthon, Salomé, et al., ed. Ethnologie des gens heureux. Paris : Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2009. Web. . Compatible avec Zotero Le bonheur au travail : entre idéologies managériales et aspirations des acteurs Ethnologie des gens heureux Salomé Berthon, Sabine Chatelain, Marie-Noëlle Ottavi et al. (dir.) … Le bonheur au travail : entre idéologies managériales et aspirations des acteurs Emmanuelle Savignac Partager Partager l’URL Partager par courrier Intégrer URL : http://books.openedi TwitterFacebookGoogle + Merci, votre message a été envoyé. 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