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L’avortement selon Simone Veil

L’avortement selon Simone Veil
Photo AFP

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Des féministes des quatre coins du monde ont salué la mémoire de la politicienne française Simone Veil, décédée le 30 juin dernier à l’âge de 89 ans.

Cette femme exceptionnelle, qui a survécu à Auschwitz où elle a été internée, a lutté bec et ongles pendant des années pour légaliser l’avortement en France.

EN DERNIER RECOURS

Mais les féministes qui pleurent sa disparition ont-elles vraiment lu le discours historique que madame Veil a prononcé devant le Sénat français le 26 novembre 1974 ?

J’en doute.

Car si elles l’avaient vraiment lu, elles se seraient rendu compte que la conception de l’avortement défendue par madame Veil différait grandement de celle qui est aujourd’hui défendue par la plupart des féministes nord-américaines.

Premièrement, Simone Veil était très claire : pour elle, l’avortement était un acte grave qui ne devait être utilisé qu’en dernier recours.

Deuxièmement, le père (s’il était dans le portrait et s’il n’avait pas violé la mère) devait être consulté.

« La décision de l’interruption de grossesse ne devrait pas être prise par la femme seule, mais aussi par son mari ou son compagnon. Je souhaite qu’il en soit toujours ainsi... »

Troisièmement, Simone Veil voulait que la femme qui désirait se faire avorter puisse être informée des autres possibilités : c’est-à-dire accoucher dans l’anonymat et donner son enfant en adoption.

« Je souhaite que les organismes spécialisés pour aider les jeunes femmes en difficulté puissent continuer à les accueillir et à leur apporter l’aide susceptible de les inciter à renoncer à leur projet. »

« Diverses consultations devraient conduire la femme désirant se faire avorter à mesurer toute la gravité de la décision qu’elle se propose de prendre... »

« Le médecin pourrait aussi la sensibiliser au problème de la contraception. »

PAS APRÈS 10 SEMAINES

Aujourd’hui, les féministes déchireraient leur blouse et grimperaient dans les rideaux si elles apprenaient que des organismes pouvaient présenter « d’autres alternatives » aux femmes qui souhaitent se faire avorter.

Mais pour Simone Veil, ça tombait sous le sens. Une femme devait être au courant de TOUTES les options avant de prendre SA décision.

Qu’y a-t-il de mal à ça ?

Finalement, madame Veil était contre — farouchement contre — l’avortement tardif.

« L’interruption de grossesse ne peut être que précoce, parce que ses risques physiques et psychiques, qui ne sont jamais nuls, deviennent trop sérieux après la fin de la dixième semaine qui suit la conception pour que l’on permette aux femmes de s’y exposer. »

Or, actuellement, la loi canadienne n’impose aucune restriction à l’avortement, qui est légal pendant les neuf mois de la grossesse jusqu’à la naissance.

Légalement, vous pouvez vous faire avorter la veille de votre accouchement, si vous le voulez !

Cette loi, j’en suis sûr, ferait horreur à Simone Veil, qui faisait la différence entre un amas de cellules, un embryon, un fœtus et un enfant viable.

(Ce qui, entre vous et moi, tombe aussi sous le sens.)

UN ACTE EXCEPTIONNEL

Simone Veil disait aussi que « l’interruption de grossesse, lorsqu’elle n’est pas thérapeutique, n’a pas à être prise en charge par l’État, afin de souligner la gravité d’un acte qui doit rester exceptionnel ».

« La société devrait tolérer l’avortement, disait-elle, mais pas l’encourager. »