Alstom Belfort : le récit des trente jours qui ont ébranlé le fabricant de TGV

Entre les négociations houleuses à Bercy, les rappels à l’ordre de l’Elysée et les couacs de communication de la direction du groupe… Retour sur le feuilleton industriel de cette rentrée.

Par Publié le 04 octobre 2016 à 10h44 - Mis à jour le 05 octobre 2016 à 08h54

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Fabrication d’un TGV dans l’usine Alstom de La Rochelle, en août.
Fabrication d’un TGV dans l’usine Alstom de La Rochelle, en août. REGIS DUVIGNAU/REUTERS

Alstom Belfort vivra. A l’issue d’une ultime réunion de travail, le secrétaire d’Etat à l’industrie, Christophe Sirugue, et le PDG d’Alstom, Henri Poupart-Lafarge, devaient annoncer, mardi 4 octobre au matin, aux élus locaux et aux organisations syndicales, la commande de 21 TGV, dont quinze directement par l’Etat. De quoi maintenir l’activité ferroviaire au moins jusqu’en 2020-2021 et ainsi faire la jonction avec les premières commandes du TGV du futur, codéveloppé avec la SNCF.

Ce dénouement intervient après plus de trois semaines de rebondissements, de récupération politique, de crispations entre Bercy et la direction du fabricant de TGV, et d’angoisses des « Alsthommes ». Retour en trois actes sur le feuilleton industriel de cette rentrée.

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Acte I, la journée des dupes

Ce mercredi 7 septembre, la journée s’annonce idéale. A deux pas de la tour Montparnasse, toute la presse économique est conviée pour une grande nouvelle : Alstom et la SNCF vont codévelopper la prochaine génération du TGV. Au cours de la présentation les diapos défilent. Grâce à ce nouveau projet, tous les sites d’Alstom, notamment celui de Belfort, retrouveront à partir de 2021 de la charge de travail, y apprend-on.

Quelques heures plus tard, changement d’ambiance. A Belfort, la direction du site reçoit par groupe de cinquante salariés les 480 personnes de l’usine pour leur annoncer le transfert d’ici à la fin 2018 de la fabrication des locomotives et des motrices de TGV vers Reichshoffen (Bas-Rhin). Après presque cent quarante ans de production de « locos », le site s’apprête à se concentrer sur la seule maintenance, qui doit conserver 80 à 100 salariés. Seule consolation, aucun plan social n’est annoncé.

La concomitance entre ces deux annonces passe mal. « Le 7 au matin, nous avons informé le comité préparatoire du forum européen des syndicats d’Alstom du projet de transfert de Belfort. Nous ne pouvions pas modifier la date, qui se télescopait avec l’annonce sur le TGV du futur », regrette Jean-Baptiste Eyméoud, patron d’Alstom en France. Une fois dans les mains des syndicats, l’information allait fuiter. La direction préfère donc prévenir les salariés de l’usine dans la foulée. Au même moment, les élus sont avertis par téléphone.

Tous dénoncent la brutalité de l’annonce, voire sa roublardise. Henri Poupart-Lafarge sacrifierait Belfort afin de faire pression sur l’Etat pour remporter les futurs appels d’offres à venir : sans commandes, les usines devront fermer… « Quand il a vu les réactions, il en est tombé de sa chaise. Il se donne deux ans pour préparer le transfert de la production d’un site vers un autre, le tout sans plan social. Et on l’accuse de brutalité, de précipitation et de basse manipulation ! » s’insurge un proche.

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