Le TGV Renzi à l’arrêt dans une remise de diligences

Par Philippe Ridet Publié le 16 février 2014 à 18h20

Temps de Lecture 2 min.

Les rites immuables de la démocratie parlementaire italienne ont repris leurs droits. La crise éclair décidée et conduite par le secrétaire du Parti démocrate (gauche), Matteo Renzi et conclue vendredi en sa faveur par la démission du président du conseil Enrico Letta, avait fait espérer une suite tout aussi rapide. Mais l’étoile montante de la politique italienne aura attendu lundi 17 février à 12 h  pour recevoir du président de la République la charge de composer le nouveau gouvernement et quelques jours encore pour le présenter et obtenir la confiance du Parlement. Bref c’est un peu comme si le TGV annoncé était à l’arrêt dans une remise de diligences.

Il trouve face à lui les habituels veto croisés des partis qu’il souhaite enrôler dans sa coalition. Le parti Gauche, écologie et liberté (SEL, gauche radicale) de Nichi Vendola ne veut pas entrer dans un gouvernement Renzi aux côtés du Nouveau Centre droit (NCD) d’Angelino Alfano. De son côté, ce dernier ne veut pas entendre parler de SEL. Se sachant indispensables pour garantir une majorité au Sénat, M. Alfano et les siens réclament davantage de ministères que dans le précédent gouvernement. Ils menacent de retirer leur soutien au cas où le programme  de M. Renzi dont ils veulent discuter au moins « pendant 48 heures » serait trop orienté à gauche. Cela augure mal des quelques réformes de société que le maire de Florence voudrait porter à terme : contrat d’union civile, réforme du jus soli (droit du sol), etc.

Au sein du PD, l’aile gauche minoritaire s’agite et fait aussi monter les enchères afin que le programme du futur premier ministre porte la marque de son influence. Dans le cas contraire, annonce déjà son chef de file, « une dizaine de voix de sénateurs pourrait faire défaut lors du vote d’investiture ». Seul Silvio Berlusconi a l’air ravi. Exclu du Parlement, condamné à une peine de prison ferme pour fraude fiscale et toujours poursuivi à Milan (affaire Ruby) et Naples (corruption d’élus), il a guidé samedi son parti Forza Italia, lors des consultations au Palais du Quirinal… Matteo Renzi, avec qui il a conclu un pacte pour réformer le mode de scrutin électoral, lui plaît de plus en plus : « Il n’est pas communiste. »

Mais M. Renzi ne voulait pas seulement aller vite, il voulait aussi frapper les esprits en présentant une « dream team » de ministres qui marque une rupture avec l’équipe précédente. Contacté pour devenir ministre de l’industrie, Andrea Guerra, le directeur général de Luxottica (leader mondial de la fabrication et la distribution de montures de lunettes) a dit « non ». De même que l’écrivain de best-sellers Alessandro Baricco pour la culture. L'auteur de Soie veut bien « donner des conseils » mais ne se sent pas la force d’être ministre. Enfin l’idée de placer aux finances une experte du gabarit de Lucrezia Reichlin (ex-BCE, professeure à la London Business School) semble avoir fait long feu au profit d’un poids lourd politique plus traditionnel capable de tenir tête à Bruxelles.

Les deux acteurs principaux de cette « crise de palais » vivent désormais sur deux planètes séparées. Enrico Letta a été vu samedi matin alors qu'il entrait dans une église de Rome pour s'y recueillir. Le soir, Matteo Renzi, lors de sa dernière sortie publique en tant que maire de Florence, assistait au match de la Fiorentina perdu  à domicile contre l’Inter de Milan (1-2).  Impossible de savoir s'il y a un lien de cause à effet entre les deux événements.

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