Je suis entrée au lycée en 1992, à l’époque où les taux de grossesse et de natalité chez les adolescentes étaient à leur plus haut niveau. L’âge médian auquel les adolescents commençaient leur vie sexuelle – 16,9 ans – était au plus bas. Les femmes nées en 1978, année de ma naissance, ont un drôle de privilège : leur vie sexuelle a commencé plus tôt que n’importe quel autre groupe depuis.

Mais au fil des années 1990, le nombre de mères adolescentes a progressivement baissé, ce qui a réjoui tout le monde, même si les spécialistes n’arrivaient pas à s’accorder sur les raisons de cette évolution.

Les défenseurs de la contraception ont bien sûr fait valoir cet argument. Certes, les ados s’en sortaient mieux avec les contraceptifs, mais pas assez pour expliquer ce changement. Les groupes chrétiens favorables à la chasteté et les défenseurs d’une éducation sexuelle préconisant uniquement l’abstinence ont aussi voulu s’attribuer le mérite de ces baisses. Mais le taux de natalité chez les adolescentes chutait même dans les endroits où les cours d’éducation sexuelle ne prônaient pas l’abstinence. Depuis, des travaux de recherche ont montré que la défense de l’abstinence, tout comme les pactes de virginité, ne se traduit pas par l’absence de relations sexuelles.

Panique morale

La tendance s’est poursuivie : chaque nouvelle vague d’ados a eu des rapports sexuels un peu plus tard, et le taux de grossesse a continué de baisser petit à petit. On ne s’en serait jamais douté, au vu de la panique morale autour des périls des histoires sans lendemain, qui a pris de l’ampleur à partir de la fin des années 1990.

Depuis, les gens surestiment le nombre d’histoires de cul qu’ont les lycéens et les étudiants. Ces dernières années, un certain nombre d’études et de livres ont commencé à rétablir la vérité. L’un des plus réfléchis est American Hookup : The New Culture of Sex on Campus [“Histoires de cul à l’américaine : nouvelle culture du sexe sur les campus”, inédit en français] de Lisa Wade, professeure de sociologie à l’Occidental College de Los Angeles. L’ouvrage s’appuie sur des journaux intimes rédigés par des

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Kate Julian
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