Zep revient avec «Happy Sex 2» : «La sexualité, c’est la cour de récré des grands»

Le papa de «Titeuf» est de retour en librairie au rayon adulte, avec un hilarant «Happy Sex 2». Nous l’avons rencontré pour un entretien sans tabou ni complexe.

 « Il y a une plus grande liberté de parole sur le sexe aujourd’hui, mais ça reste un sujet tabou », regrette Zep.
« Il y a une plus grande liberté de parole sur le sexe aujourd’hui, mais ça reste un sujet tabou », regrette Zep. LP/Philippe Lavieille

Titeuf, à n'en pas douter, adorerait le piquer dans la bibliothèque de ses parents… Dix ans après un premier volume, Zep, 51 ans, se lâche à nouveau avec « Happy Sex 2 ». Soixante pages de gags hilarants, parfois totalement réservées aux adultes. Le dessinateur glisse à nouveau son œil dans le trou de la serrure, pour s'amuser des secrets de nos galipettes et de cette tendance à vouloir transformer notre vie sexuelle en remake, pas toujours réussi, de films porno… C'est cru, cruel parfois, mais tellement drôle. Car pour Zep, comme il nous le confie, la sexualité doit rester un grand terrain de jeux.

Dix ans sans « Happy Sex », ce n'était pas trop long ?

ZEP. Si, un peu dur (sourire…). En fait, je n'avais pas du tout prévu de faire un tome 2. Et puis en tombant sur des vieux story-boards, non retenus pour le premier, j'ai eu envie de recommencer. De faire une sorte d'état des lieux de la sexualité dix ans après. Les idées sont venues très vite.

Qu'est-ce qui a changé justement ?

Mécaniquement, pas grand-chose… Sinon il y a eu quand même pas mal de nouveautés : la façon de se rencontrer avec les réseaux sociaux ; la démocratisation des sex-toys ; le côté plus conso du sexe ; #MeToo aussi avec l'envie d'une sexualité plus égalitaire et l'arrivée d'un discours plus assumé autour de l'orgasme féminin…

Vous avez l'impression que ça a vraiment évolué sur le fond ?

Je crois qu'il y a une plus grande liberté de parole sur le sexe aujourd'hui. Mais dans le fond, ça reste un sujet tabou. Même dans le couple. On peut dire à son partenaire qu'on voudrait qu'il range ses chaussettes. Mais pas ce qu'on aimerait qu'il nous fasse au lit. Alors que la sexualité, c'est la cour de récré des grands. On peut faire ce qu'on veut. À condition que ce soit assumé et partagé.

Beaucoup de vos gags tirent leur inspiration du porno…

Oui, parce qu'il faut en rire. Le porno, c'est une vision théâtralisée de la sexualité qui est au final infantilisante. Tout le monde a envie de savoir comment ça marche. Mais les réponses apportées par le X sont fausses. Il y a combien d'ados qui pensent que pour faire jouir une fille, il faut lui éjaculer sur le visage ? Alors que l'entente sexuelle, ça prend du temps. Il y a des ratages, il faut connaître sa partenaire… Et ce n'est pas parce qu'on s'aime que cela marche forcément.

Vous n'aimez pas le X ?

Je ne le fréquente plus beaucoup… Je m'y suis un peu replongé pour les besoins du bouquin. Mais ce qu'on voit sur Internet, ces séquences de plus en plus courtes, ça ne m'amuse pas vraiment. Moi, j'aime les films avec des histoires…

Et les sex-toys ?

Ça m'a amusé un temps. C'était rigolo d'essayer. Les trucs connectés, ça ne marche jamais. Remarque, je ne suis pas hyperdoué en techno. Même avec mon ordinateur, j'ai du mal…

Vous vous êtes fixé des limites en dessinant « Happy Sex » ?

Non. Je dessine beaucoup de planches et après je teste auprès de mes amis. Je garde celles qui les font le plus marrer. Je n'ai pas d'interdit. Après, c'est indiqué clairement sur la couverture que c'est réservé aux adultes. Les gens savent normalement à quoi s'attendre…

Vos enfants sont mineurs. Est-ce que vous leur parlez de la sexualité et du porno ?

Oui, bien sûr. Pour « Happy Sex », je leur ai expliqué qu'ils pourront le lire quand ils seront plus grands. Ensuite, c'est vrai que les enfants sont de plus en plus vite en contact avec le porno… Souvent, j'ai remarqué que ça les faisait plutôt marrer. Moi, je préfère ne pas prendre cela avec trop de gravité. Il faut désacraliser. Sinon, on peut créer beaucoup de peurs tout à fait inutiles.

Le sexe, ce n'est pas sérieux finalement ?

Non, pas tellement. En tout cas, c'est souvent pris trop au sérieux. C'est quand même un domaine où on est d'abord censé s'amuser et prendre du plaisir.

« Happy Sex 2 », Ed. Delcourt, 60 p., 17,50 euros./DR
« Happy Sex 2 », Ed. Delcourt, 60 p., 17,50 euros./DR