* I. Doctoriales XIV * | * L’univers des « chinoiseries » Loxias -- Zhe Fan : L’univers des « chinoiseries » Version HTML Signaler cette Page Version pdf -- en raffolaient il y a un siècle. Au XIX^e siècle, en effet, le made in China de la langue commerciale porte un autre nom, celui de la jolie « chinoiserie », dont la définition brouille les frontières géographiques, théoriques et pose la question de son mode de production, de sa valeur. Le plus étonnant reste son omniprésence dans -- Index Mots-clés : art moderne , chinoiseries, littérature française Chronologique : XIXe siècle -- Plan * I. Les chinoiseries, vestiges luxueux d’une époque révolue * II. Les chinoiseries, matériaux poétiques et actuels du quotidien * III. Les chinoiseries : œuvres d’art ou d’artisanat ? * IV. Les chinoiseries, sources et objets de réflexion sur l’art moderne * Conclusion -- aujourd’hui en raffolaient il y a deux siècles. Au XIX^e siècle, en effet, le made in China de la langue commerciale porte un autre nom, celui de la jolie « chinoiserie », dont la définition – « objet de luxe et de fantaisie, venu de Chine ou exécuté en Occident dans un goût s’inspirant de la Chine ; décor, œuvre d’art, motif de ce style^1 » – -- réflexion profonde sur sa conception moderne. I. Les chinoiseries, vestiges luxueux d’une époque révolue 3L’une des premières évocations d’objets de Chine au début du XIX^e -- Renaissance^2 ». Cependant, cette mise en scène de la « Renaissance » par Esquiros laisse déjà apparaître en arrière-plan quelques chinoiseries. Dans le chapitre intitulé « Les noces d’Adelbert et de Phoebé », les vases de porcelaine contribuent au luxe et à la beauté de la pièce : « De grands vases de Chine laissaient épanouir de larges -- royaux, on voit que le roi s’adresse à sa belle-fille avec respect : il la « priait de se donner la peine » de les ouvrir. Instruite, la Dauphine sait très bien la valeur de ces chinoiseries : elle en choisit certaines, qui feront partie désormais des trésors du premier salon de France. L’énumération des objets chinois dont jouit Madame la Dauphine -- écrivains du XIX^e siècle pour renouveler leur art. II. Les chinoiseries, matériaux poétiques et actuels du quotidien 11Les objets venus de Chine ne sont pas condamnés à rester des bibelots -- sinophile, Théophile Gautier, met en scène dans un poème datant de 1838 une Chine imaginaire où une jeune fille, muse idéale du poète, devient le fin objet de sa rêverie. Le titre « chinoiserie » prépare l’énonciation de ce goût chinois en convoquant l’image d’un objet de luxe venu de l’Empire du Milieu. Cependant pour Gautier, le bibelot se -- Grimm, mais dans une version chinoise plus luxueuse. Après avoir vu cette scène fantaisiste, le lecteur est conquis ; cette poésie est bien une œuvre aussi ciselée qu’un objet de Chine, une chinoiserie. 14Les chinoiseries font depuis longtemps partie de la vie quotidienne des hautes sphères de l’élite sociale française. Ces accessoires de luxe confinés aux palais et aux salons de riches aristocrates parisiens vont pourtant étendre au XIX^e siècle leur champ d’action et vont progressivement atteindre les tranquilles provinces de l’Hexagone. Les chinoiseries contribuent aussi à donner une facture moderne, ancrée dans le réel. George Sand redéfinit leurs conditions d’appartenance : ces objets ne sont plus réservés aux personnages historiques de haute -- permet aux soldats de remporter leurs trophées : des objets impériaux issus du sac du Palais d’été. La Chine idéalisée n’est plus qu’un lointain rêve. Ces chinoiseries posent question quant à leur valeur artistique. III. Les chinoiseries : œuvres d’art ou d’artisanat ? 21Bien que les objets en provenance – ou imités – de Chine se soient -- porcelaines de Chine^37. 28Un autre stéréotype concernant ces chinoiseries est leur association immédiate au XIX^e siècle à la notion d’exotisme, renvoyant à un ailleurs à la fois étrange et fascinant. Dans Le Comte de Monte-Cristo -- devienne la vérité devant de pareilles considérations^39 ? 29Ainsi, les chinoiseries dans la littérature française du XIX^e siècle, soit par leur qualité de travail, soit par l’anecdote merveilleuse qui accompagne leur création, sont considérées comme des -- entre artisanat et art et invitent les artistes et les esthètes à se pencher sur des notions complexes en cours de distinction au XIX^e siècle. Ces chinoiseries exotiques alimentent une réflexion sur l’art moderne. IV. Les chinoiseries, sources et objets de réflexion sur l’art moderne 30À mesure qu’apparaissent dans la vie quotidienne des Français les -- visée plus érudite ; collections sélectives d’objets d’art ; compositions décoratives fondées sur le seul goût personnel […]^41 ». Parmi elles, la collection de chinoiseries figure en bonne place. Cependant, il faut souligner que ces mêmes objets de Chine sont regardés différemment selon qu’ils soient observés par des -- qui n’ont pas les moyens de voyager ou aux novices de découvrir rapidement une Chine mi-réelle, mi-imaginaire, à travers l’univers des chinoiseries, d’élargir leur connaissance de l’altérité et de former leur goût pour l’art chinois. Car selon Théophile Gautier, « cette merveilleuse collection » a le mérite de réduire les distances -- catégorie d’art spécifique, décrits et envisagés systématiquement comme objets de recherche sollicitant une réflexion complexe : l’art chinois. Comment les chinoiseries décrites par Théophile Gautier et les descriptions d’exposition permettent-elle de donner une définition de l’« art chinois » pour les contemporains et, à plus long terme, de -- quelques Anglais, qui alimente un article paru dans La Presse le 25 juin 1849. En 1855, vingt ans après la parution de sa poésie de jeunesse « Chinoiserie » dans le recueil Poésies diverses, Théophile Gautier s’émerveille devant la collection chinoise de Charles de Montigny, ouverte au public durant l’Exposition universelle. -- tout au long du compte rendu de Gautier. Mais en parcourant la collection des bronzes chinois, le critique remarque des éléments familiers. En décortiquant les codes artistiques des chinoiseries, certaines caractéristiques du goût occidental dont il a toujours été imprégné émergent en effet. La découverte de l’altérité, c’est donc a -- que « l’artiste ne doit pas copier la nature, mais en prendre les éléments pour créer autre chose^52 ». Ainsi, à travers la réflexion sur l’exposition des chinoiseries au XIX^e siècle, c’est l’art que l’on repense et auquel on fait emprunter des voies modernes. -- chose est de l’art, et pourtant semble n’être possible que par hasard […]^56 ». Gautier prend plaisir lui-même devant d’innombrables chinoiseries qui semblent issues de hasard, puisqu’elles sont inimitables. À ce point, le critique n’hésite pas à montrer son admiration pour le savoir-faire chinois : -- tableau intitulé Narcisse et la Source du peintre et portraitiste Jules Machard (1839-1900), critique sévèrement l’artiste en comparant son œuvre aux chinoiseries exposées dans les salons. La rigidité, les couleurs fades des corps (blanc, couleur neutre par excellente et bleu, couleur froide) ne donnent aucune émotion aux personnages. La peinture -- Conclusion 44L’image de la Chine à travers la représentation des chinoiseries au XIX^e siècle s’épanouit dans la littérature française. Ces objets de Chine, rares et précieux, en tant que témoins nostalgiques d’un Empire -- autre côté. 45Cette fascination pour les objets exotiques dont les chinoiseries font partie est devenue une tendance universelle au XIX^e siècle. Plus ces objets de Chine apparaissent dans la vie quotidienne des Français, -- Hugo. 46Cette belle image de la chinoiserie du XIX^e siècle va toutefois changer de nature dans les siècles suivants. À mesure que l’industrie se développe en Chine au XX^e siècle, la valeur de ses objets se réduit -- les matériaux précieux : la loi du marché devient la grande consommation et amplifie la méfiance des usagers vis-à-vis des produits made in China. L’admiration pour les chinoiseries qu’expriment les écrivains français du XIX^e ne se conserve qu’au musée, suscitant la nostalgie d’une nouvelle génération s’interrogeant sur ce revirement de -- 1 Voir L’Encyclopédie Larousse en ligne : http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/chinoiserie/33380. 2 Voir « La comédie de la mort », dans Revue de Paris, au bureau de la -- Pour citer cet article Zhe Fan, « L’univers des « chinoiseries » », paru dans Loxias, 58., mis en ligne le 14 septembre 2017, URL : http://revel.unice.fr/loxias/index.html/index.html?id=8745.