Publié le 16 novembre 2021 à 13h51

Jean-Marie Le Pen : « Zemmour a brûlé ses cartes » [Exclusif]

Réservé aux abonnés
Lecture : 3 minutes.

Que pense Jean-Marie Le Pen des chances d’Éric Zemmour à l’élection présidentielle. Entretien avec l’ancien leader de l’extrême droite française, âgé aujourd’hui de 93 ans.

Jean-Marie Le Pen a annoncé, en octobre, qu’il soutiendra Éric Zemmour à la présidentielle, s’il est « mieux placé » que Marine Le Pen.
Jean-Marie Le Pen a annoncé, en octobre, qu’il soutiendra Éric Zemmour à la présidentielle, s’il est « mieux placé » que Marine Le Pen. (Photo d’archives EPA)

La grande maison de Saint-Cloud est déserte. Au pied du perron, une tranchée a été creusée dans le jardin pour réparer une conduite. Le chauffage est coupé. En polo bleu ciel, Jean-Marie Le Pen me reçoit dans un petit bureau chauffé par un radiateur électrique. Il est au téléphone avec Bruno Gollnisch, dont la voix résonne : « Si Pétain a fait don de sa personne à la France, De Gaulle a fait don de la France à sa personne ! » Cela le fait rire. Pourtant, Éric Zemmour, auquel il a apporté son soutien, ne cesse, lui, d’invoquer le Général.

Avez-vous été surpris par l’ascension de Zemmour ?

Je le connais depuis trente ans et je ne crois pas qu’il ait mené une longue réflexion avant de s’engager dans cette campagne. Mais beaucoup de gens l’y ont poussé. Ce qui a plu, c’est sa façon de dire des choses qu’on n’avait pas l’habitude d’entendre. Les médias lui ont donné un formidable écho. D’autant que ce personnage entré subrepticement dans la course allait miner Marine Le Pen, en s’appuyant sur une extrême droite dont Marine avait tenté de repousser les volutes sulfureuses !

Vous l’avez incarnée, cette extrême droite. En ce temps-là, elle était antisémite…

Que Zemmour soit juif ne me gêne pas. Pour lui, c’est un bouclier. Si je disais ce qu’il dit, j’irais au bûcher ! D’ailleurs, les juifs de gauche comme BHL le vomissent !

Ça ne l’a pas empêché de grimper jusqu’à 17 % dans les sondages !

J’avais prévu qu’Éric, que j’aime bien, allait connaître un plafond. Des déclarations courageuses lui ont valu cette étonnante ascension mais il a brûlé ses cartes sans s’en rendre compte. Si Marine arrive en tête au premier tour, elle bénéficiera des voix de ses adversaires de droite. Zemmour aura lancé l’alerte. Mais la hune est un poste dangereux (il éclate de rire en levant les bras). J’y ai passé une partie de ma vie et j’ai survécu !

Zemmour survivra donc aussi ?

La politique est un métier dont l’apprentissage est difficile. Comme journaliste, il pouvait choisir ses cibles. Il était celui sur lequel on ne tire pas. Là, il va prendre des coups et il n’y est sans doute pas préparé. Il n’est pas à la hauteur de l’évènement. Marine, elle, a quand même un certain métier. Elle a subi de cruels échecs et elle est capable de mieux les affronter.

Et d’affronter Macron au printemps prochain ?

Nul ne peut le prédire. Ce sont les évènements qui commandent. On ne peut rien contre les tremblements de terre. Macron sera-t-il encore là ?

Et les candidats à l’investiture de LR ?

Je me suis « appuyé » leurs débats. Et j‘ai cru entendre « Le Pen avait raison ! » (rire). Xavier Bertrand s’est amélioré. Il s’est rendu compte de l’importance de l’immigration et des problèmes d’intégration que cela pose. Les autres ont suivi. Certains ont même proposé, comme je le fais depuis des années, la suspension du regroupement familial et du droit du sol. Mais « Too late » ! Je ne crois pas aux chances des Républicains. Mais ils vont ruiner celles de Zemmour.

Podcasts du Télégramme

Tous les podcasts