SYNDICALISME, LES MOTS ET LES CHOSES

Les Mots sur le Web

Analyse du coréen

concaténation des dumps textes

Une fois que le script bash du coréen est terminé, la concaténation des dump-textes en gros fichier.txt pour pouvoir utiliser iTrameur a été fait. Voici la commande utilisé. Dans le répertoire DUMP-TEXT, il y a aussi des fichiers bigrammes et index. Pour concatener uniquement les textes coréens déjà segmentés qui sont en utf-8 : "1-*-utf8-segment.txt".

Voici le résultat. On vois que les textes sont séparés avec <dump : nom du fichier> et </dump>.

Itrameur

Pour analyser tous les textes dump, le iTrameur est utilisé.

Si on ne met rien dans la recherche, il est normal qu'on ne voit que les mots grammaticaux comme 이, 는, 을 … (particules en coréen) dans la première page parce qu'ils sont plus fréquents qu'autres.

Quand on met les motifs à chercher dans la recherche. Voici le résultat de fréquence de "노동 조합 (syndicat)" "노조 (acronyme de syndicat)" "노동 (travail)" "노조원(syndiqué)" "노동자 (travailleur)" .

schéma de co-occurrence du mot "노조 (syndicat)"
fréquence absolue du mot "노조(syndicat)"
fréquence relative du mot "노조(syndicat)"
les mots en relation co-occurence du mot "노조(syndicat)"
grève - politique - revendication - négociation - Samsung - lutte - controverse - refus - problème - examen - contravention - travail temporaire

Le tableau en dessus montre les mots plus fréquents en enlevant les particules.

nuages des mots

création du gros fichier nettoyé

Si on essaie de faire les nuages des mots avec le Gros fichier sans nettoyage, les mots en grand seront évidemment les mots grammaticaux. Donc le nettoyage de gros fichier est nécessaire. Le site pour les nuages des mots : https://wordart.com/

nuages des mots coréens

On vois bien les mots importants écrits en grand : 노조 (syndicat), 노동자 (travailleur), 파업(grève), 조직 (organisation), 요구 (revendication), 노동(travail), 교섭(négociation), 사회 (société), 조합원 (syndiqué)…

Analyse de l'anglais

Le mot qui apparaît le plus n'est pas "trade" ou "union" mais bien "labor". En effet comme expliqué dans un des articles du blog, aux Etats-Unis, le mot "labor union" est une alternative à "trade union", qui s'explique par son emploi lors de la division en deux branches du mouvement. Le nuage de mots ne confirme pas l'hypothèse de base concernant l'anglais américain, en effet les mots qui apparaissent le plus dans le corpus sont des termes liés à l'idée de justice social, de lutte pour les droits. On ne retrouve pas de termes négatifs, qui auraient pu illustrer une mauvaise image du mouvement dans l'imaginaire américain, alors que le pays a pourtant une idéologie protestante basée sur l'importance du travail très forte et n'a pas de tradition socialiste ancrée.

iTrameur:

Le mot « union » a été rentré dans pôle source et ainsi que le mot « labour ». Les mots cooccurrents ne sont pas forcément ce que j’attendais. Pour l’anglais américain je m’attendais à des résultats moins « positifs ». En effet, le syndicalisme est pour moi lié au socialisme et au communisme deux courants qui ont connu des heures sombres aux Etats-Unis. En l’occurrence, le réseau d’iTtrameur permet de voir que sur le web, le contexte qui entoure le concept de « labour union », de « trade union », donne plutôt l’impression que le terme est lié aux concepts de solidarités, d’appartenance. On voit quand même le mot européen qui est souvent associé à « union », ce qui pourrait confirmer l’idée qu’aux Etats-Unis, le syndicalisme est un courant qui puise sa source en Europe et où il est bien implanté. On retrouve plutôt des termes qui viennent naturellement à l’esprit lorsque l’on pense au syndicalisme. Pour « labor » cependant on a quand même le terme american qui est cooccurrent. Les résultats pour l’anglais (américain) ne sont pas vraiment ceux auxquels je m’attendais, ils sont finalement dans une thématique assez similaire à ceux du français. On remarque les mentions du mouvement, la description de ce qu’est un « trade union ».

Analyse du français

Ici, le mot syndicalisme n'apparaît même, en tous cas il n'a pas la taille conséquente qu'on pourrait attendre, étant donnée son "importance" dans le corpus. On retrouve surtout le mot "social" ainsi que des termes renvoyant aux idéaux de gauche. On retrouve le mot "bien", mais on ne peut savoir si il s'agit d'un adverbe d'appréciation ou du nom "bien" qui pourrait renvoyer à la répartition des biens promus par les mouvements de gauche. On retrouve aussi quelques termes étonnants comme "police", mais certains extraits du corpus datant de l'âge d'or des Gilets Jaunes, la présence du mot pourrait être expliquée. Les mots débats et crise sont aussi très présents, illustrant peut-être la "crise" et les controverses qui frappent le syndicalisme en France. Le corpus serait donc plutôt un reflet fidèle de la situation actuelle.

iTrameur:

Les résultats français sont pour certains ceux qui étaient attendus dans les résultats de l’anglais. En effet au niveau du graphe de cooccurrences pour le mot « syndicalisme », on retrouve « anarcho » et « français », or le postulat de départ faisait l’hypothèse que dans l’imaginaire américain, le syndicalisme était lié à l’anarchisme et tout particulièrement à l’anarchisme français. Etonnement on retrouve le mot « chrétien », et bien que lorsque que dans l’article d’introduction sur le syndicalisme l’existence au XXe siècle d’un syndicat des travailleurs chrétiens a été mentionnée, il était surprenant de retrouver ce mot en particulier dans les cooccurrences de « syndicalisme ». Moins étonnant, on retrouve « révolutionnaire » et « européen », « industriel », des concepts qui viennent assez facilement à l’esprit lorsque qu’on aborde le sujet du syndicalisme. Le web reflèterait donc de manière partielle, les concepts liés au syndicalisme dans l’imaginaire populaire. En changeant le nombre de cooccurrent à gauche et à droite, le résultat reste sensiblement le même. Dans le cas du concordancier, on peut voir revenir le thème d’une perte de confiance envers les syndicats, on peut voir un lien avec les grèves actuelles, le web reflèterait donc bien le ressenti réel face à ce sujet dans l’actualité. On peut notamment voir une mention de la SNCF. Ici aussi un résultat peut surprenant mais qui répond au postulat de base, en France le syndicalisme un mouvement bien enraciné dans le pays mais qui a perdu de son pouvoir, avec des syndicat, institutions normalisées dans la société française jouant un rôle dans le développement de celle-ci.

Analyse du grec

1. PROBLÈME DE TAILLE

Le corpus généré contient, au final, plus de 3 500 000 mots :

Estimation du nombre de mots contenus dans le corpus total et ses sous-corpus

La première étape de son analyse a consisté en la concaténation des données des index fréquentiels générés par le script principal :

Exemple d'extrait d'index, chaque mot-forme est ici précédé du décompte de ses occurrences au sein d'une page unique
Concaténation des index générés par le script principal

Un programme Python3 a alors été rédigé qui calcule, pour l'ensemble du corpus, la somme des occurrences de chaque mot-forme, sans tenir compte de la casse :

Programme Python3 agrégeant les index fréquentiels des pages téléchargées
Résultat d'exécution

Le résultat d'exécution de ce programme s'est naturellement avéré insatisfaisant : sans lemmatisation, aucune donnée textométrique valable ne peut être générée pour une langue comme le grec moderne, à la morphologie dite "riche"; par ailleurs, seul un nombre limité de parties du discours intéressent cette étude (noms propres, noms communs, verbes et adjectifs) et sont invisibles dans la masse de ces résultats.

Le lemmatiseur et l'étiquetteur morphologique du grec moderne du module Python3 Spacy ont permis de remédier, en partie **, à ces problèmes; néanmoins, compte tenu, de la taille importante de ce corpus et du caractère limité de la puissance de calcul disponible pour la conduite de ce projet, la décision a dû être prise de restreindre cette analyse aux seuls contextes d'occurrences de la racine συνδικ-, générés par le script principal.
**(on notera que le lemmatiseur du grec moderne de ce module semble fort mauvais.)

Extrait d'un fichier de contextes généré par le script principal

Ces contextes ont donc été concaténés, réduisant les dimensions de ce corpus à moins de 200 000 mots, tout en en augmentant la pertinence.

Contextes concaténés en sous-corpus (presse, syndicaliste au masculin, syndicaliste au féminin, pages web)

2. NUAGES DE MOTS

Un programme Python3 a alors été rédigé qui tokenise, lemmatise et réalise l’étiquetage morphologique de ces contextes. Ce programme génère également quatre dictionnaires à compteur, pour les parties du discours qui intéressent cette étude (noms propres, noms communs, adjectifs et verbes), ainsi que des fichiers formatés pour la génération des nuages de mots.

Exemple d'un programme Python3 réalisant la tokenisation, la lemmatisation et l'etiquettage morphologique d'un texte grec pour générer des listes de noms propres, de noms communs, d'adjectifs et de verbes susceptibles d'être converties en nuages de mots.
Exemple de liste à nuage de mots : les lemmes sont répétés selon le nombre de leurs occurrences dans le document source

La plateforme wordclouds.com a ensuite permis la génération des nuages de mots suivants:

Nuage pour les noms propres des articles de presse (outil : https://www.wordclouds.com/)

La France apparaît en tête des noms propres des articles de presse, une conséquence de l'actualité au temps de la collecte des liens ; des noms d'institutions grecques apparaissent également, mais l'impression qui domine est que le lemmatiseur du grec employé ici fonctionne très mal !

Nuage pour les noms communs des articles de presse (outil : https://www.wordclouds.com/)

S'agissant des noms communs des textes de presse, des sigles apparaissent que le lemmatiseur a réduit en minuscules et qui auraient plutôt leur place parmi les noms propres.

Nuage pour les adjectifs des articles de presse (outil : https://www.wordclouds.com/)

Les adjectifs semblent mal lemmatisés, également.

Nuage pour les verbes des articles de presse (outil : https://www.wordclouds.com/)

Les verbes sont sans doute la partie du discours dont l'analyse est la plus évocatrice : le verbe "pouvoir" apparaît en bonne place, mais la lemmatisation prive ici d'une information importante pour cette étude, la personne ! "Nous pouvons" et "ils peuvent" sont, en effet, des entités linguistiques radicalement distinctes, pour l'analyse qui concerne cette étude. Le mieux est l'ennemi du bien !

LES CHOSES

Le syndicalisme en Corée

Pourquoi le mot "syndicalisme" donne l'image souvent négative en Corée du Sud?

syndicalisme pendant la colonisation

Grève général à Wonsan (원산 총파업) en 1929

Le premier syndicat est apparue en Corée pendant l'occupation japonaise en 1926. A cette époque-là, les coréens étaient poussées par les japonais pour les travaux forcés. Ces travailleurs avaient besoin de rassembler les gens pour revendiquer leur droit au travail et en même temps ils ont voulu que ce rassemblement soit un centre de la Résistance contre le Japon. En revanche, le Gouverneur général du Japon en Corée (조선총독부) avait interdit d'organiser tous les types de syndicats. Malgré tous ça les travailleurs coréens avaient réussi à organiser le premier syndicat en Corée (조선 노동 총연맹) regroupant tous les types de travail dans la péninsule coréenne. Ce premier syndicat a revendiqué leur condition de travail et aussi l'indépendance de son pays. Malheureusement, ce regroupement n'avait pas duré longtemps sous le régime japonais car le gouverneur interdit tous les rassemblements entre les coréens dans un lieu public.

syndicalisme après l'indépendance

conseil national des syndicats coréens (조선 노동 조합 전국 평의회) en 1945

En 1945, l'indépendance de la Corée est arrivée suite à la fin de la guerre du Pacifique. Les coréens ont eu la liberté d'organiser des syndicats. Plusieurs syndicats ont été apparus à nouveau dans le pays pour soutenir l'indépendance du pays. Toutefois, cela n'a pas pu durer longtemps à cause de la Guerre de la Corée (한국 전쟁) débutée en 1950. Cette guerre n'était pas forcément entre les deux Corées (c'est-à-dire la Corée du Sud et la Corée du Nord aujourd'hui), mais plutôt la guerre entre les grands puissants impériaux, les Etats-Unis et l'Union Soviétique. La Corée du Nord a mis en place un gouvernement communiste côté l'Union Soviétique et la Chine tandis que le Sud a mis en place un gouvernement capitaliste et démocratie côté l'Etats-Unis. A partir de là l'Etat sud-coréen commence à inculquer aux citoyens que le communisme est quelque chose de mal. Parler du communisme a été considéré comme coopérer avec l'ennemie, donc la Corée du Nord. Ce concept communiste sera lié à l'image de syndicalisme plus tard.

syndicalisme sous le règime dictatorial

Après l'armistice de cette guerre, le régime militaire dictatorial apparaît en Corée du Sud. La première loi sur les syndicats en Corée du sud a été établi sous ce régime. Plusieurs syndicats ont été créé en se basant sur cette loi. Les syndicats revendiquent leur droit de travail et aussi l'abolition du régime dictatorial. Afin de pouvoir maintenir ce régime, l'Etat décide à manipuler les citoyens avec l'idée apparue pendant la Guerre de la Corée : "Le communisme est quelque chose de mal". En même temps il traite les syndicats pour les communistes afin de les discriminer au travail et aussi à la vie quotidienne. Les médias n'ont montré que la partie violence des syndicats et des manifestations. Les syndicats en Corée du Sud ont été souvent traités pour les "rouges" (빨갱이 ; appellation dépréciative de communiste qui désigne les nord-coréens). De plus, en 1947 les Etats-Unis interdit d'organiser les syndicats en Corée du Sud car ils sont politisés. Avec cette interdiction, l'image sur syndicats commence de plus en plus à être négative.

syndicalisme d'aujourd'hui

lancement du premier syndicat Samsung en 2019

Probablement à cause de cette vue négative dans le pays, plupart des entreprises n'autorisait pas d'organiser les syndicats, par exemple le groupe Samsung connu par leur téléphone et électroménager interdisait l'acte syndical aux travailleurs jusqu'à 2019. Le premier syndicat à Samsung a été créé le 16 novembre 2019. Cependant, les fonctionnaires n'ont toujours pas de droit d'organiser les syndicats. La Corée du Sud reste aujourd'hui le seul pays de l'OCDE où les fonctionnaires n'ont pas ce droit.

A l'aide des différents logiciels permettant de créer des nuages de mots grâce à des fichiers textes, nous avons pu observer à travers le résultat si nos hypothèses sur les corpus pouavient être infirmées ou confirmées.

Le syndicalisme en France

Origine sémantique

Les syndicats sont des organisations qui existent en France depuis le Moyen-Âge, et qui réunissent des travailleurs d’un même corps de métier jusqu’à la Révolution française. Ils n’ont à l’époque aucune des revendications des syndicats contemporains. Les syndicats tels que nous les connaissons aujourd’hui sont les héritiers de l’union et l’organisation mises en place au sein de la classe ouvrière à partir du XIXe siècle. Le mot syndicat est dérivé du grec ancien σύνδικος, qui désignait le poste de magistrat à Athènes (juge, avocat…) et qui donna le mot syndicus (représentant d’une ville, avocat) suite à un emprunt par le bas-latin. De la racine syndic en latin, on obtient donc syndicat. Les principales dérivations du mot syndicat ont donc donné en français les mots syndicalisme, syndicaliste, syndiquer.

Historique du Syndicalisme

Comme indiqué précédemment, le syndicalisme tel qu’on l’entend aujourd’hui se développe en France au XIXe siècle suite à la Révolution Industrielle et à l’augmentation de la population ouvrière qui revendique que le gouvernement mette en place un certain nombre de droits concernant le travail ouvrier. Pour obtenir des résultats, suite à l’échec de plusieurs révoltes ouvrières dans les années 1830, la nécessité de s’organiser pour pouvoir faire pression sur les instances gouvernementales se fait sentir. Les premiers projets de telles organisations commencent alors à fleurir tels que la Bourse auxiliaire de prévoyance, créée à Paris et qui a pour but de garantir un minimum de sécurité financière aux ouvriers.

Un tournant a lieu en 1864, lorsque Napoléon III dans un souci d’ordre politique accorde le droit de grève aux travailleurs. Le syndicalisme connaît alors quelques beaux jours avant de subir les répressions à l’initiative du patronat et du pouvoir qui l’affaiblissent et atteignent leur paroxysme au moment de la Commune en 1871. Les pouvoirs syndicaux se reconstituent petit à petit et en 1884 est votée la loi Waldeck-Rousseau qui donne la liberté syndicale aux travailleurs ouvriers mais seulement à ces derniers.

Au début du XXe siècle, le syndicalisme français connaît un important développement, avec la multiplication des fédérations professionnelles suite à la création de la CGT en 1895, première centrale syndicale.  Le syndicalisme affiche alors une idéologie révolutionnaire et s’affranchit des partis politiques, les syndicats prennent leur indépendance. De nouvelles centrales syndicales sont créées notamment la CGTU en 1921, qui résulte du mouvement de scission au sein de la gauche et la CGT suite à la naissance de la IIIe Internationale (Internationale communiste) à Moscou. Sont aussi créés le premier syndicat des patrons ainsi que celui des travailleurs chrétiens. Le syndicalisme se répand dans toutes les couches de la population. Le syndicalisme connaît son Âge d’Or en 1936, suite à la victoire du Front Populaire aux élections législatives et la réunification de la CGT et de la CGTU. Sont alors signés les accords de Matignon qui signifient la mise en place de plusieurs lois sociales. Toutes les catégories de travailleurs sont touchées par le syndicalisme. Mais le mouvement disparaît sous Vichy.

En 1946, des lois syndicales sont remises en vigueur, cependant les différentes centrales syndicales défendent des agenda différents et la variation d’une centrale à une autre quant aux priorités se fait sentir. La crise économique de 1971, marque la crise du syndicalisme qui perd de son importance, les différentes tentatives de réforme sont des échecs.

Malgré cet important héritage syndicaliste, la France a aujourd’hui un ratio syndiqués/salariés de 8%, le déclin apparu depuis 1980 a continué sa course. Cependant depuis le mouvement des Gilets Jaunes l’année dernière et les grandes grèves interprofessionnelles de cette année, on peut constater que la fibre syndicaliste n’a pas complètement disparue en France.

Le syndicalisme aux États-Unis

Origine sémantique

Aux Etats-Unis, le syndicalisme correspond au terme trade unionism, bien qu’en anglais américain les syndicats soient plutôt appelés labor union que trade union. Le syndicalisme américain trouve ses racines dans les tous premiers temps de la construction de la jeune nation au XVIIIe siècle. Labor union/trade union dérive donc du concept de trade union qui existait déjà en Angleterre bien qu’il eut été fortement réprimé à l’époque. C’est un mot composé, trade signifiant ici « profession »/ « métier »/ « artisanat » (labor qui vient du mot latin labor qui signifie « travail ».) et union qui signifie union, dérivé du bas-latin unionem (accusatif d’unio) qui signifie l’unité.

historique du Trade Unionism

Quelques temps après l'émergence des Etats-Unis en tant qu'Etat indépendant, des regroupements de travailleurs qui cherchent à défendre leurs intérêt se mettent en place. Cependant ces derniers sont ponctuels et lorsque le but du groupe est atteint, il se dissout. Le premier syndicat américain, le Federal Society of Journeymen Cordwainers (Organisation Fédérale des Cordonniers) est créé en 1794 à Philadelphie. Se développent ensuite de nombreux petits syndicats d'artisans, qui tentent de se défendre face à l'arrivée de la Révolution Industrielle, de la main d'oeuvre et des produits peu chers qui l'accompagnent. L'échelle du syndicalisme passe de locale à communale, avec la création de centrales syndicales qui réunissent les différents syndicats d'une ville. A partir de ce moment, on arrive rapidement à un syndicalisme fonctionnant à l'échelle nationale avec notamment la création de l' International Typographical Union en 1852 (internationale car réunit des travailleurs du Canada et des Etats-Unis). Contrairement à la France, les syndicats étaient alors l'affaires des artisans et non des ouvriers peu qualifiés.

Au cours du XIXe siècle le syndicalisme américain est habité d'un certain paradoxe, il y exite deux branches distinctes de l'unionism qui fonctionnent cependant ensemble. Les trade unions défendaient plutôt une vision de lutte, essayant de répondre aux besoins des travailleurs, d'obtenir de meilleurs salaires. Les labor unions envisageaient plutôt des changements sur le long terme, cherchaient à unir toutes les catégories de travailleurs (patronnat, ouvrier) et arriver à une certaine égalité. Le labor n'utilise pas les moyens d'actions tels que la grève, qui sont plutôt associés aux trade unions. Cependant la fracture définitive entre ses deux branches d'un même courant a lieu à la fin du XIXe siècle et suite à cela, l'American Federation of Labor (AFL) qui réunit les différents trade union nationaux est créée. Malgré les aspirations de l'AFL, qui prétendait défendre tous les travailleurs, elle restait un syndicat de travailleurs qualifiés. De plus l'AFL comme les autres unions était une organisation qui ne laissait pas leur place aux personnes racisées et aux femmes, reflétant les autres sphères de la société américaine de l'époque.

A la fin du XIXe et au début du XXe, on peut remarquer le lien entre les partis politiques et les unions notamment l'AFL, qui fait du lobbying pour le parti qui défend des intérêts qu'elle partage et s'oppose aux partis "ennemis". La séparation entre syndicat et politique est alors perdue. Après la Première Guerre Mondiale, le syndicalisme américain retrouve sa neutralité politique mais cela s'accompagne d'un déclin.

Le renouveau du syndicalisme a lieu lors de la Grande Dépression du fait du mécontentement des ouvriers et de la population en général. C'est alors qu'est mise en place le CIO (Congress of Industrial Organizations) qui soutient l'ensemble des syndicats du secteur industriel. A partir de cette période le mouvement syndicaliste apporte un certain soutien notamment lors des campagnes électorales au parti démocrate et ce soutien perdura même lors de la Guerre Froide. La deuxième moitié du XXe siècle est marquée par de nombreux acquis sociaux pour les travailleurs et des augmentations importantes de salaire, ce sont les beaux jours du syndicalisme américain. Cependant les syndicats n'étaient accessibles qu'à une partie plutôt aisée de la masse salariale.

Mais à partir des années 70, l’adhérence aux trade unions diminue de nouveau, ces dernières perdent leur main mise sur l'industrie avec l'arrivée de biens produits à l'étranger et la restructuration du secteur industriel. Le seul secteur dans lequel le mouvement syndicaliste persiste est le secteur publique. Aujourd'hui moins de 17% des travailleurs américains sont syndiqués cependant les syndicats ont réussi à se diversifier et accueillent des travailleuses ainsi que des travailleurs de différentes origines ethniques.

Le syndicalisme en Grèce

Le syndicalisme moderne apparaît en Grèce au cours des deux dernières décennies du XIXème siècle, d’abord dans les chantiers navals et les tanneries d’Ermoupoli des Cyclades, puis à Athènes, au Pirée et dans tous les centres urbains. Ces premiers syndicats n’exerçaient aucune action coordonnée à l’échelle de toute la Grèce, se limitant à négocier des accords de branches, à l’échelon local, tout en assurant les fonctions de mutuelles d’assistance des travailleurs, en cas de chômage, de maladie ou de décès. L’enclavement des territoires de la Grèce continentale et ses nombreuses îles et archipels, ainsi que le jeune âge de la nation grecque moderne, explique en grande partie ce cantonnement du militantisme ouvrier à ces moindres échelles.

La diffusion des idées du socialisme parmi les travailleurs grecs, galvanisés par le succès de la révolution d’Octobre, change toutefois cette donne, dès la deuxième décennie du XXème siècle : le premier syndicat panhellénique, la GSEE (ΓΣΕΕ, Γενική Συνομοσπονδία Εργατών Ελλάδας), est fondé à Athènes en 1918, une semaine avant la création du premier parti communiste grec, le KKE (KKE, Κομμουνιστικό Κόμμα Ελλάδας); le premier syndicat des employés du secteur public, (Συνομοσπονδία Δημοσίων Υπαλλήλων Ελλάδος, aujourd’hui appelé ADEDY, Α.Δ.Ε.Δ.Υ, Ανώτατη Διοίκηση Ενώσεων Δημοσίων Υπαλλήλων) devra néanmoins attendre l’année 1926 pour être autorisé. Autant d'acronymes qui figurent en bonne place parmi les nuages de mots générés

La Grande Dépression des années 1930 frappe durement la Grèce et s’accompagne d’une montée en puissance du parti communiste grec qui effraie la grande bourgeoisie grecque. Dans ce contexte, coups d’État et dictatures se succèdent qui persécutent durement les militants communistes et s’efforcent de neutraliser les mouvements syndicaux. Ainsi, dès 1936, la dictature du général Metaxas entreprend-elle, sur le modèle de l’Italie fasciste, d’intégrer les organisations syndicales à l’appareil d’État, en les finançant par l’impôt.

Durant la Seconde Guerre mondiale et la brutale occupation nazie de la Grèce, les militants communistes et syndicalistes clandestins s’illustrent par leur héroïsme dans la résistance mais sont trahis par les alliés, anti-communistes farouches, à la Libération : la Grèce d’après-guerre organise ainsi, de manière violente, l’épuration de ses résistants, tout en plaçant ses collaborateurs à des postes de pouvoir. Ces persécutions se poursuivront jusqu’au milieu des années 1970 et la chute du régime des colonels. Le syndicalisme grec n’est sur cette période qu’une créature du pouvoir militaire, participant à la persécution des militants de gauche et s'insérant dans des réseaux de corruption et de clientélisme qui perdureront jusqu’au XXIème siècle. Contre la permanence de cet état de fait, un nouveau mouvement syndical, le PAME, (Π.Α.ΜΕ, Πανεργατικό Αγωνιστικό Μέτωπο) est fondé, en 1999, sous l’impulsion du parti communiste grec désireux de ramener le syndicalisme grec au militantisme.

Le syndicalisme grec contemporain reste divisé en deux grandes confédérations : la GSEE pour le secteur privé, et l’ADEDY, pour les employés du secteur public, qui s’appuient chacune sur un grand nombre de fédérations sectorielles ou professionnelles (150 pour la GSEE, 52 pour l’ADEDY), elles-mêmes composées de syndicats locaux (au nombre de 3400, en 2007), héritage du morcellement originel du syndicalisme hellénique. La GSEE déclarait, en 2007, 472 000 affiliés et l’ADEDY 311 000 membres. Le financement de ces confédérations est assuré principalement par l’État, sur la base d’une cotisation payable par tous les travailleurs, syndiqués ou non, et leur mode de gestion est hautement politique : les sièges aux conseils exécutifs sont pourvus sur la base de critères partisans (dans le cas de la GSEE, 22 sièges pour le Parti Socialiste grec, 11 pour les conservateurs, 9 pour les communistes et 3 pour les indépendants, en 2010). Entre le quart et le tiers des travailleurs grecs seraient affiliés à un syndicat, (contre 8% en France). 

La crise économique mondiale de 2008 a très durement frappé la société grecque : l’économie du pays s’est en effet contractée de 25 %, en une décennie, et plus du tiers de sa population vit aujourd’hui sous le seuil de pauvreté, victime de la plus forte récession d’après-guerre, dans un pays développé. Des mesures de libéralisation de l’économie ont été imposées au pays par ses bailleurs de fonds qui visaient, délibérément, à entraver l’activité syndicale : le droit de grève a ainsi été retiré aux employés du secteur public, en 2013, sous peine d’emprisonnement, et toutes les conventions collectives ont été abrogées, entraînant un effondrement du salaire minimum. En septembre 2019, une grève générale paralysait toute la Grèce, en protestation contre une loi du gouvernement de Kyriakos Mitsotakis devant permettre aux autorités du pays d’établir la liste de tous les citoyens syndiqués et de s’ingérer dans les mécanismes du vote des grèves du secteur privé... Cet antagonisme actuel de la loi et du syndicalisme grec explique sans doute la présence du mot "loi", νόμος, dans le peloton de tête des substantifs les plus fréquents de ce corpus.

ENCORE UN MOT... POUR CONCLURE

Au terme de cette étude, il apparaît que peu de choses puissent être dites, au départ de ces corpus, pour opposer les perceptions qu’ont des institutions syndicales les membres de communautés linguistiques et culturelles distinctes: les mots-formes de haute fréquence semblent, peu ou prou, identiques d’une langue à l’autre, en dépit d’Histoires économiques très contrastées… Cela pourrait être interprété comme un indice de l’uniformisation des institutions sociales à l’oeuvre au sein du monde développé mondialisé et en voie de désindustrialisation.